Venezuela : l’opposition veut-elle un remake du coup d’Etat contre Allende?

Au-delà de la propagande systématique des médias contre le gouvernement vénézuélien, il convient de s’intéresser aux actions menées par l’opposition, qui détient le pouvoir législatif depuis 1 an. Faire appel aux forces armées, accuser le Président d’avoir violé la Constitution, ou encore annoncer sa destitution…L’opposition semble s’inspirer de l’Assemblée Nationale chilienne, durant les mois ayant précédé le coup d’Etat contre Allende. Un drôle de programme pour des soi disant défenseurs de la démocratie !

 

Gagnants et perdants de la crise économique

 

Contrairement à ce qu’elle avait promis le jour des élections en décembre 2015, l’opposition vénézuélienne n’a rien fait pour “en finir avec les queues”. (1) Depuis, elle n’a pas considéré opportun de soutenir les initiatives du gouvernement dans le cadre de la guerre économique non plus. Au lieu de cela, l’opposition a, grâce à l’appui des médias, multiplié les appels à l’aide au monde entier, pour dénoncer la gestion de la crise économique du gouvernement Maduro et l’accuser de tous les maux.

Le récit dominant impose une lecture unidimensionnelle: le gouvernement bolivarien porte l’entière responsabilité de la crise. Tout se passe comme si, du jour au lendemain, la droite découvrait que les revenus de l’État vénézuélien ont toujours été fortement dépendants des cours du pétrole. “Qu’aurait fait l’oligarchie si elle devait gouverner le pays avec le pétrole à 24 $ le baril?” – demanda le Président Maduro à des opposants “enhardis par l’ivresse du pouvoir”. (2)

Pour rendre les choses encore plus compliquées, l’économie ne s’est pas diversifié et la plupart des produits continuent à être importés. Cela a permis que l’oligarchie s’accapare des denrées et spécule sur leur prix. Souvenons-nous que l’oligarchie chilienne avait également provoqué la pénurie afin de semer le mécontentement dans la population et ouvrir la voie aux putschistes.

Nier la réalité de la guerre économique est une stratégie politicienne qui a fait long feu. Le résultat d’un sondage montre que 66% des Vénézuéliens pensent que “l’opposition parle uniquement de renverser Maduro, mais elle n’a pas encore présenté de plan pour résoudre les problèmes économiques”. Et le même sondage indique également que 68 % des Vénézuéliens “seraient d’accord pour que l’opposition aide le président Maduro à résoudre les problèmes économiques du pays”. (3)

 

Une table de dialogue éclair?

 

Invitée à maintes reprises par le gouvernement, l’opposition a été obligée de participer à la table de dialogue soutenue par l’UNASUR, le Vatican et des personnalités comme l’ex-président espagnol Rodriguez Zapatero. Lors d’une de ces discussions, elle avait donc indiqué vouloir “travailler ensemble dans le domaine économique et social, afin de combattre toute forme de sabotage, boycott ou agression à l’économie vénézuélienne”. (4) Comme on dit dans ces cas, mieux vaut tard que jamais…

Mais en refusant de continuer à assister à la table de dialogue, la droite a manqué une chance historique, qui consistait à exercer une opposition constructive et à soutenir les initiatives en faveur des plus démunis. (5) Car, au milieu d’innombrables difficultés, la Révolution Bolivarienne a continué la mise en œuvre de son ambitieux programme social, notamment dans le domaine de la santé et du logement à travers les Missions Barrio Adentro et Vivienda.

Et face à la guerre économique des oligopoles comme Polar, le gouvernement a également consolidé les “Comités Locaux d’Approvisionnement et de Production” (CLAP), comme une réponse urgente à la crise. A titre d’exemple, en 2016 la distribution d’aliments a atteint une moyenne de 30 000 tonnes hebdomadaires à travers de 21 000 comités déployés à l’échelle nationale.

En 2017, il est prévu d’augmenter la quantité à hauteur de 41 000 tonnes par semaine. (6) Et le 8 janvier le président ouvrier Nicolas Maduro a aussi annoncé une augmentation du salaire minimum et des retraites de 50 %. Avec la carte qui donne droit au “panier socialiste”, les travailleurs augmenteront leur pouvoir d’achat à un minimum légal de 100.000 bolivares.

 

Des amis qui tombent à pic

 

En cachant soigneusement ces informations, les médias continuent à développer l’image d’un “État en faillite”. Ce qui justifierait l’intervention étrangère ou le coup d’État. La forme peut varier, mais l’objectif reste le même: diaboliser, puis renverser Maduro. Et depuis qu’en 2013 le peuple lui fit confiance pour continuer l’œuvre du Comandante Eterno, les occasions n’ont pas manqué. Résister au putschisme, c’est donc devenu un peu la spécialité du gouvernement.

Faire appel aux forces armées, accuser le Président d’avoir violé la Constitution, ou encore annoncer sa destitution dans quelques mois… L’opposition semble s’inspirer de l’Assemblée Nationale chilienne, durant les mois ayant précédé le coup d’Etat contre Allende. Les appels à sortir dans la rue et à “prendre le Palais de Miraflores”, se sont dégonflés systématiquement depuis l’opération “La Sortie”. (7)

En revanche, l’année dernière les appels à l’aide adressés à l’extérieur ont compté sur l’appui du secrétaire de l’OEA, Luis Almagro, qui a menacé d’activer les mécanismes de la “charte démocratique”. Il s’est contenté de marcher dans le sillage d’Obama, qui a renouvelé son décret pour la deuxième année consécutive, selon lequel le Venezuela constitue “une menace inhabituelle et extraordinaire pour la sécurité nationale des États-Unis”. (8)

En clair, cet “ordre exécutif” équivaut à un permis d’ingérence partout où la première puissance militaire au monde invoque une soi-disant menace. Pendant ce temps-là, le gouvernement a appelé l’opposition à poursuivre le dialogue. Et il a continué à mobiliser le peuple face aux menaces, comme elle le fit lors de la Marche anti-impérialiste du 17 décembre dernier. L’annonce récente d’un accord entre la Colombie et l’OTAN, rend cette menace encore plus tangible qu’elle ne l’était avant.

 

La nouvelle vague bolivarienne

 

La campagne médiatique internationale contre le Venezuela a pourtant eu le mérite de révéler une chose: l’opposition n’a pas la moindre volonté de lutter contre la pauvreté et les inégalités. En réalité, elle est impatiente de revenir aux années du néolibéralisme, où la social-démocratie s’arrangeait avec le FMI pour démanteler l’État et distribuer la misère au peuple. Plus le temps passe, plus elle se discrédite. En niant les conquêtes de la Révolution, la rhétorique anti-chaviste s’avère impuissante face à la nouvelle vague bolivarienne.

Mais la prudence est toujours de mise: il ne faut pas sous-estimer la capacité des médias à produire de l’amnésie collective. A celles et ceux qui, face à la pression du discours anti-Maduro, préfèrent se donner bonne conscience ou croire que l’opposition putschiste se trouverait malgré tout du “bon côté de l’histoire”…le peuple de Notre Amérique sait quoi répondre : “Allende presente, ahora y siempre ! Chavez vive, la lucha sigue !”

 

Notes:

1 ) La MUD si prometio acabar con las colas , Entodonoticias.com, 10/12/2015

2 ) Maduro: “MUD malinterpreta el momento historico”, El Universal, 13/12016

3 ) Interlaces, 68% de acuerdo con que la oposicion ayude a resolver problemas economicos, 6/11/2016

4 ) MUD acepto enfrentar junto al gobierno el sabotaje economico, VTV Canal 8, 13/11/2016

5 ) MUD anuncia que no asistirán al diálogo acordado para hoy, Mision Verdad, 6/12/16

6 ) Clap elevaran distribucion a mas de 41.000 toneladas de alimentos semanales en 2017, Vision Apurena, 30/12/16

7 ) Au Venezuela, les victimes du putschisme se battent contre l’impunité, Investig’Action, 21/3/16

8 ) El Decreto de Obama paso a paso, Correo del Orinoco, 12/3/2016

 

Source: Le Journal de Notre Amérique, janvier 2017

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