Changement climatique : Les mérites et les faiblesses du film d’Al Gore

La commission Nobel a récompensé Al Gore avec le prix Nobel de la Paix pour s’être engagé en permanence à mettre les changements climatiques à l’ordre du jour politique, entre autres, avec son film, An Inconvenient Truth (Une vérité qui dérange). Les avis de la gauche sont toutefois divisés quant à l’analyse que fait Al Gore

Al Gore ne surfe pas sur un phénomène de mode comme bien d’autres politiciens. Déjà dans les années 70 il avait essayé en vain d’attirer l’attention du Congrès américain sur la question du climat. En 1988, il en avait fait un de ses thèmes lors de sa campagne pour la présidence et, en tant que vice-président sous Clinton, en 1992, il était à la base d’un certain nombre de mesures visant à réduire le réchauffement climatique.

Al Gore croit en son affaire et il ne renonce jamais. Son indignation paraît sincère. Pour lui, il est « immoral de laisser continuer les choses (…) Outre un problème politique », la question du climat « est surtout un problème d’éthique. »

Le principal mérite de Al Gore est sans aucun doute d’avoir sensibilisé le grand public au changement climatique grâce à son film. Ainsi, il a indirectement mis la pression également sur le politique et les entreprises afin qu’ils prennent ce problème au sérieux et cherchent des solutions.

Dans Une vérité qui dérange, il apporte une grande quantité d’informations scientifiques de façon très didactique : la hausse de la température et la concentration des gaz à effet de serre, la fonte des glaciers et des glaces polaires, leurs conséquences : inondations, sécheresses, ouragans. Tout cela est exposé de façon claire et compréhensible.

Il dénonce également les campagnes de désinformation du lobby pétrolier et gazier, de l’American Petroleum Institute et de l’industrie automobile américaine. Il démasque les hommes de paille de l’industrie pétrolière désignés par G.W. Bush à la tête de la politique de l’environnement.

Al Gore met les USA devant leurs responsabilités en tant que principaux pollueurs : 30 % des rejets mondiaux de gaz à effet de serre pour à peine 5 % de la population mondiale. Dans le film, il s’indigne : « notre pays pollue plus que l’Amérique du Sud, l’Afrique, le Moyen-Orient et l’Asie ensemble ! »

Contrairement à d’autres, il n’incrimine pas les pays en plein développement comme la Chine et l’Inde. Au contraire, il dit, presque admiratif : « Chaque fois que je les vois, je tire bien des enseignements des experts chinois. Ce sont des pionniers. Cette question est aussi brûlante pour la Chine que pour les USA. »

Les points faibles de Gore

Pour Al Gore, les raisons de « la collision de notre civilisation avec la terre » sont l’accroissement démographique, l’évolution technique allant de pair avec les « vieilles habitudes et façons de penser », qui ne comprennent pas le danger.

Pour lui, chaque humain est responsable du changement climatique. Nulle part dans le film, il n’est dit qui sont les pires pollueurs, c’est-à-dire les producteurs d’électricité et les grandes entreprises.

Aussi, voit-il surtout des solutions sur le plan individuel. Dans sa vision très libérale, le monde pourra changer quand tous les individus prendront « leurs responsabilités », car chaque individu a le pouvoir de déclencher les changements nécessaires. « Êtes-vous disposé à changer de façon de vivre ? », demande-t-il à la fin du film.

Mais qui décide de la production ? Un producteur peut-il continuer à produire impunément des choses non efficientes sur le plan énergétique ? Peut-il demander des prix élevés et obtenir des éco-bénéfices supplémentaires en produisant, par exemple, des lampes économiques de sorte que bien des consommateurs « préfèrent » malgré tout acheter des ampoules meilleur marché ?

Il s’agit en premier lieu d’un problème social. L’État doit forcer les producteurs à ne produire que des choses énergétiquement efficientes et à un prix le plus bas possible. « Nous disposons déjà du savoir nécessaire pour résoudre ce problème », dit Gore. Mais il n’explique pas pourquoi ce savoir n’est pas utilisé : parce que, pour les producteurs privés, le profit passe avant tout.

Gore constate que les critères chinois concernant les voitures sont plus sévères qu’au USA, ce qui est un obstacle aux exportations américaines vers la Chine. « Les marques à succès sont celles qui fabriquent des voitures peu consommatrices, comme Toyota. Chez nous, la situation n’est pas bonne », dit-il amèrement. Al Gore réfléchit en fonction de la compétitivité des entreprises US, tout comme les dirigeants européens se préoccupent de la compétitivité européenne.

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