« Les Chinois sont notre malheur ! »

Face aux critiques concernant leur gestion de la crise du Covid-19, les dirigeants occidentaux, Trump en tête, ont trouvé le bouc émissaire idéal. Ils n’ont pas tardé à lâcher leurs chiens de garde idéologiques, médiatiques et « scientifiques » pour conspuer la Chine, l’accusant d’être responsable du malheur qui frappe leurs sociétés gangrenées par des décennies de réformes néolibérales et mises en danger par leurs dirigeants incompétents et irresponsables. C’est dans ce contexte que des « parlementaires, universitaires, avocats et responsables politiques » (2) viennent d’affirmer dans une lettre ouverte que le Parti communiste Chinois « met en danger les citoyens chinois et le monde ».(3) Qui sont ces gens ? Peut-on se fier à leur jugement et à leurs paroles ?

Une petite recherche montre que sur la base d’un anticommunisme primaire et d’une haine implacable envers la Chine moderne se sont retrouvés des extrémistes de droite, des néo-conservateurs partisans de Trump et de Netanyahou, des chrétiens intégristes et fondamentalistes, des adeptes et des lobbyistes de sectes, des partisans du séparatisme ouïghour et tibétain ainsi que des politiciens géorgiens, ukrainiens, baltes et polonais au cerveau obnubilé par une russophobie devenue pathologique.

 

L’épidémie du Covid-19 met à nu les carences des systèmes capitalistes néolibéraux

Voici ce que le New York Times écrit sur son site le 17 avril 2020. Faisant le point sur l’épidémie du covid-19 qui a fini par toucher les États-Unis de plein fouet, il constate : « L’épidémie dans ce pays, qui compte désormais le plus grand nombre de cas connus dans le monde, a explosé au cours des six dernières semaines. Au début du mois de mars, les tests disponibles étant extrêmement limités, seuls 70 cas avaient été signalés aux États-Unis, la plupart liés à des voyages à l’étranger. Plus de 1 000 décès sont désormais annoncés chaque jour dans tout le pays, certains jours dépassant même les 2 000 ». (4)

Dans un article de fond pour The Atlantic, le journaliste George Packer, constate que son pays « a réagi à la pandémie de coronavirus comme un pays en développement, ‘avec des infrastructures de mauvaise qualité et un gouvernement dysfonctionnel dont les dirigeants étaient trop corrompus ou stupides pour éviter des souffrances massives’. Et il pense que les Américains vivent dans un État en déliquescence (‘failed state’). » (5)

Le déni du danger et le refus d’agir de Trump, ce clown égotiste et ignare que la « démocratie américaine » a porté à la Maison-Blanche, a permis la prolifération de la pandémie aux États-Unis. Le Guardian de Londres souligne que pendant « des semaines, il a donné le même conseil aux Américains : ‘Nous avons tout sous contrôle’ ; ‘Les États-Unis en pleine forme !’; et, bien sûr, ‘Fake news’. Mais en privé, Trump a été averti d’une ‘véritable pandémie de Covid-19’ et de ‘1 à 2 millions’ de décès américains, selon des courriers électroniques internes, des mémorandums et d’autres preuves récemment mises au jour documentant des délibérations internes. » Il a donc été « personnellement averti, à plusieurs reprises, de la crise croissante qui a débuté à la mi-janvier. Mais il a continué à donner de fausses assurances au public américain », par exemple, en affirmant encore le 26 février « lors d’une conférence de presse à la Maison Blanche : ‘Nous allons bientôt être à seulement cinq personnes. Et nous pourrions n’être qu’à une ou deux personnes au cours de la prochaine courte période’. » (6)

Dans les pays occidentaux qui ont mené pendant des décennies des politiques d’austérité, de « réformes » néolibérales et de démantèlement des services publics, l’épidémie a frappé un système de santé et de soins fragilisé voire complètement défaillant. Aux États-Unis, la spécificité du « American Way of Life » ultralibéral qui fait qu’une grande partie de la population n’a pas d’assurance-maladie tout en étant incapable de payer les coûts faramineux occasionnés, par exemple, par une hospitalisation, a encore aggravé les choses.

L’épidémie n’a pas manqué de souligner d’autres tares de la société américaine : l’inégalité sociale et la discrimination raciale. Comme le constate encore le New York Times, dans « une grande partie du pays, les Afro-Américains ont été infectés par le coronavirus à des taux disproportionnés. » Ainsi, par exemple, « dans l’Illinois, où les blancs sont quatre fois plus nombreux que les Afro-Américains, plus de noirs sont morts du virus que tout autre groupe racial. ‘Nous en connaissons la cause : des siècles de disparités sanitaires favorisées par le désinvestissement systémique dans la santé communautaire’, a déclaré Robin Kelly, le représentant démocrate de l’Illinois, sur Twitter. » (7)

Au vu de la situation dramatique dans les principaux États occidentaux et face à l’irresponsabilité et aux hésitations de nombre de leurs responsables politiques, tout observateur honnête, en Europe comme aux États-Unis, aurait donc trouvé énormément de matière à réflexion et à critique. D’autant plus que la Chine, après une lutte tenace et un effort collectif exemplaire, vient de vaincre l’épidémie et apporte désormais une aide appréciable aux autres pays.

 

Don de la Chine de 2.016 kits de test à la Syrie pour l'aider à lutter contre le nouveau coronavirus (Xinhua/Ammar Safarjalani)
Don de la Chine de 2.016 kits de test à la Syrie pour l’aider à lutter contre le nouveau coronavirus (Xinhua/Ammar Safarjalani)

 

Mais une réflexion critique n’était pas du tout dans l’intention des signataires de la Lettre ouverte antichinoise. Pour détourner l’attention des erreurs et des échecs de leurs maîtres et par fanatisme idéologique, ils ont voulu faire de la Chine le bouc émissaire et la dénigrer de plus belle.

 

Le NED et ses « think tanks » néoconservateurs

Les auteurs de la Lettre ouverte qui conspuent la Chine et le Parti Communiste Chinois se présentent eux-mêmes comme « un groupe international de personnalités, d’analystes de la politique de sécurité et d’observateurs de la Chine ». Leurs maîtres américains sont plus loquaces, puisqu’ils révèlent que parmi les signataires, il y a « de nombreux partenaires du National Endowment for Democracy – NED) », la branche légale de la CIA. (8)

Une bonne partie des signataires appartient à des think tanks de la droite pure et dure inféodée à l’empire US et au grand capital comme le Macdonald-Laurier Institute (Charles Burton, Duanjie Chen, J. Michael Cole, Marcus Kolga, Anastasia Lin), la Henry Jackson Society ou encore le Foreign Policy Research Institute (FPRI).

Le Macdonald-Laurier Institute (MLI) « produit des recherches et travaille à façonner l’opinion publique pour qu’elle soutienne les politiques de réduction des dépenses gouvernementales en faveur de la création de richesses privées. … MLI est également membre de l’Atlas Network – un réseau de groupes de réflexion néolibéraux qui se consacrent à la promotion de l’idéologie du marché libre dans le monde entier. MLI reçoit des fonds d’Atlas par l’intermédiaire de ses membres. Les bailleurs de fonds d’Atlas comportent des intérêts pétroliers tels qu’ExxonMobil et les frères Koch, des milliardaires du pétrole et du gaz. » (9)

De toute évidence, on a affaire à des gens particulièrement qualifiés pour parler de l’actuelle crise sanitaire, puisqu’aux États-Unis, leurs bailleurs de fonds « supportent activement des organisations qui soutiennent des candidats républicains, et en particulier ceux qui luttent pour la réduction de l’importance de l’État, la réduction des dépenses publiques, notamment en matière de santé avec la sécurité sociale. » (10)

Venons-en à la Henry Jackson Society (HJS) qui, bien qu’étant un laboratoire d’idées britannique, porte – par pur hasard ? – le nom d’un « faucon libéral anticommuniste » … américain. La Wikipédia anglaise compte l’ancien chef du service secret britannique Sir Richard Dearlove parmi ses pères spirituels et « l’ancien directeur de la CIA R. James Woolsey Jr. » ainsi que Richard Perle, sous W. Bush un des principaux responsables de la guerre d’agression contre l’Iraq, « parmi les parrains (‘patrons’) internationaux ».

En 2017, un cofondateur de la HJS, Matthew Jamison, « a écrit qu’il avait honte de son implication, n’ayant jamais imaginé que la Henry Jackson Society ‘deviendrait un groupe de propagande raciste d’extrême droite et profondément antimusulman […] pour salir d’autres cultures, religions et groupes ethniques’. » Dans la même année 2017, on a d’ailleurs accusé la HJS « de mener une campagne de propagande antichinoise après que l’ambassade du Japon lui eut versé une redevance mensuelle de 10 000 livres. » Son but : « faire passer les préoccupations du Japon concernant la Chine dans les journaux britanniques. » (11)

Stephen Blank, un des signataires de la « lettre » antichinoise, est membre d’un autre think tank américain, le Foreign Policy Research Institute (FPRI). Blank a un passé de conseiller auprès de la CIA. (12) Quant au FPRI, il « se décrit comme ‘voué à faire en sorte que les connaissances acquises dans le domaine de la recherche soient prises en compte dans l’élaboration des politiques qui font progresser les intérêts nationaux des États-Unis’ ». Comme l’indique le site du Center for Media and Democracy (CMD), une ONG américaine « qui mène des enquêtes approfondies et primées sur la corruption minant notre démocratie, notre environnement et notre prospérité économique » : « La revendication d’indépendance du FPRI ne doit pas être confondue avec l’impartialité ». Pour preuve, le CMD cite un discours que Daniel Pipes, membre du FPRI, a prononcé à la Heritage Foundation le 5 juin 1991. Celui-ci a déclaré : « En termes simples, nous avons toujours défendu une politique étrangère américaine militante ; nous avons partagé une méfiance constante à l’égard de l’Union soviétique et des autres États communistes ; et nous avons toujours maintenu un intérêt marqué pour la promotion de la démocratie, de la libre entreprise et de l’État de droit. Le plus controversé est peut-être que le personnel professionnel n’hésite pas à recourir à la force ; si nous avions été membres du Congrès en janvier 1991, nous aurions tous non seulement voté avec le président Bush et l’opération Tempête du désert, mais nous aurions aussi mené la charge ». (13)

 

D’autres signataires de la « Lettre ouverte » infamante qui appartiennent à des partis et organisations de la droite ultralibérale ou extrême sont :

– Damian Collins. Ce parlementaire britannique, membre du Parti conservateur, a été le responsable politique du groupe de réflexion Bow Group (14) qui « a fortement soutenu le président américain Donald Trump, le décrivant comme le président conservateur le plus important depuis Ronald Reagan. (15)

– Benedict Rogers. Il est vice-président de la Commission des droits de l’homme du Parti conservateur britannique et président de Hong Kong Watch (16) qui s’immisce dans les affaires de l’ancienne colonie retournée sous souveraineté chinoise. Il s’est par ailleurs joint à la baronne Caroline Cox pour publier un livre intitulé Même les pierres crient : L’Église persécutée – Douleur, passion et louange. La baronne est connue pour être « un personnage clé de la Nouvelle Droite associée à Margaret Thatcher, Keith Joseph et Enoch Powell. » (17)

– Solomon Yue. Il est le PDG des républicains (américains) d’outre-mer et membre du comité national républicain de l’Oregon

– Kyle Olbert des Citizens of the American Republic. Il s’agit d’une organisation extrémiste fondée par l’ancien stratège en chef de la Maison Blanche, le sulfureux Steve Bannon. (18) Par ailleurs, « Olbert a contribué au lancement du Mouvement d’éveil national du Turkistan oriental, une organisation basée à Washington, D.C. ‘Lentement mais sûrement, les gens prennent conscience du fait que la Chine est le nouvel empire du mal’, a déclaré Olbert. ‘Les États-Unis font preuve de leadership sur cette question.’ » (19)

Le Stratège en Chef de la Maison blanche Steve Bannon à la Conservative Political Action Conference (CPAC) le 24 février 2017 (Source : flickr, auteur : Michael Vadon)
Le Stratège en Chef de la Maison blanche Steve Bannon à la Conservative Political Action Conference (CPAC) le 24 février 2017 (Source : flickr, auteur : Michael Vadon)

Le fait de trouver les noms de séparatistes ouïghour (Dolkun Isa, Rahima Mahmut du World Uyghur Congress) sous la Lettre ouverte n’a donc rien d’étonnant, pas plus que la signature de Norman Baker, président de la Tibet Society britannique, et de Kevin Carrico, le traducteur américain de l’activiste tibétaine Tsering Woeser.

 

Les défenseurs de la « liberté » au service de l’OTAN et du Pentagone

Certains signataires appartiennent à plus d’une organisation ou think tank de droite ou d’extrême-droite, ce qui indique qu’on est en présence d’un réseau de personnes qui, tout en opérant sous des étendards divers, se connaissent et poursuivent les mêmes buts. Charles Burton du Macdonald-Laurier Institute, par exemple, est aussi membre du European Values Center for Security Policy, une organisation qui se félicite sur sa page web que son « travail a été récompensé par le président du Comité militaire de l’OTAN ». (20)

Les « valeurs européennes » que ce « centre » défend sont en fait les « valeurs » de l’OTAN, et celles-ci n’incluent pas nécessairement le droit à l’information et la liberté de parole. Au contraire, le « centre » en question est le fruit de la volonté de l’OTAN de « protéger » les Européens des informations venant de sources non-atlantistes. Ainsi, il demande d’exclure les médias russes comme RT des conférences de presse en Europe. Et il « est sorti de l’ombre pour la première fois en 2017, lorsqu’il a établi une liste noire (truffée d’erreurs) de 2 327 ‘idiots utiles’ qui étaient apparus sur RT, dans le but d’intimider les autres. » (21) Le monstre du maccarthysme ressuscité en Europe, en plein 21e siècle…

Plusieurs signataires, pour la plupart originaires des anciennes républiques soviétiques ou d’États de l’ancien bloc de l’Est, ont des relations particulièrement étroites avec l’OTAN et ses activités contre la Russie, ou directement avec le Pentagone, comme c’est le cas du lieutenant-colonel (retraité) Mark Stokes qui « est le directeur exécutif de l’institut Project 2049. » Ce vétéran de l’armée de l’air US a, entre autres, « occupé des postes dans le domaine du renseignement ». (22)

Parmi les signataires venant des nouveaux États de l’OTAN particulièrement hostiles à la Russie, il y a Tinatin Khidasheli, une ancienne Ministre de la défense géorgienne qui, pendant son mandat, « a recherché une coopération étroite avec l’OTAN et les États-Unis ». (23) Le nom du signataire géorgien Giorgi Moldini est suivi de la mention « Stratcom Georgia ». La Lithuanienne Rasa Juknevičienė a été Présidente de l’Assemblée parlementaire de l’OTAN. La Polonaise Anna Fotyga, membre du Parlement Européen, a en tant que Ministre des Affaires étrangères polonaise « poursuivi une politique d’alignement étroit avec les États-Unis », et sa « position sur les affaires étrangères est conforme à la position politique du PiS », le parti national-catholique « classé à droite ou à l’extrême droite de l’échiquier politique ». (24) En 2016, elle « a proposé une résolution (…) qui préconise notamment de censurer les médias russes, tels que RT et Spoutnik. La proposition a fait l’objet de critiques de la part de la Fédération européenne des journalistes ». (25)

Enfin, mentionnons l’Ukrainienne Halyna Coynash, encore une « défenseuse » (ou plutôt une défonceuse ?) des « droits de l’homme », puisqu’elle appartient au Kharkiv Human Rights Group. Sur YouTube, elle prend la défense des incendiaires et meurtriers du massacre de la Maison syndicale d’Odessa. (26)

 

 

Les « droits humains » à la Netanyahu

Une chose qui pourrait étonner, mais pas trop, ce sont les nombreux signataires appartenant au lobby israélien ou aux milieux sionistes religieux.

On retrouve, par exemple,

– Irwin Cotler, un ancien ministre de la justice et procureur général du Canada. La Lettre ouverte mentionne sa qualité de « Président du Centre Raoul pour les droits de l’homme ». Pas de n’importe quels hommes, apparemment ! Selon un article du Jerusalem Post intitulé « Irwin Cotler: The human rights defender », il est « l’un des plus ardents défenseurs d’Israël dans le monde ». (27) Étrange activité pour un prétendu défenseur des droits humains, puisque l’Etat sioniste viole constamment les droits des Palestiniens, appliquant, par exemple, la « Sippenhaft » (28) à l’égard des familles de jeunes résistants, emprisonnant sans jugement des centaines d’enfants palestiniens, perpétrant d’innombrables actes d’agression et meurtres politiques, estropiant délibérément d’innombrables jeunes lors de sa répression de la seconde intifada et des manifestations à Gaza, etc.

– Judith Abitan, encore un défenseur (une défenseuse ?) des « droits de l’homme » à l’américaine en tant que directrice du Raoul Wallenberg Centre for Human Rights. Elle a été justement « la chef de cabinet de l’honorable Irwin Cotler. » En 2013 et 2014, elle a de plus « occupé le poste d’auxiliaire juridique étrangère du président et juge en chef de la Cour suprême d’Israël. » (29)

 

Le garçon Palestinien Faris Odeh (qui a ensuite été tué par les forces d’occupation) jette une pierre sur un blindé israélien pendant la 2e intifada (Source : flickr)
Le garçon Palestinien Faris Odeh (qui a ensuite été tué par les forces d’occupation) jette une pierre sur un blindé israélien pendant la 2e intifada (Source : flickr)

– Le parlementaire australien Michael Danby « s’est fréquemment exprimé en faveur d’Israël ». Il doit être un parfait « démocrate », puisque « pendant son mandat au Parlement, il a été membre du comité directeur du Mouvement mondial pour la démocratie qui est (encore !) une émanation du sinistre New Endowment for Democracy. (30) N’empêche qu’il a une conception très particulière, sélective, de la liberté de parole et d’opinion : En 2005, il « a critiqué un livre d’un journaliste juif athée de Sydney, Antony Loewenstein, sur la communauté juive australienne et ses attitudes face au conflit israélo-palestinien. Dans une lettre adressée à l‘Australian Jewish News, Danby a demandé à l’éditeur du livre, Melbourne University Press, ‘d’abandonner tout ce projet dégoûtant’. Il a également appelé la communauté juive à boycotter le livre. » (31) Par contre, en 2009, il a aidé à organiser la visite de Rebiya Kadeer, une leader séparatiste ouïghoure, en Australie.

– L’universitaire israélien Michal Zelcer-Lavid enseigne à l’université Bar-Ilan. Il s’agit d’une université israélienne religieuse orthodoxe dont les racines se trouvent aux États-Unis. On l’a accusée d’être devenue « un foyer de l’extrémisme politique » après l’assassinat de Yitzhak Rabin par un étudiant de Bar-Ilan, Yigal Amir. (32)

– Le Néerlandais Bastiaan Belder est un des principaux lobbyistes d’Israël au sein du Parlement Européen et un sioniste chrétien à l’image de l’extrême-droite évangéliste américaine. (33)

– Le parlementaire européen Bert-Jan Ruissen lui aussi se déclare « un ardent partisan de (…) meilleures relations avec Israël ». Les positions réactionnaires de ces deux tristes personnages ne se limitent d’ailleurs pas au soutien de la politique de colonisation israélienne, puisqu’ils sont tous les deux des fondamentalistes chrétiens néerlandais. Ruissen, par exemple, « estime que les principes bibliques sont bénéfiques pour la société dans son ensemble » (34); il « a voté contre la résolution visant à dénoncer les zones libres d’idéologie LGBT en Pologne, car la résolution demandait aux États membres de l’UE de reconnaître le mariage entre personnes du même sexe. » En 2019, « Ruissen était l’un des membres du Parlement européen en visite à Taïwan, exprimant son soutien. » (35)

– Enfin, n’oublions pas de mentionner Adrian Zenz, un évangéliste allemand qui a bâti sa renommée d’ « expert » de la Chine sur ses accusations de « violations des droits de l’homme » dont seraient victimes les Ouïghours. Zenz est membre de la Victims of Communism Memorial Foundation fondée en 1993 par les combattants de la guerre froide Lev Dobriansky, Lee Ewards, Grover Norquist et Zbignew Brzezinski. Comme le souligne un article du quotidien allemand Junge Welt, son « président Lee Edwards était membre du ‘Comité pour une Chine libre’ de Chiang Kai-shek et fondateur de la section américaine de la ‘Ligue anticommuniste mondiale’, une organisation internationale d’extrême droite – également initiée par Chiang Kai-shek – qui comprenait des personnalités ‘illustres’ comme Otto Skorzeny (Waffen-SS, organisation des anciens membres SS), Ante Pavelić (Ustasha de Croatie) et plusieurs chefs des escadrons latino-américains de la mort. » (36)

 

Les sectes et leurs lobbyistes

On voit comment se mêlent, dans le cas de nombreux signataires, fanatisme, intégrisme et fondamentalisme religieux, état d’esprit réactionnaire, caractère autoritaire, anticommunisme primaire et allégeance à l’Empire US et à ses dirigeants les plus agressifs, les plus belliqueux. Un personnage comme l’Italien Massimo Introvigne incarne cet ensemble de positions et de tendances de façon exemplaire.

Introvigne, qui est présenté généralement comme un « sociologue des religions », dirige le « Centre pour l’étude des nouvelles religions (CESNUR) » de Turin qui est en fait une organisation de défense des sectes. Il est critiqué « en Europe par les partisans de la lutte contre les sectes, lutte que le CESNUR considère à son tour comme dangereuse pour la liberté religieuse », note la Wikipédia française en ajoutant que l’organisation, enregistrée à Bruxelles « en tant que lobby », est généralement considérée par les spécialistes des sectes « comme un mouvement d’influence et un paravent ». Introvigne est intervenu à différentes reprises pour défendre des sectes comme l’« Église de Scientologie » ou l’ « Armée de Marie ». (37)

Un manifestant anonyme contre l’Église de scientologie en mars 2008 (source : Wikimedia commons, auteur : Shane Pope, Dallas)
Un manifestant anonyme contre l’Église de scientologie en mars 2008(source : Wikimedia commons, auteur : Shane Pope, Dallas)

Introvigne a été l’un des dirigeants d’ « Alleanza Cattolica », une organisation catholique intégriste militante proche de Berlusconi et des néofascistes italiens de Gianfranco Fini (d’« Alleanza Nazionale ») qui a manifesté, dans les années 1970, sous des slogans comme « Dieu libère l’Église de l’infiltration marxiste » ou « Pour une chrétienté trahie par la diplomatie du Vatican » (38) et qui partage l’idéologie traditionnaliste d’un Plinio Corrêa de Oliveira ou d’un Marcel Lefebvre. (39)

Introvigne œuvre depuis longtemps à établir des contacts et une collaboration plus étroite entre la droite catholique européenne et les évangélistes américains fondamentalistes qui sont au cœur de la nouvelle droite de Steve Bannon et consorts. Et sa cible déclarée, c’est la Chine : il est fondateur et directeur du magazine en ligne Bitter Winter qui se focalise sur la prétendue persécution religieuse en Chine.

Une persécution qui, d’après le Français Thierry Valle, est aussi un problème majeur en France. Le « président » de la « Coordination des Associations et des Particuliers pour la Liberté de Conscience » qui défend « les minorités de conviction contre les chasseurs de sectes », porte en effet une accusation grave contre la France où, selon lui, « sévit une chasse aux sorcières (…) contre les groupes de recherche spirituelle et de développement personnel, les médecines et psychothérapies alternatives, les nouveaux mouvements religieux… » (40)

Dans ce contexte, on comprend bien que des sectes extrémistes comme l’« Église de l’Unification » (ou « Association de l’Esprit Saint pour l’Unification du christianisme mondial ») de Sun Myung Moon ou le sinistre Falun Gong ont leur rôle à jouer et que, par exemple, le nom d’Enrique Miguel Sanchez Motos, « l’un des principaux leaders du mouvement Moon en Espagne » (41) figure sur la liste des signataires. On a préféré le présenter comme « Président de l’Association pour la défense de la liberté de conscience ».

Il en va de même pour le signataire autrichien Peter Zoehrer qui se cache sous une ONG au nom de FOREF Europe (le « Forum pour la Liberté religieuse, Europe »), mais qui n’est autre que le dirigeant de la secte Moon en Autriche (42), et pour Manyan Ng, signataire au nom d’une « Société internationale pour les droits de l’homme », mais qui est en fait le responsable de l’édition allemande du Epoch Times, le journal en ligne du Falun Gong. Le Epoch Times s’est fait remarquer, outre par sa propagande antichinoise, par ses sympathies pour l’extrême droite xénophobe allemande, ce qui n’a pas échappé à la Wikipédia allemande qui constate qu’il « offre un espace important aux ressentiments xénophobes et aux positions de l’Alternative pour l’Allemagne ». (43)

Pour conclure, au vu des activités, des convictions et des antécédents de tout ce beau monde, on peut se demander si les universitaires qui n’ont eu aucun scrupule à s’associer à lui (des chercheuses et chercheurs comme Valérie Niquet, Vanessa Frangville ou Thierry Kellner) ne risquent pas de perdre une bonne partie de leur crédibilité en tant que scientifiques. Ils le mériteraient. Mais malheureusement, le monde n’est pas fait comme ça, et de tout temps hurler avec les loups a plutôt favorisé la carrière.

 

Source: Tibet.doc

 

Notes:

1) A propos du titre de l’article. « Les Juifs sont notre malheur ! » (« Die Juden sind unser Unglück ! ») a été le principal slogan de la propagande nazie qui a trouvé ainsi le bouc émissaire idéal (vu l’antisémitisme latent dans une large partie de la population) sur qui rejeter la responsabilité de tous les maux et problèmes de l’Allemagne.

2) https://www.demdigest.org/ccp-rule-by-fear-endangers-chinese-citizens-and-the-world/ Il s’agit du site du NED. – Les sources en langue étrangère ont été traduites à l’aide de www.DeepL.com/Translator

3) “Open letter: The Communist Party’s rule by fear endangers Chinese citizens – and the world” https://www.citizenpowerforchina.org/?p=230446

4) https://www.nytimes.com/interactive/2020/us/coronavirus-us-cases.html

5) https://www.alternet.org/2020/04/a-failed-state-column-slams-trumps-dysfunctional-administration-for-being-too-corrupt-or-stupid-to-head-off-mass-suffering/?utm_source=&utm_medium=email&utm_campaign=4347

6) https://www.theguardian.com/us-news/2020/apr/14/trump-coronavirus-alerts-disinformation-timeline

7) https://www.nytimes.com/interactive/2020/us/coronavirus-us-cases.html Updated April 17, 2020, 12:23 A.M. E.T.

8) https://www.demdigest.org/ccp-rule-by-fear-endangers-chinese-citizens-and-the-world/

9) https://www.corporatemapping.ca/profiles/macdonald-laurier-institute/

10) https://fr.wikipedia.org/wiki/Activit%C3%A9s_politiques_des_fr%C3%A8res_Koch

11) https://en.wikipedia.org/wiki/Henry_Jackson_Society

12) https://www.fpri.org/contributor/stephen-blank/

13) https://www.sourcewatch.org/index.php/Foreign_Policy_Research_Institute

14) https://en.wikipedia.org/wiki/Damian_Collins

15) https://en.wikipedia.org/wiki/Bow_Group

16) https://en.wikipedia.org/wiki/Benedict_Rogers

17) https://en.wikipedia.org/wiki/Caroline_Cox,_Baroness_Cox

18) https://citizensoftheamericanrepublic.org/

19) https://www.vaildaily.com/news/man-with-vail-valley-ties-helps-launch-organization-to-help-uighurs-and-others-imprisoned-in-china/

20) https://www.kremlinwatch.eu/#about-us

21) https://www.rt.com/news/476052-european-values-russia-censorship/

22) https://project2049.net/people/

23) https://en.wikipedia.org/wiki/Tina_Khidasheli

24) https://fr.wikipedia.org/wiki/Droit_et_justice

25) https://en.wikipedia.org/wiki/Anna_Fotyga#Political_positions

26) “There is no evidence of who caused the (Odesa) fire’ on May 2, 2014” https://www.youtube.com/watch?v=0at6SboaM88 Au sujet des évènements, lire l’article sous https://arretsurinfo.ch/odessa-2-mai-2014-un-massacre-occulte/

27) https://www.jpost.com/opinion/the-human-rights-defender-irwin-cotler-577836

28) La Sippenhaft ou Sippenhaftung est un « terme allemand, traduit en français par “responsabilité du clan” ou “de la parenté” … Originaire du Moyen Âge germanique, cette pratique réapparaît dans le corpus légal dans l’Allemagne nazie. Dans ce contexte, les proches des auteurs de crimes contre l’État étaient tenus pour responsables à égalité et pouvaient être arrêtés, voire exécutés. » https://fr.wikipedia.org/wiki/Sippenhaft

29) https://www.raoulwallenbergcentre.org/judith-abitan-fr

30) https://en.wikipedia.org/wiki/World_Movement_for_Democracy

31) https://en.wikipedia.org/wiki/Michael_Danby#Jewish_representation

32) https://en.wikipedia.org/wiki/Bar-Ilan_University

33) Elvira King, “The Pro-Israel Lobby in Europe: The Politics of Religion and Christian Zionism in the European Union”, I. B. Tauris

34) https://ecpm.info/campaign/candidate-bert-jan-ruissen.html

35) https://en.wikipedia.org/wiki/Bert-Jan_Ruissen

36) Jens Berger, « Infox au moyen d’un ‘expert de la Chine’ douteux », Junge Welt du 25/11/2019

37) Introvigne a affirmé « par exemple que, si certains mouvements catholiques pouvaient faire l’objet de déviances, l’Armée de Marie n’était absolument pas concernée et était en accord total avec la doctrine catholique. https://fr.wikipedia.org/wiki/Centre_pour_l%27%C3%A9tude_des_nouvelles_religions Entre-temps cette secte, dont les adeptes ont été excommuniés par l’Église catholique, a alloué à sa fondatrice, Marie-Paule Giguère, « le titre de Souveraine de la Terre » et elle affirme que « Jésus n’est plus seul aujourd’hui dans l’Eucharistie, Marie-Paule y est avec Lui. » https://fr.wikipedia.org/wiki/Arm%C3%A9e_de_Marie)

38) « Una manifestazione organizzata da Alleanza Cattolica » http://www.kelebekler.com/cesnur/txt/ac-it.htm

39) Lire à ce sujet: Miguel Martinez, « Alleanza Cattolica riconosce il proprio debito verso il ‘Dottor Plinio’ », http://www.kelebekler.com/cesnur/storia/it12.htmt – Plinio Corrêa de Oliveira a été le fondateur du mouvement catholique Tradition Famille Propriété et un important leader de la droite catholique.

40) http://www.coordiap.com/

41) https://elpais.com/diario/1988/06/18/espana/582588004_850215.html

42) https://de.wikipedia.org/wiki/Christian_Br%C3%BCnner

43) https://de.wikipedia.org/wiki/Epoch_Times#Webausgaben

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