Deux ou trois points sur les “i” de la Révolution bolivarienne

Il est de moins en moins probable que la gauche occidentale fasse ce qu’elle aurait dû faire il y a quarante ans : démocratiser la propriété des médias, libérer les « écoles » de journalisme du formatage par le marché pour les mettre au service des citoyens, soutenir concrètement le pluralisme des voix médiatiques et en particulier celles des médias associatifs, rétablir le service public dans ses fonctions originales d’éducation populaire, ou encore (last but not least) penser les réseaux sociaux – et le numérique en général – aux antipodes du modèle dominant créé par les géants privés de la Silicon Valley. Elle fait des plans « com », pleure la censure de Twitter ou la croissance de l’extrême droite, voit en Biden une référence de gauche et n’ose plus parler du Venezuela que les médias ont naturalisé en repoussoir « dictatorial ». Mais elle ne voit pas le lien entre tous ces points et ne comprend pas qu’en se coupant du monde c’est sa propre existence qu’elle a mise en péril.

Au Venezuela, l’extrême droite qui a tenté plusieurs coups d’État et organisé des déstabilisations violentes (appuyées par les médias qui les ont relookées en « révoltes-démocratiques-écrasées-par-Maduro ») est depuis toujours soutenue, armée et financée par le narco-paramilitarisme d’Alvaro Uribe qui massacre le peuple colombien. Et tout ce que fait cette extrême droite au pouvoir en Colombie est un triste rappel de ce qu’auraient fait ses protégés de l’extrême droite vénézuélienne s’ils avaient pris le pouvoir à Caracas.

L’oligarchie coloniale du Venezuela : Leopoldo Lopez, Juan Guaido et Henrique Capriles, que les médias nous présentent comme « opposants démocrates », réunie avec ses mentors narco-paramilitaires colombiens, l’actuel président Ivan Duque et un autre criminel de guerre et contre l’Humanité, l’ex-président Alvaro Uribe.

 

L’affaiblissement de la base sociale de cette droite a fait que l’Occident a dû la substituer par le pouvoir médiatique et jouer à fond la carte « chilienne » du blocus, des sanctions et de la guerre économique, faisant fuir des milliers de vénézuélien(ne)s, pour provoquer le mécontentement social nécessaire au renversement du gouvernement élu. Rafael Correa défendant le candidat Andres Arauz face au déchaînement des médias, expliquait : «Ne vous laissez pas enfumer. Ils vous disent qu’il va faire de l’Équateur un deuxième Venezuela. Le Venezuela subit un blocus des USA et une économie de guerre. Si l’Équateur ne pouvait plus vendre son pétrole ou le Chili son cuivre, ils subiraient la même émigration». « La désinformation sur le Venezuela est impressionnante. On veut nous faire croire qu’il y a une dictature. Et que le modèle économique a échoué alors qu’il est soumis à un blocus ! »

Mais surtout : comment celui qui suit le Venezuela à travers les médias actuels pourrait-il comprendre (par exemple) que les député.e.s de la droite non-putchiste et chavistes ont depuis longtemps tourné la page du fake-président (fabriqué par les médias) Juan Guaido, et viennent d’élire le nouveau Conseil National Électoral pour organiser les prochains scrutins (municipales et régionales de 2021, possible référendum révocatoire, présidentielles, etc…) ?

Communiqué des partis d’opposition appuyant l’élection du nouveau Conseil National Électoral

 

Comment pourrait-il comprendre, autre exemple, ce dialogue noué le vendredi 7 mai 2021, en direct, sur une chaîne publique de télévision, entre le président Maduro et des travailleur(se)s de tout le pays ?

 » Dans certaines entreprises publiques, la classe ouvrière n’est pas écoutée par les patrons » a dénoncé Nerenys del Carmen Rodríguez, porte-parole du Conseil productif des travailleurs de Lácteos Los Andes : « Nous ne sommes pas écoutés alors que ce sont les travailleurs qui ont la connaissance de la production et que nous avons les liens avec les producteurs et les communes« . Nerenys a souligné que les conseils productifs des travailleurs de Lácteos Los Andes n’ont pas pu « obtenir quoi que ce soit parce qu’on ne nous écoute pas« . « Nous avons de nombreux projets pour lancer des sociétés de production à Lara et dans différents États du pays« .

« Qu’est-ce qui se passe à Lácteos Los Andes ? Pourquoi la classe ouvrière n’est-elle pas entendue ? » a répondu le chef de l’État, Nicolás Maduro, qui a ordonné une enquête dans les 48 heures sur ces irrégularités, ordonnant à son directeur de cabinet Jorge Márquez, de communiquer avec les travailleurs de Lácteos Los Andes pour qu’ils puissent lui envoyer toutes leurs plaintes, critiques et recommandations.

Le président vénézuélien a également ordonné de manière très claire qu’aucune représaille ne soit exercée contre Nerenys : « protégez-la, protégez-la bien. Il se trouve que dans notre entreprise publique, comme elle le dit, ils n’écoutent pas la classe ouvrière. Hé bien la classe ouvrière doit faire partie du conseil d’administration ». Il a rappelé la feuille de route du nouveau modèle de gestion à mettre en place pour que « dans toutes les entreprises soit nommés des conseils d’administration des travailleurs. Nous n’avons pas besoin d’en discuter beaucoup, ce que nous devons faire, c’est bien planifier et exécuter. C’est la ligne de travail donnée par Hugo Chávez, il y a 15 ans. Qui sont ces camarades qui arrivent à la tête de la présidence des entreprises et ignorent tout bonnement notre ligne politique, ouvrière, socialiste, pour assumer le pouvoir comme s’ils étaient capitalistes, ou pire que capitalistes, allons-nous accepter cela ? Pourquoi sommes-nous au pouvoir alors ? Pourquoi la révolution bolivarienne a-t-elle obtenu le pouvoir politique et a réussi à défendre la patrie face à l’impérialisme et à ses conspirations ? Il faut que les travailleurs du Conseil présidentiel soient intégrés dans les directions, qu’ils aient une voix et un vote, une majorité de participants dans les politiques productives de l’entreprise« .

Avant de conclure : « Personne ne peut dissimuler quoi que ce soit ». Nous avons besoin de la critique directe, claire, celle qui découvre tout ce qui ne va pas« .

Thierry Deronne, Caracas, le 8 mai 2021

 

Source: Venezuela Infos

 

 

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