La démocratie mensonge

Comment rester confiant en notre modèle de société présenté comme exemplaire, quand il gaspille en un peu plus d’un siècle au profit de quelques privilégiés, ses réserves millénaires ? Comment rester serein quand tout indique que le rythme imposé à la planète nous précipite vers l’abîme ? Comment concilier les contradictions de plus en plus évidentes entre une minorité de nantis qui osent (presque) tout se permettre, et une majorité de démunis qui s’enfoncent jour après jour dans une pauvreté endémique dont on sait qu’elle n’est ni le fruit du hasard, ni inéluctable, mais qu’elle résulte au contraire d’une scandaleuse et injuste redistribution des richesses ?
10 décembre 2008

Il semble que nous soyons de plus en plus nombreux à nous interroger, confrontés à l’information quotidienne qui nous ressasse la dégradation évidente de notre environnement tant politique que social, économique, professionnel, écologique, culturel, moral… et confirmant par ailleurs, pour ceux qui en doutaient encore, que tout paraît bien être lié.

Alors que la « globalisation » — comme seule loi du marché — est prônée par les plus nantis comme LA solution à tous nos problèmes, le désarroi et le questionnement qui en résulte semblent gagner de plus en plus d’individus. Des citoyens, fragilisés, se sentent dépassés, écrasés par le projet de société qui leur est imposé.

Malgré leurs beaux discours, éloquemment adaptés aux circonstances, les classes dirigeantes ne s’embarrassent plus guère de principes ni de déontologie. Seul ce qui sert leurs intérêts prévaut. L’idéal qui au départ animait parfois les plus dévoués a tôt fait de céder sa place aux calculs égoïstes et aux plans de carrière. Ces élites — ou qui se croient telles — ne sont plus au service de la collectivité, mais strictement au leur et à celui de leurs partenaires financiers. Leur ambition n’est jamais satisfaite. Qu’ils s’autoproclament de gauche ou de droite, les problèmes du citoyen ne les intéressent qu’occasionnellement, à quelques semaines des élections. Tout occupés par leur ascension personnelle, ils n’ont d’yeux, d’oreilles et d’agenda que pour ceux qui pourraient y contribuer, ceux qui ont le pouvoir de l’argent et de l’influence. Et tout est bon pour y parvenir… La Palestine l’illustre fort bien. Depuis toujours, tous les principes « démocratiques » y sont bafoués par l’occupant israélien. Cela n’empêche pas les autorités de nos États occidentaux, pourtant chantres des Droits de l’homme, de continuer de commercer avec Israël dont le lobbying politique parfaitement organisé démontre la force de ses réseaux d’influence patiemment tissés.

En-dehors de déclarations et de discours élimés jusqu’à la trame, aucun de nos politiciens suffisants n’a manifesté assez de courage ni d’éthique que pour oser prendre des mesures qui auraient signifié à l’occupant israélien qu’il avait, depuis longtemps, dépassé toute limite. Quoi de surprenant pour le citoyen qui observe les mœurs de ces princes ? Dans le meilleur des cas, l’engagement de nos valeureux « démocrates » se résume depuis longue date à quelques déclarations consternantes, allant de « la vive préoccupation » des uns à la « demande de retenue» des autres… Point barre.

L’asymétrie évidente et incontestable qui prévaut dans l’affrontement israélo-palestinien – l’une des plus puissantes armées au monde dotée d’une force aérienne supérieure à celle de l’Angleterre et d’un feu nucléaire peut-être aussi important, face à des gamins et leurs cailloux – révèle immédiatement que l’argument de la traque au « terrorisme » n’est qu’un grossier mensonge servant d’excuse pour dissimuler d’autres mobiles, beaucoup plus sordides et probablement plus rentables. Mais, profitant du manque de courage d’une diplomatie internationale de plus en plus aliénée au grand capital et muselée par les Etats-Unis, le gouvernement israélien – et d’autres avec lui – entretient les amalgames médiatiques et poursuit l’écrasement de la population de tout un pays, jusqu’à son éradication même, s’il le pouvait.

Il faut aller en territoire palestinien pour voir dans quelles conditions la population est asphyxiée, laminée par l’oppression militaire qui s’y déploie avec un zèle plus qu’équivoque, au service d’une infâme idéologie coloniale… Il faut prendre le temps de rencontrer les acteurs israéliens du Camp de la Paix, dont par exemple l’AIC (Alternative Information Center) qui travaille à la réconciliation entre Arabes et Israéliens ; ou Ta’ayush (Ensemble) oeuvrant sur base commune judéo-arabe ; ou ICADH (comité israélien contre les démolitions de maisons) ; ou les Refuzniks (soldats qui refusent de prester leur service militaire dans les Territoires occupés) lorsqu’ils viennent témoigner… et écouter la description des atrocités commises par l’armée à l’encontre des civils palestiniens, pour ne plus avoir de doutes quant aux motivations qui animent les responsables de l’état major israélien.

Il faut être très clair quant aux conditions qui existent dans les villes et les villages palestiniens : on n’y vit plus, on tente d’y survivre, vaille que vaille, on s’y exténue, on y est affamé et on y est écrasé, massacré même ! Par une balle dans le dos, en fuyant une soldatesque névrosée, ivre de son impunité. Par une bombe, pendant son sommeil. Par l’interdiction de passer un check point pour gagner d’urgence un hôpital voisin. Par un bulldozer, sous sa maison. Ou par un missile, sur une plage…

La deuxième Intifada (mot arabe signifiant réveil de soi, réaction, soulèvement) se poursuit tant bien que mal. Réponse de la population palestinienne à son écrasement par l’envahisseur israélien, celui-ci redoublant souvent d’ingéniosité dans la morbidité de techniques dont certains de ses artisans sont devenus « experts ». Au point que l’armée américaine embourbée dans son infâme guerre en Irak, a fait appel aux conseillers israéliens, « spécialistes » en guérilla urbaine.

Ces mêmes « spécialistes » qui ont mis au point une technique imparable d’invasion des maisons particulières, passant de l’une à l’autre par les murs mitoyens qu’ils dynamitent. Plus besoin de risquer la vie des troupes en passant par les ruelles. Ceux-là surgissent dans votre salon par la béance d’une explosion et, après avoir tout démoli, passent à la maison suivante, par le même procédé. La Palestine fournit à ces brutes un laboratoire de premier ordre, particulièrement en ce qui concerne la Bande de Gaza. Toutes les techniques de négation de l’individu y sont testées, tant au niveau physique qu’au niveau psychologique, passant de l’usage d’armements interdits par les Conventions internationales – comme les munitions à l’uranium appauvri ou au phosphore – pourtant dénoncé par plusieurs rapports officiels, au détournement des taxes diverses revenant aux Palestiniens. Sans parler des privations de nourriture, d’eau, d’électricité, de mobilité, ainsi que le recours aux tortures en tous genres qui y sont devenues d’une banalité confondante. Ni de l’utilisation d’enfants comme boucliers humains. Ni des emprisonnements arbitraires de mineurs. Ni de l’odieux Mur de séparation, qui a fini par convaincre l’envahisseur américain qu’il était LA solution dans son embourbement à Bagdad…

« Barbare », vous avez dit « barbare » ?

Extraits de LA DEMOCRATIE MENSONGE – Daniel Vanhove – Coll. Oser Dire – Ed. Marco Pietteur. marco.pietteur@skynet.be

En cette fin d’année, disponible à editionsaden@skynet.be et à Bruxelles, à la Librairie Internationale, Tropismes, Libris, UOPC…

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