La Belgique, Oscar de la honte, grâce à l'Office des étrangers !

L’honneur de la Belgique à nouveau crucifié à Strasbourg. C’était le 24 janvier dernier : à l’unanimité, les juges de la Cour européenne des droits de l’homme ont condamné l’Etat belge pour des actes qualifiés d’inhumains et dégradants et pour détention arbitraire.

En cause : les agissements et la politique d’expulsion de l’Office des étrangers (O.E.) qui, depuis quelques années, se moque éperdument de la loi qu’il contourne sans vergogne et piétine les décisions de justice avec, il est vrai, l’assentiment tacite et même parfois exprès de son ministre de tutelle, le ministre de l’intérieur, actuellement l’Open VLD Dewael. Sans évoquer les flots de détresse, les déchirements, les vies brisées (celles d’enfants notamment) qu’il provoque quotidiennement dans l’anonymat, rappelons que l’O.E a déjà valu à la Belgique une première condamnation foudroyante pour les rafles des Tziganes qu’on avait attirés dans un traquenard en les convoquant pour « mettre en ordre leurs papiers ». C’était l’arrêt Conka. Il y eut un second arrêt cinglant pour la Belgique à propos la petite Tabita (5 ans) que l’O.E. avait fait capturer et enfermer lorsque, venant du Congo en vue de rejoindre sa maman au Canada, elle avait fait escale à Zaventem, et qui fut expulsée vers le Congo que sa maman avait fui. Croyez-vous que ces arrêts ont conduit le premier ministre, le ministre de l’intérieur ou le directeur de l’Office à exprimer un quelconque sentiment de honte ou le moindre regret ? Ou qu’il y a eu promesse de changer les choses ? Pas le moins du monde. Il y eut ensuite l’affaire de la petite Angelica (et de ses parents) à propos de qui le Président équatorien Raffael Correa a dit, à juste titre, que, si cela était arrivé à des enfants belges et à leurs parents en Amérique latine, on aurait hurlé à la barbarie…

L’Office des étrangers devrait s’appeler désormais « Office des expulsions ». Sa seule préoccupation est de « faire du chiffre » ! Par tous les moyens. En se moquant des décisions de justice. L’arrêt de la Cour de Strasbourg du 24 janvier prouve, si besoin était, que l’on n’est pas regardant sur les méthodes : deux jeunes Palestiniens, fuyant la guerre, l’oppression, la misère et les humiliations, débarquèrent à Zaventem, à la Noël 2002, venant de Beyrouth, et demandèrent l’asile. Direction immédiate : le Centre fermé 127. L’on s’empressa de rejeter leur demande d’asile mais ils firent appel et un tribunal ordonna leur remise en liberté. Qu’à cela ne tienne, l’O.E. ne les « libéra » que pour les confiner dans la zone de transit de l’aéroport, sans nourriture, ni hygiène. Drôle de conception de la liberté… Nouvelle décision judiciaire condamnant l’Etat, mais l’O.E. s’assoit dessus et, après un nouveau séjour en centre fermé, les fait embarquer dans un avion, retour Beyrouth, et, de là, sans doute, dans un camp de réfugiés, genre Sabrah ou Chatila. Le jeu de l’oie que leur a mitonné l’O.E. fut donc fort peu hospitalier : « prison (Centre fermé, mais c’est la même chose) – zone de transit – prison – expulsion – retour à la case départ »! S’ils voyaient la Belgique comme un pays de cocagne ou une terre d’accueil, leur désillusion fut vertigineuse.

A juste titre, les juges de la Cour des droits de l’homme n’y sont pas allés de mainmorte pour clouer au pilori les pratiques de l’O.E. et stigmatiser leur couverture par le gouvernement belge : ils parlent de détentions illégales, de pressions psychologiques et de traitements inhumains. La honte ! Dans n’importe quel pays réellement démocratique, les responsables politiques (un ministre de l’intérieur, par exemple) ou les hauts fonctionnaires ayant provoqué des condamnations à répétition par la justice internationale, a fortiori au sujet des droits fondamentaux, démissionneraient illico. En Belgique, non seulement, on n’a même plus le sens de l’honneur, mais on récidive en acceptant que des fonctionnaires ne respectent pas les décisions de justice ou usent grossièrement de procédés déloyaux pour les contourner. Tout cela avec comme seule excuse qu’ « on ne peut tout de même pas accueillir toute la misère de monde » : gros poncif idiot, d’abord parce que les Tziganes de l’affaire Conka sont sans doute revenus en Belgique dès leur descente de charter, qu’une petite congolaise de 5 ans qui partait pour le Canada ne risquait pas de bouleverser l’économie du pays et que le Liban n’a pas à être le réceptacle de la tragédie palestinienne, mais aussi et surtout parce que la Belgique doit prendre sa part de la misère du monde et que la politique de refoulement ou d’épuration actuellement menée, qu’on lui refuse toute vertu ou non, doit s’effacer devant au moins un principe : le respect de la vie (rappelez-vous Sémira Adamu) et de la dignité de tout être humain. Sans une restauration de l’Etat de droit, la Belgique va rafler la mise aux « Oscars de la honte ».

05/02/2008

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