« Dialogues entre religions » en temps de guerre

Nous commençons par les premières vérités sur le crime perpétré par l’aviation israélienne à Qana. Dans le Haaretz d’hier (mercredi 2 août) Yoav Stern et Amos Arel écrivent : « On a appris hier qu’il n’y a pas eu, dans le passé, de tirs de katyushas depuis l’immeuble bombardé et qu’il n’y avait pas eu d’information (de la part de l’armée israélienne, NDR) à propos de la présence d’hommes du Hezbollah. L’immeuble a été pris comme objectif parce que des katyushas avaient été lancées auparavant des environs, et l’aviation a décidé d’attaquer quelques habitations dans un certain rayon autour du point de lancement ». Le morceau est explicite. On notera en outre que ces phrases n’apparaissent que dans la version en hébreu et pas dans la version anglaise de Haaretz (et celle-ci n’a été signée que par Yoav Stern), qui est la version utilisée par la presse étrangère.

L’élite socio militaire israélienne se trouve dans la même situation de malaise mental que MacNamara et Westmorland pendant la guerre du Vietnam. Grâce aux Usa, cette élite possède une aviation, des missiles et une artillerie de Troisième guerre mondiale, et elle les applique contre des habitants d’un petit pays pour chercher quelques milliers de guérilleros. Ils ne peuvent que perdre et se perdre dans les décombres de la destruction qu’ils ont causée. C’est dans ce cadre de Docteur Folamour que l’existence en Israël d’une activité de protestation, comme celle organisée par Gush Shalom de Uri Avnery, par Taayush –cette dernière explicitement à gauche- et par la Coalition des femmes pour la paix, comme la manifestation du 29 juillet à Tel Aviv, revêt une grande importance. Comme sont tout aussi importantes des initiatives et rencontres conduites sur d’autres terrains.

La tentative de négociation avec des représentants du Hamas – torpillée par les services de sécurité de Tel Aviv à seule fin de donner le feu vert aux blindés israéliens à Gaza- menée par deux rabbins parrainés par le fondateur de l’Institut Arik, Yitzhak Frankenthal, a été un événement tout autre que secondaire. Le nom de l’institut est celui du fils de Frankenthal, tué par le Hamas en 1994. Frankenthal avait organisé une rencontre du ministre palestinien (Hamas) pour Jérusalem, Chaled Abu Arafa, et du représentant à Jérusalem du Hamas, Muhammad Abu Tir, avec un groupe de rabbins conduit par Menahem Fruman et David Bigman. L’objectif était de faire un échange de prisonniers contre la libération du soldat Gilad Getai, mais aussi de lancer une proposition de paix. La réunion a échoué parce que les services de sécurité ont arrêté Abu Arafa et Abu Tir les empêchant ainsi de participer à la rencontre, jusqu’à, même, annuler leur permis de résidence à Jérusalem. Fruman est rabbin dans la colonie de Tekoa en Cisjordanie. Ce qui ne semble pas porter préjudice à un dialogue. L’autre rabbin, Bigman, est par contre directeur de la yeshiva (école religieuse) du mouvement kibboutzim religieux. La majorité des kibboutzim – à l’heure actuelle en phase de privatisation- provient du sionisme socialiste et étaient areligieux ou anti-religieux. Comme le rapporte le Jérusalem Post du 26 juin, Fruman et Bigman avec d’autres rabbins orthodoxes sont convaincus que le dialogue sur la base de leurs sensibilités religieuses ouvre plus de chemins que la diplomatie traditionnelle, car, pour le Hamas, les leaders sionistes sont des apostats. Fruman a été conseiller pour les affaires religieuses à la Knesset et avait pris l’initiative de la libération du leader Hamas Ahmed Yacine, qui a ensuite été tué par les forces israéliennes. Fruman croit en la sacralité de la Terre Sainte mais pas en celle de l’état. Il est menacé par des colons et vit sous la protection de la police. Pour Yitzhak Frankenthal, dont le fils a été tué par le Hamas, « nous devons comprendre que c’est une obligation pour les palestiniens, comme pour toute nation, de lutter pour sa propre libération. Le temps de la réconciliation est arrivé et la seule façon d’y parvenir est le dialogue » (rapporté par Arthur Neslen, « A way out of the Gaza crisis », Al Jazeera, 30 juillet).

Edition de jeudi 3 août de il manifesto,

Traduit de l’italien par Marie-Ange Patrizio

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