Quand le pétrole ramène Emmanuel Macron sur terre

Au sommet de la COP27 à Charmel Cheick en Egypte, une scène surréaliste a attiré l’attention de nombreux observateurs. Le lundi 7 novembre 2022, en marge de ce sommet, les présidents, le français Emmanuel Macron et le vénézuélien Nicolas Maduro, ont eu une brève entrevue. Le beau monde autour de ces deux présidents, était bien surpris de voir le président français se confondre en « salamalecs » et donner du « M. le président » à Nicolas Maduro, le président vénézuélien, successeur d’Hugo Chavez. Cette scène inimaginable il y a quelque temps, est le signe évident que beaucoup d’eau a coulé sous le pont et que les sanctions contre le pétrole russe et ses conséquences sont passées par là.

Quelqu’un ne disait-il pas que le pétrole rend sage ? Pour rappel : En 2019, quelques militaires vénézuéliens, manipulés de l’extérieur, avaient tenté de renverser le gouvernement du président Nicolas Maduro. Leur appel au soulèvement général de toute l’armée, n’a pas eu les résultats escomptés. On croyait que tout était rentré dans l’ordre, quand Juan Guaido, le président du parlement vénézuélien et figure de proue de l’opposition, appelait ses partisans à des manifestations, puis s’est autoproclamé président par intérim du Venezuela. Aussi surprenant que cela puisse paraître, il est aussitôt reconnu comme président légitime du Venezuela, par les États-Unis, le Canada, le Brésil, l’Argentine et l’Union européenne avec à sa tête la France. En Amérique latine, seuls le Mexique, la Bolivie et Cuba, continuaient d’apporter leur soutien au président légal et légitime du Venezuela, Nicolas Maduro.

Le président français, Emmanuel Macron, ira jusqu’à saluer et féliciter les partisans de Juan Guaido, descendus dans les rues. Dans un tweet, il disait ceci : « … les Vénézuéliens ont le droit de s’exprimer librement et démocratiquement. La France reconnait Juan Guaido comme « président en charge » pour mettre en œuvre un processus électoral. Nous soutenons le Groupe de contact créé avec l’UE dans cette période de transition… ». Joignant l’acte à la parole, la France de Macron, les États-Unis et leurs alliés, ont tenté de mettre à mal la gouvernance de Nicolas Maduro. Des pénuries artificielles sont provoquées pour faire pression sur le président vénézuélien. Les avoirs du pays à l’extérieur, notamment aux États-Unis et en Angleterre sont gelés, et la Suisse fut sommée d’en faire autant.

L’objectif était de pousser le peuple vénézuélien qui vit dans la pauvreté et dans la précarité à la révolte, avec pour résultat attendu le départ de Nicolas Maduro. Ces Occidentaux vont pousser le bouchon, au point de mettre à la disposition du gouvernement fantôme et fantoche de Juan Guaido, les fonds gelés du Venezuela. Mais la réalité était là et implacable. Le gouvernement fantoche de Juan Guaido, n’existait que dans les médias occidentaux et sur les réseaux sociaux. Il n’avait aucune emprise sur le quotidien des Vénézuéliens.

Ce comportement des chantres de la démocratie et donneurs de leçons devant l’Éternel, est une véritable insulte à l’intelligence des hommes que nous sommes. Mais aujourd’hui, face à l’effet boomerang des sanctions contre le pétrole et le gaz russes, face donc à l’effet retour de leur propre turpitude, voilà ces occidentaux qui sillonnent les capitales des pays producteurs de pétrole et de gaz pour trouver des réponses aux nombreuses difficultés qui les assaillent.

Ils se trouvent dans l’obligation de faire profil bas et de revenir sur certaines de leurs décisions prises unilatéralement. Ainsi, Joe Biden, le président américain qui n’a aucune sympathie pour le prince saoudien, Mohammed ben Salman, peut se rendre en Arabie Saoudite, plaider auprès de ce dernier, aux fins que celui-ci use de son influence et pousser l’Opep à augmenter sa production de pétrole. Cela aurait pour effet, une baisse du prix du baril de pétrole. Par ailleurs, les États-Unis ont décidé d’assouplir les sanctions contre le Venezuela pour permettre à la compagnie pétrolière américaine Chevron d’y relancer ses opérations. Au-delà du prétexte de dialogue entre le pouvoir de Caracas et son opposition, pour entamer des pourparlers dans le but d’organiser des élections libres en 2024, les États-Unis ont là l’opportunité de réduire la souffrance des automobilistes américains à la pompe.

Et comme dans le monde occidental, ce sont les États-Unis qui donnent la cadence de la marche à suivre, on n’est guère surpris de la nouvelle attitude du président français face à son homologue vénézuélien. Que devient alors Juan Guaido ? Est-il toujours le président par intérim du Venezuela reconnu par les Occidentaux ? Bien malin celui qui pourra répondre à ces questions. Ce dernier peut continuer à se faire l’illusion d’être le président de son pays, quand ses maîtres sont dans l’obligation de négocier leur survie avec son adversaire ! C’est un message subliminal lancé à tous ces leaders qui, forts du soutien des Occidentaux, continuent de brimer leurs populations et se croient intouchables. Mais au rendez-vous des intérêts, les pays n’ont pas d’amis, encore moins de protégés. Ils les laissent tomber sans état d’âme. Qu’on se le tienne pour dit ! Ainsi va le monde. Mais arrive le jour où l’ivraie sera séparée du vrai.

 

Opinion parue sur le site Afrique sur 7

Photo: Capture de Telesur

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