Un prisonnier sur quatre dans le monde est dans une prison US

Selon le Centre International d'Études sur les Prisons, dans le

monde il y a 9 millions de personnes condamnées pour des délits de

tous types. Mais 2.200.000 d'entre elles se trouvent incarcérées aux

USA. Cette donnée fait du voisin du Nord la nation avec la population

carcérale la plus importante du monde (5% de la population

mondiale mais 24% de la population carcérale).

23 mai 2007

Le pays qui se pose comme le paladin de la liberté est en même

temps le champion de la population carcérale. Aux USA, pour

100.000 habitants il y a 730 prisonniers. Les pays qui suivent sont la

Biélorussie et la Russie (avec 532 détenus pour 100.000 habitants).

Le nombre de prisonniers augmente dans une bonne mesure parce

que le système policier a augmenté (ce qui accroît la probabilité

d'attraper les délinquants) et parce que la législation a pratiquement

abandonné l'éthique de la réhabilitation pour préférer celle du

châtiment. Aujourd'hui les peines sont plus sévères et la probabilité

qu'elles soient réduites est moindre. Spécialement drastique est la

règle dite des trois strikes (trois coups): un délinquant qui a commis

trois délits est condamné à des peines très lourdes. Finalement, le

combat contre la drogue a conduit à l'arrestation d'un grand nombre

de personnes: 60% des détenus des prisons fédérales ont commis

des délits en relation avec les drogues.

L'inégalité raciale et économique qui caractérise la société des USA

se reflète dans la population incarcérée : 48% des prisonniers sont

Afro-Usaméricains et 18% d'origine latino-américaine. Un Afro-Usaméricain a huit

fois plus de probabilités d'être en prison qu'un blanc. La possibilité

qu'un jeune en échec scolaire se retrouve en prison est trois fois

grande qu'il y a 20 ans; 60% de la population afro-usaméricaine de

35 ans qui a déserté l'école est en prison ou a été condamnée.

Évidemment, être derrière les barreaux est un fardeau très lourd

pour les familles des détenus.

Et il y a actuellement plus de 2.200.000 enfants dont les pères

purgent des peines de prison. Dans la population des jeunes blancs,

1% a ses parents en prison, alors que chez les jeunes noirs le

pourcentage est dix fois supérieur.

Il est indéniable que le système judiciaire usaméricain est

aujourd'hui plus lié à l'idée de punir. La violence des gardiens envers

les détenus fait partie de la vie quotidienne. L'ironie est que tout

cela se trouve lié au monde des affaires privées. C'est pourquoi le

système carcéral est décrit fréquemment comme le « complexe

carcéro-industriel » (par analogie avec le complexe militaro-industriel,

NdT). Des prisonniers enchaînés travaillant dans les champs en

Arkansas aux maquiladoras (usines d'assemblage dans les zones

frontalières avec le Mexique, NdT) à l'intérieur de nombreuses

prisons, l'emploi de cette force de travail captive génère plus de

30.000 millions de dollars aux USA (c'est plus que les recettes

générées par le base-ball des grandes ligues). Des entreprises

comme Lee, Boeing, Victoria's Secret, Eddie Bauer et d'autres

utilisent cette force de travail contre des salaires de misère.

Cela génère des incitations perverses pour continuer à remplir les

prisons de main d'oeuvre bon marché: le système des prisons est

une des industries qui croit le plus rapidement aux USA et beaucoup

de jeunes pauvres et sans perspectives cherchent du travail dans

les prisons. Avant 1983 il n'existait pas de prisons privées dans ce

pays. Il y en a aujourd'hui plus de 150. Elles sont la propriété

d'entreprises de tout type, parmi lesquelles se détachent la

Corrections Corporation of America et Wackenhut. Leurs bénéfices

sont réellement surprenants. Il en ressort que la tentative d'avoir

des prisons efficaces en matière de réhabilitation a échoué et qu'on

a choisi de les convertir à la logique de la rentabilité. Excellent

négoce privé, formidable échec social.

Le terme goulag est un acronyme de la Direction Générale des

Camps de Travail (forcé) du régime soviétique. Dans son Archipel du

Goulag, Alexandre Soljenitsyne analyse la rationalité d'une forme de

domination. De même que Foucault, Soljenitsyne non seulement écrit

l'histoire d'un régime punitif, mais il fait une analyse de la rationalité

de l'oppression. Les deux auteurs seraient d'accord pour considérer

qu'aujourd'hui aux USA on vit un nouveau chapitre de la raison

punitive.

Source: La Jornada

Traduit de l'espagnol par Gérard Jugant et révisé par Fausto Giudice,

membres de Tlaxcala, le réseau de traducteurs pour la diversité

linguistique.

http://www.tlaxcala.es/pp.asp?reference=2822&lg=fr

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