Palestine, un cauchemar

Le soleil se levait à peine, je dormais encore.  J’ai été tout à coup réveillé par des coups violents frappés à ma porte et je me suis levé en vitesse pour voir ce qu’il se passait. Quand j’ai ouvert, des hommes armés se trouvaient devant moi.  « Vous n’êtes pas chez vous », ont-ils crié.

 

Ils m’ont laissé quatre minutes pour m’habiller, puis ils m’ont sorti de force de ma maison et ils ont pris ma clef.  J’ai protesté, évidemment, mais je savais que cela ne servait à rien.  Il y a trois mois, la même chose est arrivée à mon ami Ibrahim qui, parce qu’il voulait se rebeller, a été frappé et est tombé à terre.  On l’a relevé brusquement et on lui a mis sous le nez un prétendu document officiel qui datait de cinquante ans et qui mentionnait comme propriétaire de sa maison un certain Samuel, fils d’Yitzhak, petit-fils de Shlomo.

Ibrahim a déposé plainte.  Il était né dans sa maison, son père Muhammad avant lui et son grand père Mustafa aussi.  Les autres, avec leur généalogie, n’avaient rien de plus !  Mustafa avait loué sa maison pendant trois ans à un juif parce que les récoltes avaient été mauvaises et qu’il fallait nourrir la famille mais il l’avait récupérée ensuite, c’était il y a longtemps et Ibrahim était sûr de son bon droit.  Mais il a constaté que la municipalité était complice et, après avoir été débouté par le tribunal, il a appris que celui-ci était soutenu par le gouvernement.

Qu’est-ce que vous voulez faire contre un gouvernement quand vous ne pouvez pas voter ?  Et vous ne pouvez pas voter puisque, quand les colonisateurs sont arrivés, ils vous ont donné une carte de « résident ».  Vous n’êtes pas « citoyen » et vous assistez impuissant à l’invasion de votre pays par des colonisateurs de plus en plus nombreux et de plus en plus agressifs.

Vous avez bien des prétendus représentants mais ceux-ci s’occupent sans doute de choses tellement importantes qu’ils n’ont pas le temps de s’occuper de vous.  Ni d’Ibrahim, ni de tous les autres qui sont dans le même cas.  De temps en temps, les représentants font des déclarations mais personne ne les écoute et cela ne change rien, en réalité, vous ne savez pas ce que foutent vos représentants, c’est très nébuleux.  En tout cas, j’ai été réveillé de façon tellement surréaliste que je n’arrive pas à réfléchir posément, j’ai simplement l’impression d’être dans le pétrin.

Je sais que nos représentants discutent de temps en temps avec d’autres représentants qui sont mal vus parce qu’ils résistent plus que les nôtres et sont alors désignés sous le nom de « terroristes ».  Au total, rien n’avance sauf la confiscation de nos maisons de famille par les colonisateurs.

Maintenant que je suis jeté à la rue, il faut que j’aille quelque part.  Peut-être demander à Nadia et Wasef s’ils peuvent me caser un moment dans un petit coin de leur maison ?  Je travaille, je les dédommagerai.  Et puis je demanderai à Sakineh et Majdi, leur maison est plus délabrée mais elle est plus grande ? 

Ce qu’il y a de bien dans notre pays, c’est que personne ne reste à la rue.  J’ai vu dans des reportages sur les pays européens que des gens sont « SDF ».  Ils sont abandonnés à leur sort et, quand l’un d’eux meurt, ça fait un petit scandale qui retombe vite.  Chez nous, ce serait tellement scandaleux de ne pas aider quelqu’un dans le besoin que toute la communauté serait morte de honte depuis longtemps.

Je me réveille, je suis en Belgique, c’était un cauchemar.  Ouf !

Je suis tout-à-fait éveillé, je suis en Palestine, je vis un cauchemar comme tant d’autres Palestiniens !

 

SOURCE: Investig’Action

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