L'éducation aux médias, ha, ha, ha

Dans le « Télémoustique » du 11 juillet 2007

En 1995, on avait créé le Conseil de l'Éducation aux médias. J'avoue que je ne me souviens plus à la suite de quoi, mais ça devait être, une fois encore, une de ces lois mal ficelées votées sous le coup d'une émotion médiatique collective, et ne tenant pas compte de ce qui existait — comme la moitié de la législation de notre pays. De la com électorale, quoi. Évidemment, ce machin n'a pas servi, et aujourd'hui on annonce "l'avant-projet de décret portant création d'un Conseil Supérieur de l'Éducation aux médias".

Sans doute qu'on espère que l'inclusion du mot "supérieur" va tout changer, et que ça va servir enfin à quelque chose. L'idée générale et officielle, on la connaît, est de former les enfants à décoder la pub et les programmes, disons pour leur protection. L'idée subliminale est moins alléchante : permettre aux médias et à la pub d'aller encore plus loin dans la surenchère, au prétexte que les victimes des programmes seraient, en principe, formées et immunisées. Lâchez la grippe aviaire, ils sont vaccinés. Plus hypocrite, tu meurs.

J'ai toujours dit que ceux qu'il fallait éduquer aux médias, ce n'étaient pas les consommateurs, mais plutôt les professionnels des médias. Sinon, ce sera toujours la même escroquerie intellectuelle : se contenter d'éduquer les poulets à la compréhension du point de vue du renard.

Et si on s'en prenait aux responsables, pour une fois?

Éduquer les télés aux médias, voilà un vrai projet. Un job que le Conseil Supérieur de l'Audiovisuel ne fait pas, notamment parce qu'il n'intervient qu'après coup, quand le malheur est déjà arrivé et oublié. On peut rêver? Éduquer les patrons de médias à être indépendants et compétents, et à ne pas être les bons toutous d'un parti politique ou d'un actionnariat publicitaire – ou des deux. Éduquer les producteurs et présentateurs à travailler pour le public et dans le respect de l'intérêt général, et non pour leur gloriole, leur intérêt pécuniaire et sous la censure des fournisseurs de pub. Éduquer les journalistes à embarrasser vraiment ceux qu'ils interviewent, et à ne pas permettre qu'un patron de parti les insulte parce qu'ils n'ont pas assez servi la soupe. Apprendre aux créateurs de fictions à montrer autre chose que des histoires où le seul mode de règlement des conflits est la violence, la tricherie et la malhonnêteté. Voilà quelques idées d'éducation aux médias qui ne courent pas les rues, mais qu'on aimerait voir mises en œuvre. Ce sera en tout cas plus efficace que d'envoyer des gosses suivre des cours du soir de télévision.

La Cité Interdite

La RTBF veut plus de pub dans l'avenir. Chaque fois qu'une association et des hommes politiques demandent à en débattre, la "radio-télé publique commerciale de gouvernement" hurle au viol, comme elle le fait quand on parle de sa dépendance politique, ou de la mainmise des publicitaires (et des commerciaux qu'ils remorquent) sur les programmes. C'est bien de cultiver un sain réflexe d'indépendance, mais pourquoi justement dans les domaines où l'on est le plus suspect? Les réponses aux hypothèses sur la publicité, qui pollue le service public, sont toujours de mauvaise foi de la part de la Cité Interdite : suppression de x chaînes, suppression de y emplois. Des menaces, mais pas de fait, pas de débat, pas de réflexion.

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