Venezuela : l’histoire tend-elle à se répéter ?

Le 22 avril 2002 au matin, l’ambassadeur des Etats-Unis Shapiro a légitimé le coup d’Etat en cours en déclarant que « le Venezuela est en dehors de la charte démocratique de l’OEA » et la Commission interaméricaine est restée les bras croisés devant l’enlèvement du président légitime et a qualifié d’ « éclairé » le gouvernement du dictateur. La CIDH répète-t-elle aujourd’hui cette ingérence quand elle exige la mise en liberté de délinquants arrêtés ; John McCain fait-il de même lorsqu’il clame que « les Etats-Unis doivent envoyer immédiatement des troupes au Venezuela. Nous devons garantir l’approvisionnement en pétrole » ?

 
Déjà vu : sensation que l’on a déjà vécu un instant, que des faits, des actes et des personnes se répètent, que l’imagination  ou la créativité s’épuisent.
Personne ne sait comment celui qui ne fait que copier le passé prétend inventer le futur.
 
Par exemple, au Venezuela, une fois de plus l’opposition essaye de ne pas reconnaître les résultats électoraux. Depuis 1998, elle l’a fait sans résultats pour 18 ou 19 consultations électorales incontestables.
 
« Maduro, va-t-en » crient les agitateurs violents. « Chavez, s’en va, s’en va » ont-ils crié durant plus de dix années. Pourquoi toute personne qui remporte les élections devrait-elle quitter le Venezuela ?
 
Le 22 avril 2002 au matin, l’ambassadeur des Etats-Unis Shapiro a légitimé le coup d’Etat en cours en déclarant que « le Venezuela est en dehors de la charte démocratique de l’OEA » et la Commission interaméricaine est restée les bras croisés devant l’enlèvement du président légitime et a qualifié d’ « éclairé » le gouvernement du dictateur. La CIDH répète-t-elle aujourd’hui cette ingérence quand elle exige la mise en liberté de délinquants arrêtés ; John McCain fait-il de même lorsqu’il clame que « les Etats-Unis doivent envoyer immédiatement des troupes au Venezuela. Nous devons garantir l’approvisionnement en pétrole » ?
 
La communicatrice de l’opposition Alicia de la Rotta écrit sur son blog : « Pourquoi l’un de ces politiques n’a-t-il pas eu le cran de saisir un mégaphone et de dire aux jeunes gens : « C’est bon, la manifestation est terminée, allons-nous en. Nous avons rempli une partie des objectifs. Non, messieurs, le politique en voyant qu’un groupe d’étudiants était parti en courant vers la Hoyada, a saisi la main de sa femme, il est parti et a laissé les mômes en effervescence. Cette fuite est-elle une copie de celle des leaders de l’opposition : Enrique Mendoza, Guaicaipuro Lameda, Carmona Estanga,  de celle  de tant d’autres qui, le 11 avril 2002, après avoir excité une foule contre Miraflores ont disparu, la laissant dans la ligne de mire des francs-tireurs qu’ils avaient postés là ?
Le 12 février 2014, des tueurs à gages professionnels, montés sur des motos de grosses cylindrées, portant des casques intégraux et puissamment armés tuent trois personnes et en blessent 66 autres (pour moitié, des agents des forces de l’ordre). Sont-ils une réplique ou non des francs-tireurs  qui ont décimé les manifestations du 11 avril 2002 ?
 
Des images de scènes de répression survenues en Argentine, en Egypte, en Lybie, en Syrie, en Catalogne, en Grèce, en Bulgarie, en Russie font le tour du monde avec des titres qui les falsifient disant qu’elles se passent au Venezuela. Cette fraude ne recycle-t-elle pas celle de cette fameuse vidéo de Venevision selon laquelle le 11 avril des citoyens tiraient sur des manifestants alors qu’en réalité ils se défendaient contre des francs-tireurs ?
 
Une semaine durant, les agitateurs violents assiègent Venezolana de television, jettent des pierres contre la façade, lancent des bombes incendiaires, et tirent sur une communicatrice.
 
Renouvellent-ils la fermeture de VTV par le putschiste Enrique Mendoza, la coupure de courant médiatique pendant le coup d’état de 2002, le téléthon putschiste qui a duré jusqu’en février 2003 ?
Mettre le feu à des ordures dans ton propre quartier de classe moyenne, y kidnapper tes propres voisins, jeter des détritus dans la rue sous la protection des autorités et de la police qui font partie de l’opposition, cela ne ressemble-t-il pas au courage physique et moral qui a conduit les protagonistes des blocages de rue de 2004 à l’échec le plus total ?
 
Ce dont la montagne accouche culmine le 18 février avec un petit rassemblement qui ne désintègre pas le gouvernement mais bien l’opposition : Lopez a fait tout un vacarme aux dépens de morts innocents et de blessés pour voler le premier plan à Capriles, lequel l’accuse de « donner de faux espoirs de changement grâce aux actions de rue ». Suivront-ils le chemin d’une consécration en apothéose et d’un oubli express que l’opposition réserve à ceux qui ne parviennent pas à lui donner le pouvoir instantanément : Frijolito Salas Rohmer, le dictateur Carmona, le philosophe du Zulia, Manuel Rosales, le roi des casinos, Carlos Ortega, le violeur Nixon Moreno, le coureur de jupons Pablo Perez ?
 
Dans les jours qui ont immédiatement suivi, à Carabobo, un coup de feu met fin à la vie d’une étudiante et mannequin. Un groupe violent prend d’assaut un local de PSUV et tire sur un socialiste. On saisit sur l’agresseur un pistolet coûteux muni d’un viseur laser ; à son domicile on trouve des clous, des explosifs, de l’essence et 2000 rations. Dans la ville de Guayana, des tueurs à gages tirent depuis des immeubles contre un rassemblement de socialistes et abattent cinq ouvriers. A Barquisimetro d’autres tueurs à gages assassinent un citoyen qui écarte des décombres pour ouvrir le passage à son véhicule. Des bandits armés incendient une cinquantaine de métro bus et brûlent des centrales électriques. Ce ne sont ni des armes ni des procédés habituels chez des étudiants. Revit-on l’épisode des quelques 150 paramilitaires qui préparaient en 2004  dans la juridiction du maire de Baruta, Capriles Radonski, le magnicide contre le président ? Démasque-t-on le paramilitarisme, comme je l’ai dénoncé il y a dix ans, dans son rôle d’acteur politique primordial au Venezuela ?
 
Des actions aussi nobles exigent des fondements idéologiques sonnants et trébuchants. Perez Pirela divulgue un enregistrement dans lequel des chefs d’entreprise font mention d’un fonds de 120 millions de bolivars pour payer des tueurs à gages pour attenter contre des biens et des vies. Est-ce un rappel des 50 millions de dollars que donnaient tous les ans la NED et d’autres organisations étrangères à l’opposition vénézuélienne, de façon désintéressée, vers 2010 ?
 
Le vacarme pas plus que les assassinats perpétrés par des tueurs à gages ne suffisent pour prendre le pouvoir, mais ils sont une invitation pour que des militaires et des troupes étrangères l’usurpent. L’opposition fasciste de 2014 reste gros Jean comme devant, tout comme en 2002, elle languit d’attendre les marines qui viendraient expulser le peuple du palais de Miraflores ?
Et si cette répétition triomphe, le passé se répètera-t-il ? L’analphabétisme, les procès-verbaux (de bureaux de vote) tueur de vote, les industries de base entre les mains des transnationales, les effondrements financiers du type Vendredi Noir et Crise Bancaire, les génocides du style Caracazo, la privatisation de la santé, de la sécurité sociale, de tout, reviendront-ils.  
Comment triompher en répétant les stratégies qui durant quinze ans ont irrémédiablement mené à l’échec ?
 
PD : le 22 février 2014, le secrétaire général de la néfaste Organisation des Etats Américains, Insulza, révèle sans ambages le plan d’intervention contre le Venezuela, en déclarant :  « Cependant, ceux qui doivent parvenir à cet accord ce sont les vénézuéliens, avant qu’il ne soit trop tard. Mais s’il n’y a plus confiance en personne, ni en aucune institution ou personne qui garantissent une position impartiale et non engagée, peut-être que le recours à des acteurs extérieurs, provenant de notre propre Amérique et désignés en commun, sont une alternative possible ». Peut-être que le recours à notre sortie de l’infâme « Ministère des Colonies des Etats-Unis » que tant de fois nous avons recommandé, est non seulement l’alternative possible, mais indispensable.


Traduit pour Investig'Action par Sylvie Carrasco

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