France-Israël : un tramway colonial

TRAMWAY COLONIAL : TU NE PASSERAS PAS !

Un blog consacré à la campagne contre le projet de tramway français à Jérusalem :

http://nonautramwaycolonial.over-blog.com/

La construction d¹un tramway illégal à Jérusalem : L¹Etat français déraille

par Marion Gaudin et Anas Abderrahim , agoravox, 30 mars 2006.

Source : http://www.agoravox.fr/tb-receive.php3?id_article=8333

En remportant l¹appel d¹offre lancé par le gouvernement israélien pour construire un tramway à Jérusalem, deux entreprises de transport françaises s¹engagent dans un projet de construction en violation du droit international. L¹Autorité palestinienne, des associations et syndicats en France réclament l¹intervention de l¹Etat français.

Le 17 juillet 2005, le consortium français «City Pass», auquel appartiennent les entreprises françaises Alstom et Connex, (associées à trois entreprises israéliennes), signe avec le gouvernement israélien un contrat pour la construction d¹un tramway à Jérusalem. Le projet voit le jour en 1994, quand, voulant réaliser le rêve du père du sionisme, Theodore Herzl, de faire de Jérusalem «une ville du XXe siècle»[1], Israël lance un appel d¹offre et retient ces deux compagnies en 2002. Alstom doit fournir les rames, alors que Connex participera à l¹exploitation du tramway pendant près de 30 ans. Le projet, dont le coût est estimé à quelque 400 millions d¹euros, devrait entrer en service à l¹automne 2008.

Le tramway, qui vise officiellement à faciliter les transports publics et à désengorger Jérusalem-Ouest, doit en réalité s¹étendre sur 13,8 km et desservir les colonies illégales de peuplement de Pisgat Zeev et French Hill dans un premier temps, puis Neve Ya¹akov ensuite. Il pourra ainsi les relier au mont Herzl, par la route de Jaffa, dans le centre de la ville, tout en séparant le village de Shu¹afat du camp de réfugiés où vivent trente-huit mille Palestiniens. C¹est une localité qui est d¹ailleurs déjà visée par l¹édification du mur et les expropriations de terres.

Alors que pour la forme, Israël parle d¹aspects économiques et écologiques, le fond demeure évidemment très politique: l¹objectif d¹Israël est de consolider l¹annexion et de renforcer sa domination sur la partie orientale de Jérusalem. La volonté d¹Israël reste celle de recomposer Al Qods pour faire un «Grand Jérusalem», capitale de l¹Etat hébreux, en dépit du droit international qui en fait un territoire occupé.

La France participerait-elle à cette politique d¹extension de la colonisation autour d¹Al Qods?

Embarras du gouvernement français:

En France, le gouvernement, sous le paravent de la libre-concurrence, se défend de toute influence et responsabilité dans l¹affaire. Selon lui: «La participation de Connex et d¹Alstom est le fait d¹entreprises privées, sur lesquelles l¹Etat français n¹a aucun pouvoir d¹injonction ou de contrainte […] La construction de ce tramway pose certes des difficultés politiques, ajoute-t-il, mais l¹Etat ne dispose d¹aucun moyen pour amener les entreprises françaises concernées à se retirer de ce marché».

Pourtant, il est évident que dans cette affaire, l¹Etat a eu son mot à dire.

Politiquement, la France peut toujours influencer la décision d¹une entreprise, notamment quand il s¹agit d¹une grande société qui a d¹autres intérêts sur le territoire français [2]. Alstom, par exemple, a été en difficulté au cours des dernières années, et a bénéficié de nombreuses aides et d¹un soutien politique fort de la part du gouvernement. Ce dernier dispose, à la suite du plan de sauvetage de l¹entreprise, à titre temporaire et en tant qu¹actionnaire majoritaire, de plus de 21 % du capital d¹Alstom. C¹est donc que le gouvernement a un poids indiscutable dans les prises de décision de l¹entreprise.

D¹autre part, ce projet a été soutenu politiquement par les ténors de la politique française de ces dernières années. En effet, quelques mois plus tôt, le 17 mars 2005, Jean-Pierre Raffarin, alors Premier ministre, s¹était même félicité dans un discours à la communauté française installée en Israël de la signature de ce futur contrat important pour le commerce extérieur français:

«La France constitue déjà l¹un des premiers partenaires économiques d¹Israël», avait-il déclaré. «Je pense à des investissements importants, comme l¹usine de dessalement de Véolia à Ashkelon, ou au projet mené par Véolia encore et Alstom pour le tramway de Jérusalem».

Autre preuve, le jour de la signature du contrat, c¹est Gérard Araud, ambassadeur de France en Israël, qui était présent dans le bureau de l¹ancien Premier ministre Ariel Sharon.

C¹est ce télescopage -mal dissimulé- de la diplomatie et des affaires commerciales qui est regrettable, mais pas seulement.

Un projet contrevenant au droit international:

Outre le problème éthique pour un Etat de soutenir, via ses entreprises, un projet internationalement illicite[3], se pose également l¹écueil d¹ordre purement juridique. Par son attitude, la France viole ses obligations internationales, qu¹elle s¹est engagée à respecter et à faire respecter. Et l¹Etat français commet une violation du droit international qu¹il ne peut justifier par l¹ordre juridique interne français ou israélien [4]. La création de cette voie de tramway est incontestablement dédiée à une ¦uvre de colonisation par transfert de population et installation d¹infrastructure sur un territoire occupé.

La France, consciente de ces enjeux, ne peut pas ni ne doit autoriser l¹assistance à la politique d¹annexion israélienne. Selon la Cour internationale de Justice, les Etats ont l¹obligation d¹agir afin de rétablir le plein droit d¹un peuple qui en est privé. Et selon la résolution 465 de mars 1980 du Conseil de sécurité de l¹ONU, les Etats ne doivent «fournir à Israël aucune assistance qui serait utilisée spécifiquement pour les colonies de peuplement des territoires occupés». En clair, ils doivent non seulement refuser de reconnaître la situation du «fait accompli» qui se prépare, mais ont aussi l¹obligation d¹agir pour mettre fin à cet acte illicite. Telle est la responsabilité internationale de l¹Etat français.

De plus, selon l¹article premier de la 4e Convention de Genève[5], la France s¹est engagée à respecter et à faire respecter la Convention en toutes circonstances. Elle doit donc normalement faire respecter l¹article 49 selon lequel «la puissance occupante ne pourra procéder à la déportation ou au transfert d¹une partie de sa propre population civile dans le territoire occupé par elle».

Réactions insuffisantes:

Pour l¹instant, l¹Autorité palestinienne s¹est limitée à la discussion avec les autorités françaises et avec les directions des deux entreprises. Pour sa première visite à Paris depuis son élection en janvier 2005, le président de l¹Autorité palestinienne Mahmoud Abbas avait abordé le sujet le 17 octobre dernier avec Jacques Chirac. Le ministre des Affaires étrangères, Nasser Al-Qidwa, avait évoqué sa "préoccupation" devant "la participation de deux sociétés françaises à un projet de tramway à Jérusalem", et demandé à son homologue français de mettre un terme à la réalisation de l¹ouvrage. Récemment encore, le ministre a adressé des courriers aux autorités françaises ainsi qu¹aux dirigeants des deux entreprises françaises impliquées dans ce projet d¹appui à l¹extension de la colonisation.

Depuis ces manifestations des Palestiniens, le gouvernement français diffuse ses déclarations sur le sujet au compte-goutte et continue de clamer son incapacité à intervenir, en vertu du principe de libre-concurrence. Il s¹attache à tenter de rassurer les Etats arabes et les Palestiniens en rappelant le caractère commercial du contrat qui ne doit pas selon lui faire l¹objet d¹une lecture politique.

En outre, le chef du service presse de l¹entreprise Alstom ne donne que peu de crédit à cette réaction qui, selon lui, ne fera tout au plus que retarder de quelques mois ou années la réalisation du projet, mais certainement pas l¹arrêter. «Le monde des affaires est dur», a-t-il ajouté. «Croire que le business est éthique est carrément utopique. Je comprends que cela heurte les consciences occidentales, mais c¹est comme ça. Si nous n¹avions pas accepté ce contrat, cela aurait été les autres. Siemens en Allemagne, par exemple. Quant au Quai d¹Orsay, il essaie de ménager la chèvre et le chou. Nous sommes dans un contexte politique qui dépasse notre petite industrie».

Une petite industrie qui a, en tous les cas, beaucoup à gagner dans cette histoire. Le fait que les Français s¹impliquent de plus en plus dans la vie économique d¹Israël va leur ouvrir des portes pour des coopérations à d¹autres projets de plus grande ampleur, notamment la mise en place d¹un train de banlieue, l¹extension de la future ligne de tramway à Jérusalem et la création d¹autres lignes plus étendues dans la ville. Alstom semble également bien placé pour remporter le marché encore plus prometteur du métro-tramway de Tel-Aviv, estimé à au moins un milliard d¹euros.

En réaction, le Collectif national pour une paix juste et durable entre Palestiniens et Israéliens, ainsi que les syndicats des entreprises impliquées, viennent de lancer une campagne de mobilisation et de protestation en France contre la réalisation du projet de tramway sur les territoires occupés. Une action juridique est aussi à l¹étude. Mais leur action n¹aura pas de véritable impact si elle n¹est pas suivie d¹actions conjuguées en France et dans les pays arabes qui ont des contrats importants avec les entreprises incriminées.

En attendant, Alstom part construire les rames du futur tramway de Jérusalem en Espagne, histoire de se faire oublier un peu. Le temps que l¹affaire se tasse en France.

Y a-t-il une véritable inflexion de la politique de la France?

Le traitement de ce dossier par la France illustre la complexité des rapports de la France avec le Proche-Orient. Beaucoup critiquaient la politique «arabe» de ce pays d¹Europe, mais omettaient de souligner les échanges fructueux avec Israël.

Ces éléments nouveaux viennent donc consolider les signes croissants d¹une inflexion de sa position diplomatique au Proche-Orient en général.

Il faut cependant noter que cela ne semble pas dû à une politique réellement orientée vers Israël. C¹est une posture que nous pouvons expliquer en partie par les modifications qui ont eu lieu à l¹échelle régionale. La France a travaillé à l¹amélioration de ses rapports avec les Etats-Unis et Israël. Les Etats-Unis, la France et l¹UE semblent ainsi avoir établi une base de coopération plus consensuelle sur les questions iraniennes, syro-libanaises, afghanes et irakiennes.

Ce sont bien ces raisons qui semblent expliquer le silence sur la question palestinienne. Ce qui sous-entend une harmonisation progressive dans les positions européennes et françaises sur les axes américains. Il semble y avoir un accord sur le fait de mettre constamment la balle dans le camp palestinien pour lui demander de nouveaux efforts. Chose qui pour nous est évidemment impossible.

Notes :

[1] http://www.rakevetkala-jerusalem.org.il

[2] Le cas d¹Arcelor et de GDF/Suez est édifiant sur sa capacité à influer sur les décisions des grandes entreprises françaises quand les intérêts français sont menacés.

[3] Il s¹agit d¹un acte qui est contraire au droit international.

[4] Voir l¹article de Mireille Mendès France, Le chantier du tramway de Jérusalem au regard du droit international in Revue d¹études palestiniennes, page 31.

[5] La Quatrième Convention de Genève est relative à la protection des personnes civiles en temps de guerre. Actuellement en vigueur, elle fut signée le 12 août 1949.

Le Mur

Noyé à cause du Mur

par ISM, 2 avril 2006

Le corps d¹un noyé retrouvé accroché au fil barbelé de la barrière illégale près de Bil¹in. À 7h ce matin, une inondation provoquée par la barrière d¹Annexion a emporté deux frères près du village de Bil¹in.

La vallée entre Bil¹in et Safa (à l¹ouest de Ramallah) a été inondée près de la construction de la barrière illégale qui a empêché l¹eau de s¹évacuer, créant un plan d¹eau, dont le niveau, selon les villageois, dépasse les oliviers.

À 14h10, Eyad Tahar a été retrouvé mort, noyé dans une inondation près de la barrière d¹Annexion. Son corps a été retrouvé coincé dans le fil barbelé de la barrière d¹Annexion.

Eyad et Raad Taha de Beit Annan se rendaient à leur travail à Ramallah quand ils ont été emportés par les eaux de l¹inondation. Le frère d¹Eyad, Raad, a été retrouvé sans connaissance peu de temps après et est actuellement à l¹hôpital de Biddu.

L¹armée israélienne a refusé de laisser les équipes de secours organisées par les villageois utiliser leur équipement pour essayer de vider le secteur inondé. L¹armée dit que le secteur fait partie de la construction de mur, donc les villageois ne sont pas autorisés à y pénétrer.

Le Dr. Khaled Ayash, de l¹hôpital Carmel à Biddu, qui a examiné le corps a déclaré que la cause de la mort d¹Eyad était la noyade.

Pour plus d¹informations, appelez :

Bureau de l¹ISM : 022 971 824 ou 057 572 0754 "

Source : http://www.ism-france.org/news/article.php ?id=4553&type=temoignage

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