Anne Löwenthal: “Un combat pour leur vie”

L’Afghanistan est un des pays les plus instables depuis les frappes de l’OTAN en 2001. Plusieurs Afghans se sont réfugiés en Belgique pour trouver un asile. Ce qui n’est pas du goût de Maggie De Block, secrétaire d’Etat à l’Asile et à la Migration qui veut mener d’une main de fer une politique d’expulsion. Plus de 250 Afghans qui occupaient l’église du Béguinage depuis un mois ont quitté Bruxelles vendredi matin pour faire « leur marche » et sensibiliser le plat pays sur leur situation délicate. Cette initiative est l’œuvre du collectif des Afghans représenté par Anne Löwenthal. Alohanews est allé à sa rencontre.

Pouvez-vous vous présenter auprès des lecteurs qui ne vous connaissent pas encore ?

Je m’appelle Anne Löwenthal. Je suis une citoyenne et militante de gauche. Je suis aussi une bloggeuse et activiste de terrain. J’ai participé à plusieurs actions en Belgique.

 

Vous faites partie du collectif des Afghans. Pouvez-vous nous expliquer pourquoi ce collectif a-t-il vu le jour ?

En effet, je fais partie des personnes qui soutiennent les Afghans. Celui qui coordonne ce collectif est Oscar Flores.  Le collectif a vu le jour depuis peu. En effet, plus de 450 Afghans ont été débouté de leur droit d’asile ou sont en cours de demande d’asile. Ces derniers ont décidé de se coaliser et de se politiser pour revendiquer leur droit de rester en Belgique, du moins le temps d’un moratoire. La sécurité en Afghanistan est selon Maggie De Block assurée dans certaines zones alors que selon le Ministre des affaires étrangères pas du tout. Il n’y a aucune cohérence entre les pouvoirs publics. Ce que le collectif réclame, c’est que l’on aille vraiment enquêter sur place pour rendre compte de la situation.

 

Nous avons pu voir que la question des réfugiés afghans a défrayé la chronique à Bruxelles. Le Bourgmestre de la commune de Saint-Josse, Emir Kir, s’est illustré en expulsant des réfugiés afghans de l’ancien couvent du Gesù. L’avocate Selma Benkhalifa, spécialisée  dans les droits des étrangers, s’est faite écrouer avec plus de 158 afghans tout en subissant des violences policières. Quel regard portez-vous sur ces incidents ?

Je suis profondément choquée. J’estime que lorsqu’on est dirigeant d’un régime démocratique qui a souffert de la guerre et qui honore les héros des guerres passées, on se doit de porter refuge à des personnes qui fuient la guerre. La Belgique prétend qu’elle n’a pas les moyens d’accueillir ces réfugiés. La Belgique est un pays riche et qui a donc largement les moyens de les recevoir.

 

Maggie De Block, secrétaire d’Etat à l’Asile et à la Migration a déclaré que « rien n’a été promis à ces personnes ». Elle a même ajouté  que « les grèves de la faim ne donnent pas plus de droits et je ne changerai pas mon opinion ». Comment qualifiez-vous ses propos ?

Ses propos sont cyniques et inhumains ! Il est vrai qu’une grève de la faim n’octroie pas plus de droits. Cependant, c’est un des seuls moyens pour qu’ils fassent entendre leurs voix. Ils réclament un droit élémentaire et un droit souverain à savoir le droit à la vie et le droit d’être libre.

 

L’Afghanistan est sous instabilité politique. Le droit international va dans le sens de la non-expulsion des réfugiés afghans. Sur quelle base, en matière d’immigration, les pouvoirs publics belges ne respectent pas le droit d’asile ?

Certains politiques prétendent que certaines zones en Afghanistan sont hors de danger. On pourrait donc renvoyer des personnes car elles ne risqueraient pas leurs vies là-bas. Même si elles ne risquaient pas leurs vies en Afghanistan, il se fait que les femmes sont toujours brimées en Afghanistan. Les petites filles ne peuvent pas aller à l’école. Rien que ces faits nous indiquent qu’il est dangereux de vivre là-bas pour certaines catégories de la société. Maggie De Block se base sur des théories qui ne sont pas vérifiées à savoir la sécurité en Afghanistan.

 

Cette « marche » symbolique a été soutenue par  Nadir Aït Ben Yadir, le réalisateur du film du même nom. Comment s’est-elle articulée concrètement ?

Les Afghans sont des militants. C’est surtout cela qui dérange à mon avis notre pays. Il faut savoir aussi que la Belgique leur refuse l’asile mais ne peut pas les renvoyer en Afghanistan. En effet, l’Afghanistan refuse d’accueillir des Afghans qui seraient renvoyés de force.  Nos pouvoirs publics font en sorte de laisser les réfugiés à la rue sans assistance afin qu’ils signent un retour volontaire dans leur pays. La politique belge envers les Afghans est hypocrite.

 

Ils ont donc décidé d’organiser une marche. Puisque les autorités ne viennent pas à eux, ils viennent vers elles. Ils ont décidé de faire une marche de Bruxelles jusqu’à Mons en passant par La Louvière où ils logeront sur place. Ils ont choisi de finir sur Mons car symboliquement, c’est la ville du premier ministre, Elio Di Rupo. Dans chaque ville où ils sont passés, ils ont rencontré des autorités compétentes qui les ont reçues.

 

Qu’attendent-ils  de la rencontre avec le premier ministre, Elio Di Rupo ?

Ils attendent que ce gouvernement prenne ses responsabilités et arrête de se reposer seulement sur Maggie De Block. Ils demandent aussi que ce Gouvernement accepte un moratoire  sur les expulsions.

 

Quelles initiatives prendra le collectif si leurs revendications ne venaient pas à être entendues ?

Ils continueront à manifester jusqu’à ce qu’ils soient entendus. Ils retourneront au Béguinage. Ils continueront leur combat inlassablement. C’est un combat pour leur vie.

 

Propos recueillis par Mouâd Salhi

 

Source: Alohanews

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