L’Europe pousse les migrants sur des routes de plus en plus dangereuses

Il y a quelques mois, les corps de 44 migrants ont été retrouvés en plein désert du Sahara. Le moteur du camion dans lequel ils se dirigeaient vers la Libye est tombé en panne. Ils sont tous morts de soif. Avec l’augmentation des contrôles financés par l’Union européenne pour traquer les migrants, les trafiquants empruntent des voies de plus en plus risquées et font payer le prix fort à ceux qui fuient les guerres ou la misère.

 

Alors que des drames se déroulent quotidiennement en Méditerranée ou dans le Sahara, l’Union Européenne, elle, se félicite de la mise en œuvre de sa politique migratoire. En 2016, entre 120 000 et 150 000 Africains ont transité par le Niger dans leur longue et périlleuse route vers l’Europe, souvent via la Lybie et l’Italie. L’UE a donc décidé de tarir ces flux migratoires plus « en amont ». Pour cela, elle a virtuellement déplacé ses frontières au sud du désert du Sahara.

En poursuivant jusqu’au beau milieu de l’Afrique les migrants qui cherchent à gagner l’Europe, elle a, en six mois de temps, divisé par sept le nombre de migrants empruntant la route balisée et sécurisée menant du Niger à la Lybie. Ils étaient 32 000 à la parcourir en septembre 2016, il y en avait moins de 5 000 en avril de cette année.

« Plutôt qu’une réduction du nombre de migrants, il semble plus probable que nombre d’entre eux fassent le choix d’emprunter les routes les plus dangereuses, avec toutes les conséquences possibles que cela implique », témoigne Soumaila Maiga Ibrahim, coordinateur des projets de Médecins du Monde au Niger.

 

L’UE paie pour empêcher les migrants de venir

 

Comble du cynisme, l’Union européenne met sur le compte de l’aide au développement les mesures qu’elle met en œuvre pour réduire les flux migratoires. Elle a en effet mis sur pied un fonds spécial de 2,8 milliards pour s’attaquer au problème de la migration. Mais, selon 11.11.11, 2,4 milliards de ceux-ci ne sont dans les faits qu’une réaffectation de budgets normalement alloués à l’aide au développement.[2]

Par ailleurs, elle conditionne certaines tranches d’aide à la bonne mise en œuvre des politiques migratoires. Au Niger par exemple, le pays le plus pauvre du monde, ce sont 50 millions d’euros supplémentaires qui ont été annoncés au président Issoufou, si et seulement si ses promesses faites pour contenir la migration « irrégulière » sont tenues.

Plutôt que de s’attaquer aux causes profondes de la migration, l’Union européenne s’engage dans des politiques répressives aux conséquences meurtrières pour les migrants. Tout cet argent pourrait être dépensé autrement. Par exemple en mettant en œuvre des routes légales et sûres pour les migrants et en finançant des projets de développement qui permettent aux Africains de vivre décemment.

 

Notes :

1. « Après la Méditerranée, le désert au Niger se transforme à son tour en cimetière pour les migrants », Médecins du Monde, 6 juin 2017

2. Europees migratiebeleid in Sahel werkt niet, 11.11.11

 

Source:  mensuel Solidaire de septembre 2017.

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