Ce que Bush prépare contre Cuba

Fidel continue à lutter

Article de Ricardo Alarcon, Président de l’Assemblée Nationale, paru dans

El Economista

31 août 2006

« Le peuple de Cuba est, et de droit doit être, libre et indépendant ».

C’est par ces mots suant l’hypocrisie que le Congrès des Etats-Unis a

adopté en 1898 la Résolution Conjointe afin d’intervenir dans la guerre

que, nous, les Cubains, étions sur le point de gagner contre l’Espagne.

Ce contre quoi José Marti avait mis en garde à temps, en dénonçant « le

calcul cynique et la froide méchanceté » de la stratégie étasunienne,

devenait une réalité. Ce que Carlos Manuel de Cespédes avait découvert

s’avérait (« s’emparer de Cuba, c’est cela le secret de leur politique »

a écrit en 1870 le Père de la Patrie.)

George Bush, le sinistre personnage qui ne lit ni livres ni journaux ne

sait rien de tout cela, il n’en a d’ailleurs pas besoin, car il reçoit

ses ordres directement de Dieu pour faire la guerre, voler les élections

et commettre d’autres horreurs.

C’est la raison pour laquelle il répète avec une ignorance pathétique les

mots de 1898 avant de se retirer dans son ranch pour profiter de ses

vacances sans fin. Le pauvre diable croit qu’il peut avec de pauvres

phrases tromper un peuple qui, depuis un demi-siècle, s’est libéré de

l’inculture, connaît son histoire, en est fier et lui sera toujours

fidèle. Nous sommes nés en tant que Nation en luttant à la fois pour

l’égalité et pour la solidarité entre les êtres humains et contre une

puissance égoïste et toujours vorace, toujours prête à nous fouler aux

pieds et qui, sur nos plages, a commencé à construire un Empire qu’elle

veut universel aujourd’hui. L’alternative est simple : vaincre cet

entêtement ou disparaître en tant que peuple.

C’est l’essence de la cubanité. Il n’y a pas d’autre définition possible

pour notre identité. Ou nous sommes ce que nos fondateurs ont rêvé ou ne

sommes pas. Ce sont là les racines de notre socialisme.

Les Cubains présentent un autre trait particulier. Une véritable rareté,

quelque chose qui n’abonde pas. Nous avons un Président qui travaille

constamment, il ne fait pas autre chose que travailler. C’est son plus

gros défaut : Fidel Castro ne sait pas se reposer.

L’excès de travail lui a valu un accident de santé qui l’a mené à une

salle d’opérations et à une intervention chirurgicale risquée et

complexe. Heureusement, l’issue a été bonne. Et qu’a fait alors ce

combattant infatigable sur le point de fêter la 80e année d’une vie

faite d’une lutte ininterrompue ?

Il a convoqué ses collaborateurs les plus proches, les a consultés, a

réparti les tâches, s’est mis à écrire et a rédigé de sa main la

Proclamation dont le peuple cubain et le monde entier ont pris

connaissance dans la nuit du lundi 31 juillet 2006.

Il est allé droit au but. Il a délégué « de manière provisoire » ses

fonctions à la tête de la Révolution à Raul Castro qui, outres ses

mérites indubitables, avait été élu pour se faire, il y a des années,

conformément à notre ordre institutionnel, et il a fait la même chose

avec d’autres camarades afin qu’ils le remplacent à la tête des

programmes très importants touchant à l’éducation, à la santé et à

l’énergie dont Fidel a été le principal promoteur. Il a précisé qu’il

avait pris cette décision parce que « notre pays est menacé dans des

circonstances comme celles-ci par le gouvernement des Etats-Unis ».

Le jour suivant, dans son second message, Fidel soulignait avec force : «

Je ne peux inventer des bonnes nouvelles, parce que ce ne serait pas

conforme à l’éthique, et si les nouvelles étaient mauvaises, le seul à en

profiter serait l’ennemi. Dans la situation spécifique de Cuba, compte

tenu des plans de l’Empire, mon état de santé se transforme en un secret

d’Etat qui ne peut faire l’objet d’une divulgation constante. »

Le monde a pu juger tout de suite de la justesse de ces propos de Fidel.

À peine terminée la lecture à La Havane de sa proclamation, des hommes

politiques et des hauts fonctionnaires étasuniens ont appelé au

renversement du gouvernement cubain. Au même moment, des dizaines

d’individus – chiffre insignifiant si on le compare à la population de la

ville – ont fêté à Miami « la mort » de Fidel et ont vociféré devant les

caméras des grandes chaînes de télévision qui leur ont généreusement

concédé des heures interminables.

L’agitation de la tourbe fasciste a coïncidé avec les commentaires et les

éditoriaux de journaux qui se disent sérieux et avec les déclarations

insolentes de Condoleezza Rice et de George W. Bush. Habitués qu’ils sont

à vivre du mensonge et de la mystification, ils se sont rassemblés pour

donner un spectacle inhabituel qui, pourtant, paraissait trouver un écho

millénaire : Le commencement des paroles de sa bouche est folie, et la

fin de son discours est une méchante folie. (Ecclésiaste, 10,13)

Cuba est l’objet d’une politique agressive sans précédent dans

l’histoire. C’est une réalité facile à vérifier vu qu’elle apparaît dans

les documents officiels étasuniens.

La loi Helms-Burton, en vigueur depuis 1996, décrit en détail comment ils

entendent détruire la Révolution cubaine et le régime qu’ils nous

imposeraient ensuite, y compris la restitution de leurs propriétés aux

membres de la dictature de Batista, aux anciens grands propriétaires

terriens et propriétaires d’immeubles de rapport, la privatisation

complète de l’économie et l’élimination des systèmes actuels d’éducation,

de santé et de protection sociale. La Plan de mai 2004, annoncé avec

ostentation par Bush, explique en long et en large comment ils

conduiraient la mise en application de cette loi. Souvenons-nous que, à

cette occasion, le Président étasunien lui-même avait signalé qu’il ne

resterait pas les bras croisés face à n’importe quel changement dans la

direction du gouvernement cubain, qu’il n’accepterait pas un gouvernement

dirigé par Raul Castro et ses porte-parole ont menacé d’agir “de manière

rapide et décisive » pour l’empêcher de se mettre en place.

Le 10 juillet dernier, il y a un peu plus d’un mois, Bush a approuvé un

rapport qui confirme les buts de son Plan et annonce de nouvelles mesures

pour « précipiter la fin » du gouvernement révolutionnaire. Le pire est

qu’il admet pour la première fois, que certaines sont maintenues

secrètes « pour des raisons de sécurité nationale et pour garantir leur

application. »

Quelles sont ces mesures secrètes ? Pour imaginer ce qu’elles cachent, il

suffit de réviser ce qu’ils ont reconnu publiquement le 10 juillet : Ils

portent à 80 millions pour cette année et l’an prochain les fonds

destinés à fomenter la subversion. Ils affirment qu’ils les répartiront à

Cuba parmi les mercenaires entraînés et équipés par les Etats-Unis. Ils

interdisent les dons humanitaires que les institutions religieuses et

fraternelles réunies dans le Conseil des Eglises de Cuba recevaient de

leurs homologues étasuniennes. Ils ont augmenté les restrictions mises

aux visites des Cubano-américains à leurs familles et ils menacent de

traîner devant les tribunaux ceux qui enfreignent ces règles comme s’ils

étaient des criminels. Ils interdisent toute exportation liée à des

équipements médicaux qui peuvent être utilisés pour les programmes de

santé que Cuba applique au bénéfice des autres peuples comme l’Opération

Miracle et les missions internationalistes. Ils menacent, finalement, le

reste du monde d’appliquer, avec le maximum de rigueur, aux chefs

d’entreprises les Titres 3 et 4 de la Loi Helms-Burton.

S’ils proclament tout cela ouvertement, il y a tout lieu de supposer le

pire pour la partie qu’ils maintiennent cachée.

Parmi les choses secrètes approuvées par M. Bush le 10 juillet, il peut y

avoir n’importe quoi : des assassinats, du terrorisme, des attaques

militaires. Rien n’est à écarter si nous nous en tenons aux antécédents

bien connus.

Mais, de plus, il y a des preuves, nombreuses et irréfutables, et parmi

elles, abondent les documents officiels de la camarilla au pouvoir aux

Etats-Unis. Voyons-en quelques-unes.

Cette année, le secret a été levé sur certains documents qui avaient été

jalousement cachés depuis 1976 et qui démontrent, au-delà de tout doute

possible, que Washington a été complice de certains des actes de

terrorisme les plus atroces commis contre Cuba et contre le Chili,

spécialement l’assassinat d’Orlando Letelier et la destruction en plein

vol d’un avion de ligne cubain, événements qui se sont produits le 21

septembre et le 6 octobre de cette année-là. À ce moment-là, le Chef de

la CIA était George H.W. Bush, le père du président actuel. Depuis juin

1976, M. Bush était au courant des plans contre Letelier et contre

l’avion cubain et il n’a rien fait pour empêcher ces crimes horribles. Au

contraire, il s’est occupé de couvrir et de protéger leurs auteurs :

Orlando Bosch et Luis Posada Carriles. On peut lire à présent les

documents sur le site des Archives de Sécurité Nationale de l’Université

George Washington.

Tant Bosch que Posada vivent actuellement en territoire étasunien et

jouissent de la protection des autorités. On a pu voir le premier aux

côtés du Président Bush lorsque celui-ci s’est rendu à Miami pour le

remercier, lui et d’autres assassins notoires, de la fraude grâce à

laquelle il s’était emparé de la Maison-Blanche. Orlando Bosch ne se

cache pas, il donne souvent des entrevues à la télévision locale. Il

revendique sans aucune gêne sa participation à diverses actions

criminelles. Il n’a jamais été mis en examen pour l’assassinat de

Letelier et de sa jeune secrétaire Ronnie Moffitt. Personne ne lui a même

posé la moindre question sur la fameuse réunion qui a eu lieu à Santiago

du Chili en juin 1976 et au cours de laquelle, selon le document sur

lequel le secret a maintenant été levé, « il a été décidé d’assassiner

Letelier » ; ou sur la rencontre effectuée à Caracas en septembre de la

même année et au cours de laquelle, dans un discours public, il s’est

vanté de cet assassinat et a annoncé, en impliquant Posada, l’attentat

imminent contre l’avion.

Il y a presque un an et demi que Posada Carriles est apparu aux yeux de

tous à Miami et les Etats-Unis continuent à faire obstacle à son

extradition vers le Venezuela d’où il s’est évadé en 1985, lorsque Hugo

Chavez était un jeune inconnu. Depuis ce moment-là, le tribunal qui le

jugeait pour l’attentat contre l’avion le réclame. En 1985, Posada s’est

enfui avec l’aide de la Maison-Blanche et il est parti travailler pour la

fameuse opération secrète « Iran-Contra », sous la direction de Bush

père. Bush le Petit continue à la protéger maintenant. Il foule ainsi au

pied des conventions et accords importants concernant la lutte contre le

terrorisme et dont l’application est obligatoire, en vertu de la

résolution adoptée par le Conseil de Sécurité des Nations Unies, à la

demande des Etats-Unis. Ils sont on ne peut plus clairs : dans des cas

comme celui de Posada Carriles, soit la personne doit être extradée vers

le pays qui la réclame, soit il faut la juger pour le même crime dans le

pays où il se trouve « sans aucune exception quelle qu’elle soit ».

(Convention pour la suppression des attentats contre l’aviation civile,

Montréal 1971, article7)

Bush ne l’extrade pas et ne le juge pas. Il fait tout pour qu’il ne soit

pas jugé. Il protège cet assassin et Bosch, ce même Bush qui ne cesse de

répéter : « celui qui protège un terroriste est aussi coupable que le

terroriste lui-même. »

Cinq Cubains – Gerardo Hernandez, Ramon Labañino, Antonio Guerrero,

Fernando Gonzalez et René Gonzalez – arriveront bientôt au 8è

anniversaire d’un emprisonnement injuste auquel ils sont soumis

précisément parce qu’ils luttaient contre le terrorisme anti-cubain dans

son repaire de Miami. Ils l’ont fait de manière héroïque, sans armes,

sans faire du mal à qui que ce soit. Leur incarcération a été déclarée

illégale par le Groupe de travail des Nations Unies sur les détentions

arbitraires en mai 2005.

La Cour d’appel du 11è Circuit étasunien a annulé, le 9 août 2005, les

peines qui leur avaient été infligées, déclarant ainsi nulle et non

avenue la farce de procès à laquelle ils ont été soumis à Miami. En

conséquence, elle les a déclarés innocents.

Mais ils sont restés en prison dans un système pénitentiaire très dur et

particulièrement cruel avec eux puisqu’il interdit à Gerardo et René

toute visite de leurs épouses.

De l’accusation première à la fin du procès qui s’est déroulé contre eux,

le gouvernement des Etats-Unis a reconnu sans la moindre hésitation que

son but était de protéger les groupes terroristes de Miami. Il l’a

proclamé sans gêne lorsqu’il a demandé au tribunal de fixer, outre les

sentences très sévères édictées contre eux, des conditions spéciales

pour leur interdire, une fois qu’ils auraient recouvré leur liberté,

d’agir à l’encontre du terrorisme que Bush protège. Et la Cour a accepté.

Il faut lire, par exemple, les minutes du Tribunal de Miami en date du 14

décembre 2001, page 46 : « En tant que condition supplémentaire pour la

liberté sous condition, il est interdit à l’accusé de s’approcher ou de

se rendre dans les lieux spécifiques où l’on sait que des individus ou

des groupes tels que des terroristes se trouvent ou viennent. »

La bande de Bush peut se permettre tout cela parce qu’elle jouit de la

complicité des grands monopoles qui contrôlent les médias et qui se

consacrent à cacher la vérité, propager le mensonge et tenter de tromper

et d’abrutir.

Ils ne disent pas un mot des plans d’agression de l’Empire, rien des

crimes de Bosch et Posada Carriles, rien de la terrible injustice qui est

commise contre 5 Cubains courageux et contre leurs familles. Maintenant,

ils se livrent à la spéculation sur la santé de Fidel et l’avenir de Cuba.

Ne leur en déplaise, Fidel se rétablit et lutte. Il ne cesse de lutter et

avec lui, son peuple. Il continuera à le faire, toujours. Jusqu’à la

victoire.

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