Le rapport général attise le débat@@ sur l’escalade en Afghanistan

?Le général Stanley McChrystal a soumis son rapport réclamant au moins 40 000 hommes de plus pour la guerre en Afghanistan, affirmant qu’ils étaient nécessaires à une « victoire » américaine. Le président Barack Obama a dit qu’il avait besoin de temps afin que l’administration puisse examiner sa stratégie en Afghanistan.
La bataille se déroule désormais au sein des cercles dirigeants américains et tourne autour du choix entre le retrait et un possible bourbier de style vietnamien qui pourrait traîner une décennie de plus avant de se terminer par une débâcle pour l’impérialisme.

Du côté de l’administration, du Congrès, du Pentagone et des médias traditionnels, les camps opposés révèlent leurs sérieuses différences tactiques. La question clé est de savoir s’ils veulent une escalade importante de l’occupation de l’Afghanistan par les États-Unis et l’Otan.

Il serait erroné de penser que, dans cette discussion,  un camp représente les colombes et l’autre les faucons, ou qu’un camp a résolument opté pour la paix et l’autre pour la guerre. Certains politiciens, sans doute, cherchent des avantages étroits ou sont inféodés à leurs usines d’armement locales. Mais, comme le prouvera un coup d’œil sur leurs antécédents, il y a des militaristes dans les deux camps du Congrès et de l’administration. Les deux camps ont fait campagne pour des guerres, dans le passé, et ce qui les divise surtout, aujourd’hui, c’est une évaluation tactique de ce à quoi les États-Unis sont confrontés en Afghanistan.

Toute discussion ou débat au sein de la classe dirigeante, et tout particulièrement quand il s’agit d’un débat acharné sur une question cruciale comme la guerre et la paix, ouvre la porte aux honnêtes forces pacifistes soucieuses de faire connaître la vérité au peuple américain. Quelle est la vérité, à propos de cette guerre ? Tout d’abord, les États-Unis n’ont nullement le droit de se trouver en Afghanistan. Ensuite, la guerre est une horrible calamité pour les Afghans, un fardeau pour la jeunesse américaine qu’on envoie là-bas et une meule au cou des travailleurs et des pauvres de notre pays, puisqu’on refile des milliards de dollars au complexe militaro-industriel qui les fait partir en fumée dans les montagnes de l’Asie centrale.

Des divergences au sommet

Les dirigeants du Parti républicain et les pisse-copie des médias les plus à droite, à de rares exceptions près, réclament un surcroît de troupes. Ce sont les mêmes forces qui attaquent Obama chaque fois qu’elles en ont l’occasion. Il ne fait aucun doute que si le président faisait marche arrière dans son soutien cordial à l’intervention en Afghanistan, ces gens l’accuseraient de la « perte » de l’Afghanistan – en d’autres termes, de l’« abandon » de  l’Afghanistan aux Afghans. 

Le chef d’état-major des armées des États-Unis, Mike Mullen, soutient la demande de renforts de McChrystal. Apparemment, le soutien à ce dernier est majoritaire, au Pentagone. Le secrétaire à la Défense, Robert Gates – au départ, un homme déjà choisi par George W. Bush – doit encore s’exprimer publiquement à propos de la requête du général, mais il a déclaré qu’il était ouvert à l’escalade et que le retrait n’était en aucun cas une option.

Toutefois, même parmi les gros bras de l’armée, on rencontre des dissidents. Le 27 septembre, le New York Times rapportait que le conseiller à la Sécurité nationale, le général James Jones, était opposé à l’escalade. Et on rapporte que l’ancien secrétaire d’État de Bush, Colin Powell – un général quatre étoiles retraité qui, en 1991, avait organisé la guerre contre l’Irak et avait menti à plusieurs reprises en vue de fournir un prétexte à l’invasion de 2003 –, a fait part de son scepticisme à Obama à propos de l’accroissement des effectifs.

Selon le même article du NYT, l’opinion est divisée, dans les hautes sphères de l’administration. La secrétaire d’État Hillary Clinton et l’ambassadeur spécial « Af-Pak » [pour Afghanistan & Pakistan, NdT], Richard Holbrooke, un acteur de tout premier plan dans l’agression contre la Yougoslavie dans les années 1990, sont partisans de l’escalade. Le vice-président Joe Biden – qui, au début de la guerre en Irak, insistait pour qu’on divisât le pays en trois parties – s’oppose aujourd’hui à un accroissement des effectifs en Afghanistan, craignant un « bourbier » et considérant bien plus importante une intervention américaine au Pakistan.

En présentant naguère l’Afghanistan comme la « guerre nécessaire » – en  contraste avec l’Irak –, Obama a restreint sa marge de manœuvre. Dans un éditorial, le belliqueux Washington Post a sauté sur l’affaire, blâmant Obama d’avoir des « secondes pensées » et citant abondamment ses précédentes déclarations plus que favorables à la guerre. Comme une bonne section du Parti démocratique est opposée à l’escalade en même temps que certains de ses conseillers les plus proches et la majorité de sa base populaire, Obama a reporté sa décision finale.

?La masse hostile à l’escalade

?Les travailleurs, les gens pauvres et opprimés n’ont aucun intérêt dans la poursuite de l’occupation de l’Afghanistan par l’armée américaine. Sans compter les cercles de la classe dirigeante, le dernier sondage USA-Today/Gallup, en septembre dernier, a montré que la moitié des gens et 60 % des démocrates étaient opposés à l’envoi de troupes supplémentaires.

Des nouvelles peu rassurantes d’Afghanistan, le 27 septembre, ne font qu’encourager cette opposition. Cette année, les militaires américains, britanniques et autres de l’Otan se font tuer en nombres encore jamais vus. Un important ministre afghan a failli être tué par une explosion. Quant au peuple afghan, un rapport des Nations unies a fait savoir que les pertes civiles associées à la guerre atteignaient le chiffre record de 1 500, rien que pour 2009, et ce n’est que la partie visible de l’iceberg. Ils sont bien plus nombreux à mourir de faim, de déplacements internes, ce qui se traduit par des morts d’enfants et de mères lors des accouchements, et bien d’autres situations létales. Au contraire de ce que prétend la propagande de l’Otan, l’occupation n’a amené qu’un surcroît de souffrances aux femmes afghanes.

La prochaine démarche, pour les gens des États-Unis et ceux des autres pays de l’Otan, consistera à exiger le retrait de l’Afghanistan. Au contraire des deux camps du Congrès et du gouvernement, les travailleurs et les chômeurs de toutes nationalités et des deux sexes ont tout intérêt à ce que cette guerre sanglante cesse et à ce que se tarisse aussi le torrent d’argent qui s’y engloutit.

Des manifestations auront lieu les 5, 7 et 17 octobre contre les guerres en Afghanistan et en Irak et elles exigeront que les troupes américaines soient ramenées au pays. Pendant que la classe dirigeante et les politiciens discutent de tactique, la véritable opposition à l’impérialisme américain s’exprimera dans la rue.

Texte envoyé par l’auteur, traduit par Jean-Marie Flémal et révisé par Sophie de Salée pour Investig’Action

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