Afrique du Sud : manifestations contre la répression de l’État

Le plus grand mouvement social d’Afrique du Sud organisait ce lundi 8 octobre des manifestations pour dénoncer l’agression brutale de l’État qui a entraîné l’assassinat de ses membres et dirigeants et la persécution de douzaines d’entre eux. Pendant ce temps-là, silence radio dans toute la presse sur internet…

 

Des membres et des alliés de Abahlali baseMjondolo, le mouvement des habitants des bidonvilles d’Afrique du Sud, marcheront contre la répression le lundi 8 octobre. Abahlali, qui compte plus de 50 000 membres, est le plus grand mouvement social d’Afrique du Sud, et depuis sa fondation en 2005, il a fait l’objet d’une grave répression, ses membres et ses dirigeants ont été tués, menacés ou incarcérés. Les occupations de terres du mouvement ont aussi été violemment expulsées.

La répression contre le mouvement a connu une forte augmentation l‘an dernier. Le 22 mai 2018, S’fiso Ngcobo, un président local du mouvement, a été assassiné à iKukhayeni, à Marianhill près de Durban. Son assassinat a eu lieu trois jours après la tenue d’un meeting de masse très fréquenté organisé par la section de iKukhanyeni.

Depuis début juillet, Abahlali dénonce les graves menaces contre la vie du président du mouvement, S’bu Zikode, proférées par des hauts fonctionnaires, dont le maire de Durban et le whip en chef [le député chargé de veiller à ce que les élus votent en fonction des consignes du parti, NdT] du Conseil de iThekwini.

Les menaces ont atteint un tel niveau que le 20 août, Zikode a été forcé d’entrer dans la clandestinité. Abahlali a annoncé dans un communiqué de presse : « Nous avons reçu des informations de différentes sources crédibles, y compris de l’ANC et de la police, selon lesquelles S’bu Zikode est en danger d’assassinat imminent. Une fois de plus, il a dû se cacher. Depuis quelque temps déjà, il se trouve dans un endroit secret, loin de tous les téléphones cellulaires et sans contact avec sa famille. Nous avons également mis en place les mesures de sécurité les plus rigoureuses possibles pour protéger d’autres personnes menacées, mais beaucoup de gens, y compris ceux qui ont apposé leur nom sur l’une de nos déclarations, continuent de courir un risque sérieux. »

Les menaces et les attaques contre des individus ont été accompagnées d’une campagne plus générale d’attaques et de menaces contre les occupations de terres par Abahlali, de calomnies dans les médias, traitant les membres du mouvement de vandales et appelant à la répression de l’État contre leurs protestations et leurs manifestations.

Dans une déclaration publiée au sujet de la marche, Abahlali indique très clairement d’où viennent les attaques : « Cette répression vient d’une source très claire : l’ANC. L’Unité de lutte contre l’invasion des terres et la police font partie de l’État contrôlé par l’ANC… La répression que nous avons subie et que nous continuons à subir exerce d’énormes pressions sur notre mouvement, et sur les familles et les individus. L’ANC a exploité le fait que nous sommes contraints de parer au plus pressé pour essayer d’infiltrer notre mouvement. Ils n’ont pas réussi. Les pratiques démocratiques ouvertes et notamment les assemblées accessibles à tous dans lesquelles chacun peut parler librement sont notre meilleure défense contre l’infiltration. L’ANC de Durban agit comme une mafia. Il n’y a pas de distinction entre la criminalité et la politique. Le reste du pays doit le comprendre clairement et y faire face directement. »

Le syndicat national de la métallurgie (NUMSA) a annoncé qu’il manifestera en solidarité avec Abahlali baseMjondolo à Durban : « Nous sommes solidaires du mouvement des sans-terre et de leur lutte pour la terre et la dignité de la classe ouvrière et des pauvres d’Afrique du Sud. Nous condamnons le gouvernement de l’ANC et toutes les forces non progressistes qui s’emploient activement à réduire au silence la voix authentique de la classe ouvrière et des pauvres dans notre pays par la violence et l’oppression… NUMSA manifestera solidairement pour revendiquer la fin de la répression et de la violence soutenues par l’État contre ce mouvement et toutes les organisations progressistes de la classe ouvrière. Nous exigeons le droit à la liberté d’association et le droit de nous organiser librement. Nous exigeons que tous les assassinats politiques des membres du mouvement fassent l’objet d’enquêtes en bonne et due forme. Nous exigeons que toutes les menaces de mort proférées par les fonctionnaires de iThekwini, y compris le maire, fassent l’objet d’une enquête et que les responsables soient arrêtés », a déclaré le NUMSA.

Des manifestations de solidarité ont également eu lieu au Cap, à Johannesburg et à New York.

 

Photo: Manifestation de Abahlali baseMjondolo, 8 octobre

Traduit de l’anglais par Diane Gilliard pour Investig’Action

Source : People Dispatch

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