Le président Bush 'souffre' pour le Darfour

"Ce qui brise le cœur de notre Président, l'homme le plus "puissant" dans l'histoire de l'humanité, est la tragédie du Darfour! Il a entendu que des Arabes massacraient des Noirs africains, la milice Janjawid arabe commet du "nettoyage ethnique", du "génocide", et des "viols" contre les Noirs."…

Si vous regardez le président George W Bush bien dans les yeux, comme j'ai l'habitude de le faire, vous verrez aisément qu'ils sont trop rouges et trop enflés. Notre homme pleure toute la nuit. Ces quatre dernières années, il n'a cessé de pleurer. Pour être précis, depuis le jour où a commencé la guerre au Darfour, région occidentale du Soudan. En fait, notre première Dame, Laura Bush en a marre de sécher les larmes de son mari.

Ce qui brise le cœur de notre Président, l'homme le plus "puissant" dans l'histoire de l'humanité, est la tragédie du Darfour! Il a entendu que des Arabes massacraient des Noirs africains, la milice Janjawid arabe commet du "nettoyage ethnique", du "génocide", et des "viols" contre les Noirs. Pour souligner la gravité de la situation et le degré de son inquiétude, le Président est même allé au Musée mémorial de l'Holocauste à Washington et menacé le gouvernement soudanais que s'il ne cesse pas immédiatement le carnage, il décréterait des sanctions supplémentaires.

Deux ans avant que le conflit se déclare, le président Bush avait exprimé son mécontentement vis-à-vis de la politique et de la conduite du gouvernement soudanais. Il avait exprimé le souhait que le régime de Khartoum change, comme cela a été fait pour Bagdad. Il veut que le Soudan devienne une oasis de liberté et de démocratie pour tout le continent noir – à l'iraquienne. Un million d'Iraquiens ont perdu leur vie et quatre millions sont devenus des réfugiés depuis le jour où sur un porte-avions il avait déclaré au monde: "Mission accomplie". La mortalité infantile en Iraq, plus basse que celle des USA, avant l'invasion de son père en 1991, est aujourd'hui la plus élevée au monde. Les Iraquiens manquent d'eau potable, leurs stations d'épuration d'eau sont détruites, ils n'ont pas plus que 2 ou 3 heures d'électricité par jour, et leur terres sont polluées par des tonnes et des tonnes d'uranium appauvri.

Fin avril, j'ai rejoint une délégation de 31 journalistes afro-américains en mission d'enquête au Soudan. Il y avait dans l'entourage Akbar Mohammad, écrivain, historien et fondateur de Youth 4 Africa (Jeunesse pour l'Afrique), organisateur du voyage; James Mtume, animateur de la radio KISS FM; la Alesia Powell productrice de TV One; Kenneth Carr, animateur de la Radio PFW et d'autres. J'ai eu l'opportunité de m'entretenir avec beaucoup de membres du gouvernement soudanais, à divers niveaux, national, étatique et local, y compris avec le président Oman Hassan Al Bashir, ainsi qu'avec des membres de l'opposition qui, il n'y avait pas si longtemps, portaient des armes contre le gouvernement central. Le Darfour est de la taille de la France et composé de trois États. J'en ai visité deux, celui du Nord et celui du Sud. J'ai parlé avec des Darfouriens et des déplacés intérieurs dans les camps, ainsi qu'avec des gens sur les marchés, des hommes, des femmes et des enfants.

Des membres de ma famille, quelques-uns de mes amis et des amis de mes amis, s'étaient trop inquiétés pour moi. Ils n'étaient pas du tout sûrs que je revienne vivant. Ils étaient alarmés par des informations sur la violence soudanaise, que les étasuniens étaient bombardés quotidiennement. Certains parmi eux, dans leurs lieux de culte respectifs, ont prié pour mon retour sain et sauf. Premièrement, je dois informer mon Président, très préoccupé par la sécurité et le bien-être de chacun de ses citoyens et notamment des étasuniens palestiniens, que je suis revenu chez moi, sain et sauf.

Après avoir observé les faits sur le terrain, et non pas le produit avec lequel les fabriques médiatiques étasuniennes nous abreuvent, il est de mon devoir le plus solennel de rapporter au Président, à son cabinet, au Congrès, aux mass-médias, ainsi qu'aux "défenseurs" de la cause du Darfour, les bonnes et les mauvaises nouvelles.

Les Nations Unies et les Médecins sans frontières, avaient raison tout le long. Il n'y a pas de génocide! Il n'y a pas de nettoyage ethnique! Il n'y a pas de viols! Nos politiciens et nos mass-médias semblent ne pas connaître la géographie? Ils semblent ne pas savoir lire une carte du monde. Le Darfour n'est pas en Iraq occupé. Ce n'est pas la Palestine occupée. Je me suis senti plus en sécurité au Darfour que dans les centres urbains des USA.

J'ai découvert l'évidence, ce que je savais déjà. Les citoyens soudanais du Darfour sont tous africains, tous noirs, tous musulmans sunnites, et ils parlent tous l'arabe la langue du Coran, le livre sacré de l'Islam. Mes compagnons afro-américains me demandaient souvent: "Où sont les Arabes?" Et moi j'ai insisté: "Où sont les Africains?"

Les Janjaied ne sont pas une milice armée et équipée par le gouvernement central. Ils n'appartiennent pas à une tribu ou ethnie spécifique. Ce sont des bandits, des hors-la-loi. L'armée et la police locale les condamnent sévèrement quand ils sont pris. Le phénomène janjawid a existé depuis des siècles dans ce vaste territoire, et les chefs tribaux ont su le traiter avec le système judiciaire traditionnel tribal. La situation s'est aggravée à cause des ingérences extérieures et la désertification causée par le réchauffement climatique.

Il est vrai qu'il y a une tragédie au Darfour. Approximativement 9.000 civils ont perdu leur vie. Il y a des réfugiés qui ont échappé à la violence. Il y a une rébellion et il y a des rebelles qui s'abritent dans les pays avoisinants. Il y a aussi des "chefs" de l'opposition qui refusent de signer les accords de paix d'Abuja, soutenus par l'Union africaine et qui attendent pour entrer au Darfour derrière les chars étasuniens. Les Darfouriens, jeunes et vieux, m'ont assuré que le Darfour deviendra un nouvel Iraq, leur terre sera un cimetière pour les envahisseurs.

Un vieil homme dans les 80 ans que j'ai rencontré dans un camp de déplacés, m'a souligné clairement que son peuple rejette les dons collectés en son nom par les organisations juives anti-musulmanes étasuniennes. Le American Jewish World Service (le Service mondial juif américain), une organisation qui finance la campagne "Sauvez le Darfour" a collecté approximativement 31 millions de dollars, 28 millions de ces fonds pour l'aide ont été canalisés vers les efforts du lobby juif. Cette organisation a clairement dit que son but était de créer une "présence" juive dans "l'humanitaire" mondial*.

J'ai informé le président Omar Hassan Al Bashir à propos des larmes qui sont versées quotidiennement par notre Président, par le Premier ministre Tony Blair et par le Premier ministre Ehud Olmert, pour le peuple du Darfour, ainsi que de leur désir de le voir partir.

Le Président soudanais m'a informé que l'année prochaine se tiendront au Soudan des élections présidentielles libres et que c'est le droit du peuple soudanais et non pas celui du Président des USA, de décider de ce choix.

En ce qui concerne le Darfour, M. Al Bashir insiste que ce sont les services secrets étrangers qui fomentent la rébellion et que le conflit s'arrêterait aussitôt que l'Occident, et particulièrement le gouvernement des USA cesseraient de financer, armer et soutenir les rebelles. Il a déclaré: "C'est mon devoir en tant que Président, conformément à notre constitution et au droit international, de préserver l'unité et la souveraineté du Soudan et d'apporter la paix et la sécurité au pays." Il comprend que l'affaire du Darfour est entre autres, un facteur essentiel dans la frauduleuse "Guerre contre l'Islam" et de l'arabophobie, et en même temps une tactique pour faire diversion par rapport aux atrocités perpétrées en Iraq, en Palestine, au Liban, en Afghanistan et en Somalie.

Monsieur Al Bashir était trop poli, il n'a rien dit concernant la nécessité de changer de régime à Washington. Les sondages montrent que deux tiers du peuple étasunien aimeraient bien voir le président Bush faire ses valises et partir tout de suite. Il n'a rien dit des mensonges de Monsieur Bush au Congrès, au peuple étasunien, et à la communauté internationale. L'Iraq ne possédait pas d'armes de destruction massive, pas de remorques mobiles d'armes chimiques et biologiques, pas plus que Saddam n'entretenait de liens avec Al Qaïda. Certainement, il n'a pas dit un mot concernant les mépris et l'indifférence du Président étasunien à l'égard de son peuple, qui veut voir le retour immédiat de ses fils et de ses filles d'Iraq et d'Afghanistan.

Le président Al Bashir se demandait pourquoi l'administration étasunienne ne manifestait pas sa préoccupation du sort d'un million d'Africains massacrés au Rwanda, ni de ceux qui sont tués au Congo, pas plus que pour les génocides perpétrés en Iraq et en Palestine, mais tout au moins pour les garçons et les filles qui rentrent journellement chez eux dans des boîtes, sous le couvert de la nuit? Le Président soudanais sourit. C'était un sourire triste et peiné!

Quand je lui ai demandé les vraies raisons de cette haine contre le Soudan, Monsieur Al Bashir a dit que le Soudan, le plus grand pays d'Afrique (2.5 millions de km²) est riche en pétrole, en uranium, en cuivre, en fer et en bien d'autres minerais. Sa terre est fertile, l'eau est abondante avec les fleuves du Nil blanc et du Nil bleu, ainsi que de la présence d'importantes nappes souterraines. La terre, avec une bonne infrastructure, peut devenir le grenier de l'Afrique et du monde arabe. Cela ne fournira pas seulement au continent noir une sécurité alimentaire mais épaulera aussi son indépendance politique et économique, à laquelle les USA, ouvertement et sournoisement, s'opposent. "Nous accueillerions volontiers une coopération dans divers domaines entre le Soudan et les USA, par exemple dans celui du pétrole, comme avec la Chine, la Malaisie et l' Inde" a-t-il souligné. Les USA sont un grand pays avec de grandes réalisations. Cependant nous insistons qu'il respectent notre souveraineté et notre indépendance."

Le peuple étasunien devrait savoir qu'en dépit des conflits internes provoqués par l'Occident, le gouvernement Al Bashir a fait de grandes avancées en matière d'agriculture, d'éducation, de santé, et d'autres services. La croissance économique nationale, que le régime précédent avait laissé dans le rouge, est maintenant à 11%. Le Soudan qui se rangeait au 95ème rang parmi les nations en voie de développement en 1989, est maintenant en 51ème position. Dans le passé, 80% du budget dépendait de l'aide étrangère. Le budget aujourd'hui dépend de ressources locales. Les terres agricoles sont passées de 6,4 millions à 24 millions d'hectares. Les exportations sont passées de $480 millions à $8.000 millions. Le nombre des université est passé de 7 à 37. Bien que Al Shefa, le site principal de fabrication pharmaceutique, ait été détruit par les missiles balistiques de l'ancien président Bill Clinton dans le but de détourner l'attention du scandale Monica Lewinski, le Soudan possède aujourd'hui 37 usines et satisfait 70% des besoins du pays. La destruction d'Al Shefa, dont j'ai inspecté les ruines, a été désastreuse pour l'Iraq. L'Iraq en dépendait pour les vaccins destinés à son cheptel. Certains médicaments produits au Soudan sont exportés dans d'autres pays africains.

Je comprends bien la raison pour laquelle M. Bush désire un changement de régime à Khartoum. Contrairement à la grande majorité des dirigeants arabes et musulmans qui font leur chemin de Washington à quatre pattes et qui jouissent ainsi de la bénédiction, de l'approbation et du soutien de Bush, le président Omar Hassan Al Bashir est différent. Il n'est certainement pas Hosni Moubarak d'Égypte.

Le dirigeant arabo-africain et les membres de son gouvernement sont connus pour être incorruptibles. Ils ne gaspillent pas les ressources de leur pays. Ils ne possèdent pas des comptes bancaires en Suisse avec l'argent volé aux pauvres. Ils n'acceptent pas de se faire graisser la patte par des gouvernements étrangers ou par des multinationales.

Malgré les sanctions économiques et les énormes pressions imposées au Soudan, M. Al Bashir refuse de se soumettre à la volonté et au diktat du gouvernement étasunien. Quand il est question de souveraineté et du bien-être du Soudan, M. Al Bashir refuse les compromis. Les Soudanais sont solidement derrière leur Président. L'Organisation de la Conférence Islamique, présidée par le Premier ministre malais, qui représente 55 nations musulmanes, vient de lui réaffirmer son soutien.

Traduit par Alexandre Moumbaris, révisé par Fausto Giudice

Source : http://www.uruknet.info/?p=m33069

Article original publié le 21 mai 2007

Sur l'auteur : Ali Bagdadi vit à Chicago ou il rédige L'Arab journal

Alexandre Moumbaris et Fausto Giudice sont membres de Tlaxcala, le réseau de traducteurs pour la diversité linguistique. Cette traduction est libre de reproduction, à condition d'en respecter l'intégrité et d'en mentionner l'auteur, le traducteur, le réviseur et la source.

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