De Nobel à Sakharov, un goût prononcé de pâté d’alouettes

Après avoir longtemps été, dans la plupart des cas, un instrument de l’anticommunisme et de l’antisoviétisme, le prix Nobel de la paix continue sur sa lancée en récompensant chaque année ou presque des opposants à la Russie, à la Chine ou à d’autres pays qui ne se soumettent pas à l’occident euro-atlantiste et à ses alliés, regroupés sous l’appellation prétentieuse de « communauté internationale ». 

Depuis 1988, le même rôle est joué, de manière encore plus spectaculaire, par le prix Sakharov, du nom d’un célèbre dissident soviétique adulé par la propagande occidentale pendant la guerre froide, prix que le Parlement européen a créé pour récompenser la défense des droits de l’homme. Un coup d’œil à la liste des lauréats permet de constater que ce prix est lui aussi décerné en respectant les proportions de la recette bien connue du pâté d’alouettes : un cheval pour les opposants aux adversaires de l’occident et une alouette pour les opposants aux régimes amis, dans l’espoir illusoire de donner une impression d’équilibre et d’objectivité. L’examen de cette liste permet en effet de constater qu’on y trouve à trois reprises des dissidents cubains (en 2002, 2005 et 2010), trois fois des dissidents chinois (en 1991, 1996 et 2008), trois fois des dissidents biélorusses (en 2004, 2006 et 2020), deux dissidents iraniens (en 2021) et bien sûr des dissidents soviétiques ou russes (en 1988, 2009 et 2021), sans oublier l’opposition vénézuélienne, pour l’ensemble de son œuvre (en 2017).

Pas de trace en revanche de Julian Assange, qui pourrit depuis des années dans les geôles britanniques au milieu de l’indifférence générale des droits-de-l’hommistes européens, ni même de Greta Thunberg, l’égérie de la lutte en faveur du climat. Mais apparemment, pour le parlement européen ni l’une ni l’autre n’ont quoi que ce soit à voir avec les droits de l’homme… Nelson Mandela a certes reçu le prix en 1988, lui qui avait été traité de « terroriste communiste » par les médias occidentaux 20 ans plus tôt, lorsqu’il était emprisonné par le régime sud-africain de l’apartheid, mais il s’est agi probablement d’une erreur de casting, ou plutôt d’une pitoyable tentative de récupération.  

Il est aussi permis de se demander pourquoi une institution de l’Union européenne a choisi de donner à son prix le nom d’un ressortissant d’un pays non-membre. Pourquoi ne pas avoir choisi plutôt un citoyen éminent de l’un de ses États membres ? Par exemple celui de l’Allemand Walter Hallstein, premier président de la Communauté européenne, qui en matière de droits de l’homme pouvait se vanter d’avoir été membre d’organisations nazies et proche d’Hitler, grand défenseur des « valeurs européennes » s’il en fut…  

Quant à Sakharov, manifestement plus doué en physique qu’en politique, il s’était fait remarquer en félicitant le général Pinochet lors du coup d’État de 1973 qui avait renversé et tué le président chilien Salvador Allende, démocratiquement élu. Pas étonnant dès lors qu’ait figuré parmi les candidats au Prix Sakharov de 2021 Jeanine Anez, ex « présidente » autoproclamée à la suite du coup d’État fomenté en Bolivie en 2019. Mais c’est finalement l’escroc et agent provocateur Navalny qui l’a emporté. Tout compte fait, le prix du parlement européen pour les droits de l’homme a probablement les lauréats qu’il mérite…

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