Colombie : montages judiciaires contre les dirigeants sociaux

Tandis que les assassinats de dirigeants sociaux et paysans continuent dans le pays, la justice et le Gouvernement continuent à nier le systématisme de ces faits. Cependant, on s’en prend encore à des dirigeants sociaux et à des défenseurs des droits de l’homme en les accusant d’être dans les réseaux de soutien et de collaboration de la guérilla de l’ELN.

 

Pendant ces dernières années, les montages judiciaires contre des dirigeants sociaux ont été récurrents. Des cas comme celui d’ Huber Ballesteros, de Miguel Ángel Beltrán, de Feliciano Valencia, de Liliany Obando, de Carlos Velandia et maintenant du représentant de Voix de Paix Francisco Toloza sont des exemples de la persécution de l’Etat contre la pensée critique.

Etant donné ce qui s’est passé le 22 mars, le plan de persécution de la Sijin et de la Justice est évident. Plusieurs dirigeants sociaux et défenseurs des droits de l’homme ont été arrêtés dans la région du sud de Bolívar et de Magdalena Medio. Ensuite a été arrêtée dans la matinée Milena Quiroz, une dirigeante du Congrès des Peuples qui est la porte-parole du Sommet Agraire, Ethnique et Populaire. De même, au forum sur la participation politique qui se déroulait à Barrancabermeja, on a tenté de capturer Arisolina Quintero, dirigeante des communautés du sud de Bolívar et du Cesar qui fait aussi partie du Congrès des Peuples.

Les participants à ce forum ont dénoncé que la Sijin s’est présentée en demandant des listes des assistants et en intimidant ceux qui s’y opposaient. Andrés Gil, porte-parole de Marche Patriotique a déclaré à ce sujet « qu’être dirigeant social ou dirigeante sociale Colombie est ou un délit ou une condamnation à mort. » Il a ajouté qu’une offensive judiciaire est en marche contre les dirigeants sociaux.

A ce sujet, plusieurs plateformes politiques, organisations sociales, organisations de défenseurs des droits de l’homme, aussi bien nationales qu’internationales, ont manifesté leur désaccord et leur inquiétude face à la menace contre les dirigeants sociaux qui maintenant ne s’occupent plus seulement des ennemis de la paix et du para-militarisme mais aussi de l’Etat qui les persécute et les stigmatise.

Dans l’Accord de Paix entre le Gouvernement et les FARC–EP, un accord qui est celui de tous les Colombiens, au paragraphe 2.1, on parle des droits et des garanties pour les mouvements sociaux et les organisations sociales. Cependant, l’Etat continue à ne pas le respecter et à persécuter le mouvement social en le traitant comme son adversaire. Etant donné ces faits, il faut demander jusqu’à quand la doctrine de sécurité nationale continuera à dominer l’action de la Police et de l’Armée. Quand la justice jugera-t-elle en faveur de la paix ?

 

Des travailleurs d’INCAUCA seraient responsables de l’assassinat d’un membre d’une communauté indigène

 

Selon le Conseil Régional Indigène du Cauca, CRIC, vers 1h30 du soir, ce 22 mars, Javier Oteca, un membre d’une communauté indigène qui participait à la Réunion pour la Libération de la Terre Mère dans la plantation “Miraflores” à Corinto, Cauca, aurait été assassiné par des membres de la sécurité de la raffinerie de sucre INCAUCA.

Le gouverneur Jorge Ticue a signalé que bien que l’identité de l’auteur direct des tirs n’ait pas été établie, la réaction de la garde indigène a pu retenir 2 des travailleurs qui se trouvaient sur le lieu des tirs à ce moment-là. En plus, la police aurait capturé également 2 membres de la sécurité d’INCAUCA qui auraient tiré sur les membres des communautés.

Ensuite, on a pu établir que les communautés indigènes ont laissé en liberté les travailleurs capturés pour que les autorités judiciaires fassent les investigations pertinentes.

Selon le gouverneur indigène, le processus de Libération de la Terre Mère se déroule dans une toute petite partie de la plantation qui fait plus de 600 ha, tous exploités par la raffinerie en question.

De plus, cette sorte d’affrontement pourrait être évitée si le Gouvernement mettait en œuvre l’assignation des terres promises aux indigènes dans le processus d’indemnisation du massacre du Nilo.

Pour ces faits, les communautés indigènes ont exigé du Procureur de la République, du Bureau du Procureur et du Défenseur du Peuple que les investigations soient faites avec diligence et qu’on sanctionne les responsables pour que ce genre de chose ne se renouvelle pas et elles ont demandé la solidarité des organisations internationales pour qu’elles se prononcent en faveur de la justice et de la terre.

 

Le processus de Libération de la Terre Mère à Cauca

 

Il se déroule depuis la fin février 2015 dans 3 endroits de la région du nord de Cauca. Seulement dans les premières semaines, c’est à dire au mois de mars de la même année, il y a eu au moins 152 indigènes blessés à cause de l’action de l’ESMAD.

Les terres réclamées par les indigènes dans les municipalités de Corinto, Miranda y Santander de Quilichao atteignent 6 500 ha que le Gouvernement a loués aux raffineries de Cauca et sur lesquelles lesquels ? : ces 6500 ha ou toutes les terres réclamées ? le ministre de l’agriculture lui-même, qui ne s’est pas prononcé sur la réclamation des indigènes, a des intérêts.

 

La version de l’entreprise

 

Selon ce que l’entreprise a déclaré à RCN la mort du membre de la communauté a eu lieu après que les indigènes aient attaqué un groupe de travailleurs qui faisaient de la maintenance.

« Un moment après a explosé ce qui aurait pu être une autre bombe artisanale dans le groupe des attaquants et il semblerait qu’un des membres du groupe d’envahisseurs soit mort suite à l’explosion, » signale la note publiée dans ce média.

 

Le communiqué du CRIC :

 

« Vers les 1h40 de l’après-midi, ce 22 mars, Javier Oteca a été assassiné, à l’un des points de Libération de la Terre Mère à Corinto, appartenant au territoire ancestral de Santa Elena. Cela s’est passé sur la plantation de Miraflores et a été perpétré par du personnel des raffineries de sucre de cet endroit, à quelques mètres de l’armée et de la police nationale.

Dans toutes les réunions et les travaux de la communauté depuis que ce processus de libération de la Terre Mère a commencé, il y a eu des agressions de la part du personnel des plantations envers les libérateurs ainsi que des attaques des forces publiques qui, souvent, ont agressé les libérateurs, détruit leurs cultures, leurs chaumières, leur ont tiré dessus sans distinction et à présent les assassinent.

Javier Oteca a été l’un de ceux qui ont le plus persisté dans le processus de libération de la Terre Mère depuis 2014 quand le processus a débuté par manque de terres. Et à cause du non respect du Gouvernement National qui n’a pas voulu trouver de solution au problème des terres. Depuis ce moment-là, Javier Oteca a été un homme qui motivait et se préoccupait du groupe qu’il dirigeait. Mais aujourd’hui, au cours de cette manifestation, il a été assassiné et à présent, il repose au sein de la terre mère.

 

Pour cette raison nous exigeons :

 

Du Procureur de la République et du Défenseur du Peuple qu’ils enquêtent sur cet assassinat avec diligence, déterminent les responsables matériels et intellectuels de ce fait et les sanctionnent énergiquement pour que cela ne reste pas impuni comme cela s’est passé dans beaucoup de cas concernant le mouvement indigène.

Des Organismes Nationaux et Internationaux de défense des Droits de l’Homme :

Face à cet événement regrettable, les autorités du Conseil Régional Indigène de Cauca-CRIC lancent un appel au Défenseur du Peuple et au Haut Commissaire aux Droits de l’Homme, à l’OEA et aux autres organismes nationaux et internationaux qui défendent les droits de l’homme à se prononcer sur ces violences qui touchent les membres des communautés indigènes du Nord de Cauca dans les activités de libération de la Terre Mère.

L’assassinat d’un camarade indigène qui, pour défendre les droits collectifs du peuple Nasa a dû supporter les conséquences qui endeuillent le mouvement indigène, provoque l’indignation. Pour cette raison, nous, le Conseil Régional Indigène de Cauca, condamnons l’assassinat du camarade Javier Oteca et présentons nos plus sincères condoléances à sa famille et à son organisation. »

 

traduction Françoise Lopez pour Bolivar Infos

Source en espagnol : Resumen Latino

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