Rencontre avec deux victimes des violences anti-Maduro

 

De passage à Genève, une délégation vénézuelienne est venue expliquer aux responsables de l’ONU leur version des incidents survenus ces derniers mois dans leur pays. Et le moins que l’on puisse dire, c’est qu’elle ne correspond pas exactement à la version diffusée par les médias dominants. Nous avons rencontré Zoraida Bravo et Oscar Carrero, deux victimes des violences de cette opposition vénézuélienne présentée sous un jour pacifiste et démocratique.


 

Je m’appelle Zoraida Bravo. Je suis la mère de Ramzor Bracho Bravo, capitaine de la Garde Nationale Bolivarienne (GNB) assassiné le 12 mars 2014. Il fut victime d’une attaque de manifestants violents à Valencia. Voici comment les faits se sont déroulés. Ramzor reçoit d’abord un signalement concernant des manifestants qui veulent “mettre le feu à une station-service”. Quand mon fils est arrivé sur place à bord d’un petit blindé, les manifestants étaient embusqués. C’était un piège.  Ils ont d’abord blessé un sergent. Mon fils a tenté de le secourir. Il a été la cible de coups de feu. Une balle lui a traversé le coeur et le poumon droit. Il est mort sur le coup.

Voici la rue où le crime s’est produit (elle me tend quelques photos du crime). C’est à Manongo, un quartier de la ville de Valence. C’est depuis cette maison qu’on lui a tiré dessus. Il est mort au pied d’une grille. Le sergent est le seul blessé et mon fils est le seul mort de l’attaque. Le ministère public appuyé par la garde nationale bolivarienne ainsi que le CICPC (Corps d’enquêtes scientifiques, pénales et criminelles) ont mené une descente dans la maison.

On y a trouvé des armes, des grenades, des fusils et des ballles. Cette maison était visiblement une planque abritant des fugitifs et une cache d’armes. Plusieurs personnes ont été arrêtées. Certains ont révélé le nom de leur chef, Antonios Vathiotis, un citoyen italien surnommé “Le Grec”. Il a été détenu au Vénézuela en 1994 pour trafic d’armes. Deux autres personnes ont été inculpées: Juan David Poletti et Antonio Garbi Gonzalez.

Ils sont poursuivis pour homicide. Mais ces criminels se considèrent comme des prisonniers politiques.
Les quatre autres suspects (Fernandez Abella, Jose Luis Abella Villar, Luis Cifuente et Antonios Vathiotis) n’ont jamais été retrouvés.

Nous espérons avoir plus de compréhension de la part de Tarek William Saab, le nouveau procureur.
Auparavant, il a été défenseur du peuple (haut-fonctionnaire chargé de faire respecter les droits de l’homme). Il nous a toujours aidé. En revanche, le procureur précédent m’a menacé d’arrestation parce que je faisais des recherches de mon côté.

 

Quelle est votre opinion sur l’opposition qui s’est révolté ces derniers mois ?

 

J’ai un autre fils du nom de Roberto Ruiz Bravo. Il y a quelques mois, il a été pris pour cible en allant au travail. Un couvre-feu a été décrété par l’opposition pour empêcher les gens de sortir. Comme il travaille pour le gouvernement et qu’il porte un T-Shirt rouge, il a été littéralement lynché. Il n’aurait jamais imaginé que les manifestants l’attaqueraient à 6h du matin.

Sur le moment, les seules personnes qui vinrent le sauver étaient des membres de la Garde Nationale Bolivarienne. Il a été brûlé à la jambe par un cocktail Molotov. Ils également été blessé au dos à coups de pierre. Roberto a été blessé suite à la convocation de la Table pour l’Unité démocratique (MUD).
Mais heureusement, suite aux élections de l’Assemblée nationale constituante, tout s’est calmé et nous pouvons dialoguer pour régler nos différends.

 

Quelles sont vos difficultés au quotidien?

 

Le problème que nous rencontrons actuellement c’est la nourriture. Pour trouver une solution au blocus imposé au Vénézuela, le pays importe ses aliments depuis le Mexique ou le Brésil. Avant, la nourriture venait surtout de Colombie mais désormais, la quantité de denrées venant de là-bas a baissé.
Le gouvernement a versé des dollars à des taux préférentiels aux entreprises pour qu’elles puissent produire au Vénézuela. Mais ces entreprises ont pris cet argent sans rien produire en échange.

Lorenzo Mendosa, PDG de la Polar, entreprise agro-alimentaire la plus grande du Venezuela, connue pour sa production de bière, a déclaré qu’il allait dialoguer avec le gouvernement pour arriver à un accord de production. Il a baissé la production de la nourriture pour faire pression sur le gouvernement. En fait, lui et d’autres patrons vénézuéliens ont organisé la famine pour monter le peuple contre l’Etat.

Pendant les manifs, Lorenzo Mendoza observait le silence. Maintenant que les manifestations de l’opposition se sont calmées, il veut négocier avec le gouvernement pour ajuster les prix de la nourriture.
C’est là où l’on se rend compte de la nature de cette opposition prête à affamer le peuple et à le tuer en fomentant des révoltes.

 

 Pourriez-vous me dire comment vous avez vécu les manifestations anti-Maduro?

 

Oscar Carrero : Je viens de San Cristobal, Etat de Tachira. Je suis une victime directe des convocations violentes faites en 2014.

Cet appel de l’opposition de Leopoldo Lopez, Daniel Ceballos, Maria-Corina Machado, et d’Antonio Ledezma. Ce sont les chefs de la « Salida », la sortie. Leur objectif était de tout faire pour provoquer la chute du président Maduro.

Il y eut 43 victimes et 878 blessés. Beaucoup de blessés souffrent d’incapacités. Plusieurs de victimes sont dans ma situation (il montre son bras amputé de la main). Ces personnes de l’opposition font le tour du monde en racontant que les 43 victimes étaient des étudiants pacifiques.

Parmi eux, il y a pourtant 9 fonctionnaires de la Garde Nationale Bolivarienne. Sans compter les membres de la police nationale tués, un magistrat et aussi de simples passants. Le nombre d’étudiants tués était de 5.

Nous, victimes directes et indirectes, avons formé le groupe « Comité des victimes des Guarimbas ». Guarimbas est le nom donné aux barricades dressées par l’opposition. Les manifestants anti-gouvernementaux coupaient des arbres, mettaient le feu, retiraient les bouches d’égouts.
Ils mettaient des fils barbelés voire des fils transparents à hauteur d’homme attachés à des poteaux pour décapiter les motards. Elvis Duran a été ainsi décapité le 22 février 2014 en rentrant de son travail.

Mon tour est venu le lendemain. Je conduisais un camion rempli de médicaments.  Pendant que je cherchais des voies alternatives pour éviter les barricades, des manifestants m’ont barré la route et se sont mis à pousser mon camion. Pour paralyser la circulation, ils ont mis des clous et de l’huile. Ce procédé était criminel car avec la vitesse, lorsque les pneus crèvent, le véhicule se retourne.
Mon tort était de conduire un camion portant l’inscription « utilisation officielle ». Les manifestants criaient : « Tuez-le. Il est chaviste. »

Ils m’ont jeté des pierres et puis surtout la « papitala », la « petite pomme de terre ». C’est un explosif composé de C4, de clous cassés et des billes en plomb. Ils m’ont lancé un projectile au visage. Je me suis protégé de la main puis… la douleur me fit perdre connaissance.

Quand je me suis réveillé, je n’avais plus ma main droite. Je suis un blessé parmi 878 autres blessés, victimes des manifestations de 2014. J’étais un simple travailleur. Je n’appartiens à aucun parti. Les médias internationaux ne se sont jamais intéressés à notre cas.

 

Y a-t-il selon vous  une différence entre les manifestations de 2014 et 2017?

 

En 2017, l’opposition at répété ces actes de vandalisme avec plus de sauvagerie. Des gens ont été brûlés vifs. Ces messieurs de l’opposition qui ont appelé à la violence en 2017 sont les mêmes que ceux qui ont appelé à la violence 2014 en tant que députés élus à l’assemblée nationale. Cette année, il y a eu 121 morts et plus de 3000 blessés. Parmi les morts et les  blessés, il y a des fonctionnaires de la garde bolivarienne et de la police nationale. Mais encore une fois, pour les médias occidentaux, certaines victimes sont moins intéressantes que d’autres.

 

Source : Investig’Action

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