La menace du marché transatlantique : non à l’américanisation du monde

Tout avait commencé avec le traité États-Unis/Canada (fin des années 80) qui s’est ensuite élargi au Mexique (Traité ALENA, début des années 1990). Maintenant c’est l’ensemble de l’Europe qui est visée. À son époque ALENA semblait être la réponse américaine au néolibéralisme grandissant du Traité de Maastricht, mais la vocation expansionniste, la voracité même du capitalisme financier américain semble ne pas avoir de limites.

 

 

 

À cela s’ajoute la crise systémique que connaît l’économie occidentale. Ainsi, avec le projet du marché transatlantique Washington, plus exactement Wall Street avec l’Union européenne comme supplétive (et dont, inutile de le dire, Berlin à la baguette), se propose de créer une vaste zone de libre-échange (elle deviendrait la plus grande au monde) qui regrouperait l'UE et les États-Unis, voire même l’espace couvert par l'ALENA (États-Unis, Canada, Mexi- que). À noter le rôle particulièrement actif dans la mise en marche de cette initiative du Commissaire belge au commerce, Karel De Gucht.


Ce projet est destiné à faire disparaître tout ce qui reste encore, en dépit des politiques européennes, de secteur public, des mesures de protection sociale et de sauvegarde de l’emploi, de protections environnementales, du respect des droits intellectuels, des droits de douane, des quotas d’importation, des normes d’accès aux marchés publics. Tout indique que, dans la fuite en avant qui, en particulier dans ces temps de crise, caractérise la gestion des politiques européennes, ce projet devrait prendre la forme d’un traité ce qui lui donnerait un caractère pratiquement irréversible puisque le Traité de Lisbonne sacralise toute initiative européenne touchant les matières commerciales, douanières et tarifaires.


Perspective particulièrement sombre puisque ce traité n’aura d’autre conséquence que de soumettre l’ensemble des politiques que les peuples européens ont forgé au cours de décennies de luttes, au droit américain le plus mercantiliste et régressif sur le plan social et environnemental. C’est ce qui a été démontré par la mise en œuvre du traité ALENA qui voit un pays comme le Mexique, naguère grand producteur du maïs et berceau de cette céréale, devoir maintenant l’importer dans une version génétiquement modifiée.


Pas vraiment de quoi s’étonner si l’on fait un peu d’effort pour chercher la paternité de l’idée transatlantique. Elle vient d’un lobby de politiciens groupés autour de la Transatlantic Policy Netword (TPN ; en français Réseau de politiques transatlantiques) et dont sont membres de puissantes entreprises comme la banque Citigroup, Coca-Cola, Nestlé, Microsoft, Time Warner, Unilever, Walt Disney Corp, Bayer…). Le groupe Mittal, bien connu de nous, en particulier des sidérurgistes liégeois, en faisait partie jusqu’à la fin de 2011.


Comme si tout ceci n’était pas suffisamment grave, voilà que plusieurs indices venant des travaux et documents préparatoires montrent qu’en plus d’organiser le marché de libre échange le plus vaste de l’histoire de l’humanité, ce projet n’a pas que des objectifs commerciaux. Ainsi, le 26 mars 2009, le Parlement européen adoptait une résolution sur « l'état des relations transatlantiques après l'élection de Mr Obama » dans laquelle il établissait que l’objectif final était d’atteindre un « véritable marché transatlantique » dans un délai de six ans. Mais pour ce faire, la résolution suggérait la mise en place d’un Conseil politique transatlantique (CPT) chargé de « coordonner la politique étrangère et de sécurité ». On reproduit ici le mécanisme qui avait chapeauté le processus de l’intégration européenne, à savoir la concertation commerciale se dirigeant vers des coordinations politiques et, dans les années 50, la création de la communauté européenne de défense (CED) mise en échec alors parce qu’au parlement français les députés communistes et gaullistes avaient compris, alors, que derrière la vocation d’intégration se cachaient les appétits d’hégémonie du capitalisme international.


C’est ainsi que l’on commence à découvrir que ce projet, « destiné à favoriser la concorde entre les peuples des deux rives de l’Atlantique tout en créant des millions d’emplois » (dixit Obama), recèle également des objectifs militaires. Ainsi, on précise que le marché élargi en question doit être « sécurisé ». Or nous savons ce que la « sécurisation » veut dire en langage politique américain. Pas étonnant donc que le Président américain, par ailleurs, prix Nobel de la paix l’ait mentionné comme une des grandes priorités de son mandat lors de son discours inaugural. Mme Hillary Clinton n’a pas eu tort, non plus, lorsqu’elle a dit, à propos de ce projet, qu’il s’agit d’un « OTAN économique ». Les travailleurs et les progressistes européens auraient tort de ne pas s’opposer à ces ambitions impérialistes avec la même détermination qu’ils opposent aux politiques guerrières de l’OTAN.


 

 

 
 

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