Blackwater, armée fantôme et multinationale prospère

Les mercenaires occidentaux constituent le plus gros contingent

après le contingent américain

6.000 dollars pour la protection rapprochée d'un entrepreneur,

8.000 dollars pour une personnalité

28 Mai 2007

Les États-Unis et l'Iran se retrouvent le 28 mai à Bagdad pour tenter

de convenir d'un mode opératoire visant à la stabilisation de l'Irak,

avec en toile de fond un agenda diplomatique soutenu par un

important déploiement naval américain dans le Golfe.

En prévision de ce calendrier diplomatique, marqué en outre par les

débats du Conseil de Sécurité de l'Onu en vue de l'adoption d'une

résolution contraignante sur la création d'un tribunal international

chargé de définir les responsabilités dans l'assassinat de l'ancien

premier ministre libanais Rafic Hariri (14 février 2005) et par la

réunion jeudi 1er juin à Madrid entre l'Iran et l'Agence atomique de

Vienne, les États-Unis ont dépêché cette semaine neuf bâtiments de

la flotte en appui aux deux porte-avions déjà présents aux larges

des côtes iraniennes.

Trois jours avant la réunion de Bagdad, les États-Unis ont envoyé,

en urgence, vendredi 25 mai, au Liban huit avions cargos chargés de

renforts militaires en soutien à l'armée libanaise en confrontation

contre les combattants du «Fatah Al-Islam», groupe radical se

réclamant d'AL-Qaïda dans le nord du Liban, et débloqué 80 millions

de dollars au président palestinien Mahmoud Abbas pour équiper sa

garde rapprochée et la renforcer face à ses rivaux du Hamas, dont

las combattants, à Gaza, sont pourchassés par les hélicoptères

israéliens. .

Les États-Unis paraissent avoir voulu mettre une pression maximale

pour tenter de sortir du guêpier irakien dans lequel ils se sont placés

au prétexte de «la guerre contre le terrorisme». Signe indiscutable

de la détermination américaine, la décision de la majorité démocrate

du Congrès américain de renoncer à conditionner le financement de

l'effort de guerre américain à la fixation d'une date de retrait des

troupes américaines d'Irak. Au total, les Etats-UInis comptent

120.000 soldats américains soutenus par la flotte du Golfe, deux

portes-avions, neuf bâtiments d'escorte, soit 16.000 marins et 140

avions de combats.

Toutefois, l'Iran, pour l'Irak, la Syrie, pour le Liban, sont

régulièrement pointés du doigt, mais cette accusation quand bien

même est fondée occulte toutefois la responsabilité des pays

occidentaux dans la déstabilisation régionale, notamment à travers

leurs mercenaires.

A intervalles réguliers, en effet, les médias occidentaux pointent du

doigt les infiltrations transfrontalières, en provenance tant de Syrie

que d'Iran, pour expliquer les difficultés militaires occidentales en

Irak, imputant la recrudescence des opérations anti-américaines,

tantôt à la jonction entre les partisans du mouvement «Al-Qaîda»

d'Oussama Ben Laden et les résistants irakiens, tantôt à la guerilla

chiite, occultant le phénomène majeur de la guerre d'Irak, le

mercenariat à vaste échelle de type occidental.

En 48 mois de guerre (quatre ans), l'Irak, le plus important champ de

tir de l'époque contemporaine, est devenu le plus important champ

de mercenariat du monde. Près de cent mille gardes privés

(100.000), le terme pudique employé pour désigner les mercenaires

des temps modernes, sont en mission dans ce pays, au point de

constituer le deuxième contingent par ordre d'importance opérant en

Irak, derrière les États-Unis, surpassant de loin l'ensemble des

autres forces de la coalition (britanniques, polonais, australiens etc.),

selon les estimations occidentales (1).

Le recours au mercenariat se justifie pour de multiples raisons:

-une commodité comptable d'abord, car en cas de décès, les

mercenaires ne figurent pas sur la liste des bilans officiels américains

ou anglais,

-une commodité opérationnelle ensuite car les mercenaires ne sont

pas soumis aux astreintes militaires et disposent d'une plus grande

marge de manoeuvre. En cas de scandale, comme c'est le cas avec

les tortures de la prison d'Abou Ghraïb, l'honneur d'un pays n'est pas

entaché dans la mesure où la responsabilité de la forfaiture en

incombe aux sous-traitants.

Le maître d'oeuvre de l'opération mercenariat en Irak est la firme

américaine Blackwater, une firme de "prestataires de service", créée

en 1997, par Erik Prince, héritier d'une riche famille de chrétiens

ultraconservateurs du Michigan et ancien membre des commandos

de marine, les «Navy Seal».

Blackwater, -étymologiquement l'eau noire qui signifie en langage

imagé les eaux d'égouts transportant les matières fécales des

toilettes non recyclables-, connaîtra un développement fulgurant

avec "la guerre contre le terrorisme" lancé par le président George

Bush en riposte aux attentats anti-américains du 11 septembre

2001.

En 2002, dans la foulée de l'invasion de l'Afghanistan, Erik Prince fait

des offres de service au Pentagone. Donald Rumsfeld, soucieux de

restructurer la machine de guerre américaine. développe la

sous-traitance de certaines opérations à des forces spéciales dotées

d' armes de haute technologie. Blackwater obtient, sans appel

d'offres, son premier contrat, en avril 2002, d'une valeur de cinq

millions de dollars pour la protection du siège de l'agence à Kaboul.

Un an plus tard, la société décroche le gros lot avec le contrat de

protection du proconsul américain en Irak, Paul Bremer, un contrat

emporté toujours sans mise en concurrence. A partir de ce moment,

Blackwater recrute sa propre armée privée sur le Tigre et l'Euphrate,

et les commandes pleuvent.

L'entreprise ouvre des bureaux à Bagdad, mais aussi à Amman,

Koweït City et McLean, en Virginie, à équidistance du Pentagone, de

la Maison Blanche et de la CIA. 450 experts répartis dans deux

succursales de la firme à Bagdad et à Kuwait City, sont affectés au

recrutement, à la centralisation des candidatures, les contrats de

mission et les lieux d'affectation, ainsi qu'au ravitaillement.

Blackwater connaîtra la notoriété à Falloujah (Irak) où elle s'est

tristement illustrée avec la capture de quatre de ses membres,

révélant aux États-Unis et au reste du monde ses méthodes

expéditives. La capture de ses "prestataires de service", le 31 Mars

2004, -quatre jeunes gens d'une trentaine d'années, en tenue civile,

sans grade ni uniformes-, ainsi que le démembrement de leur

dépouille à coups d'armes contondantes après leur décès dans les

combats, puis leur exposition sur le pont de l'Euphrate, va

déclencher l'un des combats les plus meurtriers de la guerre d'Irak,

la bataille de Falloujah qui réduira cette ville sunnite en cité fantôme.

En ce mois d'avril 2004, qui passe pour avoir été l'un des points les

plus chauds de la confrontation américano-irakienne, 80 mercenaires

seront tués dans les batailles de Falloujah, de Bagdad et de Nadjaf,

dont 14 dans la première quinzaine d'avril. C'est d'ailleurs la capture

et la mutilation de quatre mercenaires à proximité de Falloujah, dans

le secteur sunnite de l'Irak, qui a déclenché les batailles d'avril.

Récidiviste, Blackwater s'illustrera trois mois plus tard dans la

deuxième grande bataille d'Irak, la bataille de Najaf, dans le sud de

l'Irak, lieu saint chiite et fief du chef radical Moqtada Sadr.

La firme avait assuré la protection du quartier général de la coalition

provisoire irakienne à Najaf. Le Washington Post avait affirmé à

l'époque que la défense du bâtiment avait été assurée par des

hommes de Blackwater et qu'au plus fort de la bataille, les

mercenaires s'étaient fait ravitailler en munitions par trois de leurs

propres hélicoptères, s'attirant les félicitations publiques du général

en charge des opérations de sécurité en Irak, alors que les

mercenaires ne font traditionnellement pas partie de la chaîne de

commandement de l'armée américaine.

Depuis lors Blackwater est devenu le supplétif indispensable de

l'armée américaine, Armée fantôme, Blackwater est une

multinationale prospère, fonctionnant en toute opacité.

En quelques années, la firme passe d'une poignée d'employés à 2

300 personnes déployées dans neuf pays, et développe une base

de donnée de 21 000 candidats: anciens militaires américains et

soldats étrangers, tous alléchés par l'idée d'empocher quatre à dix

fois leur solde, avec moins de contraintes. Les revenus bondissent

de quelques millions de dollars à plus d'un milliard – uniquement

grâce à des contrats avec le gouvernement des États-Unis.

En tête du hit parade des « PMC » (private military contractors),

Blackwater ne rend en effet aucun compte au public. Ses contrats

sont classés secret défense et ses opérations sur le terrain se

déroulent dans une discrétion absolue.

Les hommes de terrain sont fournis par diverses agences privées

notamment DSL (Defence Systems Limited). Fondée par Allistair

Morisson, un ancien de la SAS (special air services), les troupes

d'élite de l'armée de l'air britannique, DSL dispose d'une armée

privée de vingt mille hommes et se présente comme l'une des plus

grandes compagnies militaires privées.

Rachetée en 1997 par Armor Holdings Inc, DSL assure la fourniture

de la gamme de services allant de la répression des émeutes (gaz

lacrymogènes, matraques, véhicules blindés, gilets pare-balles) à la

protection à distance des personnalités (système d'alerte,

limousines blindées). En France, Armor-DSL est propriétaire de la

société Labbé, spécialiste de la construction des fourgons blindés

utilisés par le convoyeur de fond «Brinks».

Armor-DSL s'est rendue célèbre dans ses interventions en Angola

aux côtés du chef sécessionniste Jonas Savimbi, président de

l'UNITA, ainsi qu'en Colombie contre les narco-trafiquants. Elle

dispose de dix centres régionaux d'opération à Londres,

Washington, Bogota, Johannesbourg, Moscou, Hong Kong ainsi qu'à

Harare (Zimbabwe) et au Bahreïn.

Le recrutement se fait aussi par Internet, au su et au vu de tout le

monde. Le tarif est variable selon l'importance de la cible potentielle:

Six mille dollars par mois pour un garde du corps chargé de la

protection rapprochée des hommes d'affaires, entrepreneurs, en

quête de richesse et de gloire (BG/CP body guard close protection),

huit mille dollars pour la protection d'une personnalité importante.

Les recrues proviennent des pays réputés pour la rudesse de leur

formation militaire: Afrique du sud, Ukraine, Russie, Anglais,

Américains, les ressortissants d'Amérique latine, notamment des

Chiliens ainsi que des Népalais qui ont une longue tradition de

mercenariat, qu'on se rappelle les fameux gurkhas de l'Empire

britannique – et pour leur teint davantage en harmonie avec les

caractéristiques du type arabe, ainsi que naturellement, les

ressortissants du Moyen-Orient et de l'ensemble arabe pour des

taches d'interprétariat et de décryptage d'informations.

Une répartition des tâches semble s'être opérée entre les firmes

américaines et britanniques. Si les Anglais sont présents dans leur

ancienne zone d'influence, notamment les émirats pétroliers du

Golfe, l'Amérique a la haute main sur l'Arabie Saoudite et le reste du

Moyen-Orient.

Outre Defense Systeme Ltd, la Grande-Bretagne dispose d’une

deuxième compagnie privée de mercenariat, «Watchguard», dont le

siège est à Guernesey, îles britanniques. Fondée en 1967 par David

Sterling, un ancien des commandos de l'air britanniques (Special Air

Services), Watchguard passe pour être un instrument d’influence

de la diplomatie britannique.

A son palmarès figurent la protection de Cheikh Zayed Ben Sultan

Al-Nahyane, Cheikh d'Abou Dhabi et président de la Fédération des

Émirats du Golfe, ainsi que l'encadrement des troupes omanaises

dans la répression de la guérilla marxiste du Dhofar, dans les

années 1965-1970.

Outre Blackwater, les États-Unis comptent, eux, deux grandes

sociétés privées militaires: Vinnell Corp, dont le siège est à Fairfax,

en Virginie, et BDM international. Toutes deux filiales de la

multinationale Carlyle, elles apparaissent comme les bras armés

privilégiés de la politique américaine en Arabie et dans le Golfe.

Vinnel corp, dont la mission saoudienne a fait l'objet d'un attentat à

Khobbar en 1995, a la haute main sur la formation de la Garde

nationale saoudienne, tandis que BDM gère la formation du

personnel de l'armée de l'air, de la marine et des forces terrestres

saoudiennes.

L'establishment militaire américain ne se cache d'ailleurs pas des

liens qu'il entretient avec le mercenariat privé: ainsi le groupe Carlyle

est dirigé par Franck Carlucci, ancien directeur adjoint de la CIA et

ancien assistant de Caspar Weinberger, secrétaire à la Défense

dans l'administration Reagan, alors que John Deutsch, ancien

directeur de la CIA, est membre du conseil d'administration de CMS

Energy Corporation, firme chargée de la protection des installations

énergétiques (pétrole, nucléaire, électricité).

Le lien le plus manifeste de la collaboration entre le mercenariat

privé et le Pentagone est l'existence de MPRI (Military Professionnal

Resources Incorporated), le plus grand groupe d'expertise militaire

dans le monde. Son fichier dispose de deux mille noms d’officiers

du Pentagone, utiles tant pour le lobbying que pour l'expertise.

La France a adopté un profil bas depuis la disparition de Bob Denard,

le célèbre baroudeur africain et ses déboires français tant en Irak

que sur le continent noir. En l'absence d'un chef charismatique

capable de fédérer des soldats aussi récalcitrants à la discipline, elle

a opéré une modeste percée en Irak à l'aide d'une petite structure

«EARTHWIND HOLDING CORPORATION». Première et unique société

militaire privée francophone opérationnelle dans le monde,

EARTHWIND Holding dispose de 30 à 40 anciens militaires et policiers

français en Irak pour la sous-traitance des missions auparavant

imparties aux officiers anglophones.

La France dispose en outre d'une structure paritaire, la DCI (Defense

Compagnie internationale), dont l'État français possède 50 pour cent

du capital et le reste est réparti entre les industries françaises de

l'armement (Thales, Dassault etc..) avec une structure pour chaque

discipline. La Cofras (Compagnie française d'assistance spécialisée),

pour l'armée de terre, Navco, pour la marine, Airco pour l'armée de

l'air. Au capital de 21,3 millions d'euros et 1200 employés, Defense

compagnie internationale (DCI) a eu en charge la formation des

servants saoudiens du contrat Sawari, de fourniture du matériel

militaire français à l'Arabie Saoudite.

Le panorama du mercenariat international serait incomplet si l'on

omettait de faire figurer l'Afrique du sud et Israël, les anciens

partenaires de la période coloniale: Les anciens officiers et militaires

de race blanche du temps de l'apartheid, déçus par la tournure

politique prise par leur pays gouverné désormais par la majorité

noire, se sont lancés dans un rôle de super-gendarmes privés du

continent noir, faisant de la firme sud-afriaine «EXECUTIVE

OUTCOMES» la forme la plus achevée du mercenariat moderne.

Fort d'un vivier permanent de 2.000 hommes solidement formés et

encadrés, «Executive outcomes» passe contrat «guerre clefs en

main» prenant en charge la formation et l'équipement des forces

locales, leur ravitaillement, ainsi que la riposte militaire en cas de

revers militaire de manière à assurer la victoire au cocontractant. Ses

titres de gloire sont respectivement le Sierra Leone ou en

coopération avec les forces britanniques elle a évincé le président

Charles Taylor, ainsi qu'en Angola, où elle a contribué à la

consolidation du régime Dos Santos, s'incrustant au passage dans le

trafic des pierres précieuses.

Israël, enfin, dispose de LEV-DAN, filiale de Kardan Investment, firme

spécialisée dans le commerce du diamant en Angola et au Zaïre, qui

lui sert d'ailleurs de couverture dans ces deux pays, véritable plaque

tournante de la contrebande internationale des pierres précieuses.

Lev-Dav a aidé l'ancien président congolais Pascal Lissouba dans sa

bataille pour le contrôle de Brazzaville contre son rival Sassou

Nguesso à la fin des années 1990. Fondée par le général Zeev

Zakron, Lev DAN a mis sur pied la milice de l'officier libanais dissident

Saad Haddad, à qui elle a confié le contrôle de la zone de sécurité

durant la guerre civile libanaise (1975-1990).

Lev-Dan agit de concert avec le Shin Beth, les services de

renseignements israéliens, et, s'agissant du Moyen-Orient, en

coordination avec le bureau des «minorités périphériques», le

vocable par lequel les services israéliens désignent les

ressortissants des pays arabes qu'ils croient susceptibles de

collaborer avec eux, comme ce fut le cas lors de la guerre du Liban

avec les Forces Libanaises (1975-2000), et comme c'est le cas dans

la nouvelle guerre d' Irak avec les supplétifs kurdes de l'armée

américaine et d'anciens des « Forces Libanaises» (miliciens chrétiens

libanais, jadis dirigés par l'un des chefs de la coalition pro-américaine

libanaise Samir Geagea) recyclés dans des sociétés militaires privées

tant américaines qu'israéliennes

.

En Irak, selon des informations de la chaîne britannique BBC 2, des

instructeurs israéliens formeraient des soldats kurdes. Le magazine

Newsnight du 19 septembre 2006 avait présenté des images

exclusives de vastes installations et de ces entraînements. Interop

et Colosseum, deux sociétés israéliennes de mercenariat serviraient

de couverture à cette activité de l'armée israélienne. Les officiers

transiteraient par Djibouti pour masquer leur origine.

Les Israéliens auraient pris la succession de sociétés américains de

mercenariat, déjà présentes au Kurdistan irakien depuis la création

de la zone de non-survol, à l'issue de l'opération Tempête du désert,

en 1991. La présence d'instructeurs israéliens en Irak avait été

révélée, il y a plus d'un an, par la presse israélienne elle-même, mais

les détails de cette opération n'étaient pas connus.

Les néo-conservateurs entendent créer un Kurdistan indépendant

en faisant exploser l'Irak et en amputant à la fois la Turquie et la

Syrie.

Ce projet nécessite la création d'une armée kurde. Constituée par

d'anciens peshmergas, les maquisards kurdes, l'armée du Kurdistan

a dejà été sollicitée pour des opérations de maintien de l'ordre à

Bagdad au cours du premier semestre de 2007 dans le cadre du plan

de sécurisation de la capitale irakienne, suscitant en représailles de

sanglants attentats dans le nord kurdophone de l'Irak.

La privatisation de la violence et sa marchandisation via des sociétés

militaires privées est un secteur en plein essor industrie en plein

essor générant un bénéfice annuel de plus de cent milliards de

dollars (2).

A lui seul le gouvernement américain aurait dépensé en moins d'une

décennie (la période 1994-2002) quelque 300 milliards de dollars

auprès de telles sociétés présentes dans une trentaine de pays,

principalement dans le monde arabe et l'Afrique. Recrutés souvent

dans les cercles xénophobes de l'extrême-droite fascisante, ces

«chiens de guerre» dont l'honorabilité est recyclée dans le

professionnalisme des sociétés militaires privées et dans la défense

des «valeurs de l'Occident» apparaissent à bien des égards comme

les gardiens de l'ordre économique, l'expression moderne de

l'impérialisme, l'instrument le plus efficace de la perpétuation du joug

colonial.

Fin 2007, l'Irak aura coûté aux États-Unis 500 milliards de dollars

(378 mds d'euros) et le montant total pourrait atteindre voire

dépasser les 1.000 milliards (600 mds d'euros). Ni la Corée ni le

Vietnam n'avaient coûté autant, alors que la guerre du Vietnam

(1960-1975) avait duré quinze ans et que le corps expéditionnaire

américain s'élevait à cinq cent mille soldats (3). Si la guerre d'Irak

devait se prolonger, ce qui est probable, elle aura coûté davantage

que la Seconde Guerre mondiale (1940-1945), la plus chère à ce jour

(2.000 mds dollars en dollars constants/1.500 mds d'euros).

L'enrôlement massif de mercenaires, l'appât du gain, l'ivresse de

l'aventure militaire hors norme, les sanctions économiques infligées à

la Syrie pour la contraindre à freiner les infiltrations des djihadistes ,

les pressions sur l'Iran, suffiront-ils pour assurer la victoire d'une

armée perçue comme occupante même par l'un des meilleurs alliés

des États-Unis dans le monde arabe, le Roi Abdallah d'Arabie? Et

celle d'un pays à la dérive de ses principes moraux?

Notes

1)-Blackwater de Thomas d'EVRY, journal Libération 8 mai 2007

rubriques «grands angles»

2) « La privatisation de la violence: mercenaires et sociétés militaires

privées au service du marché» par Xavier Renou en collaboration

avec Philippe Chapleau, Wayne Madsen et François-Xavier

Verschave. Eddditions Agone (collection Dossiers noirs, 4ème

trimestre 2005

3) "The Price of Liberty: Paying for America Wars" ("Le Prix de la

liberté : le coût des guerres de 'Amérique") par Robert Hormats, haut

responsable de la banque 'affaires Goldman Sachs.

René Naba est notamment l'auteur des ouvrages suivants:

-"Aux origines de la tragédie arabe"- (Editions Bachari-Juin 2006)

-Du Bougnoule au sauvageon, voyage dans l'imaginaire français

(L'Harmattan-2002)

-Rafic Hariri, un homme d'affaires, premier ministre

(L'Harmattan-2000)-«Guerre des Ondes – Guerre des Religions… La

bataille hertzienne dans le ciel méditerranéen» (L'Harmattan ‘Juin

1998), qui se présente comme le premier ouvrage de langue

française en matière de géostratégie de la communication dans la

sphère méditerranéenne.

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