Deux Nobel pour Fidel

Je ne tiens pas les jurys des Prix Nobel pour des aréopages d’objectivité et d’universalité, ni ces mêmes prix pour des Gotha inégalables. Le culte de la personnalité n’est pas mon passe-temps. J’observe que, quoi qu’on en dise, il n’est pas entré non plus dans les mœurs de la société cubaine, y compris dans sa frange la plus radicale…

Tout visiteur de Cuba constate combien José Martí, Che Guevara, et d’autres héros disparus sont admirés et vénérés et combien leurs pensées et leurs images sont présentes, trop peut-être à son goût. Mais aucun visiteur ne peut déclarer, pour s’en prévaloir ou s’en offusquer, avoir atterri à l’aéroport Fidel Castro, déambulé sur l’avenue Fidel Castro, fait la sieste à l’ombre de la statue de Fidel Castro ou mis de côté un billet de banque à l’effigie de Fidel Castro. On sait pourquoi : rien de cela n’existe, car rien de cela n’est permis. L’expression « Leader Máximo » qu’usent certains pour qualifier Fidel Castro, comme si elle était officielle et courante, comme si elle émanait de lui, du gouvernement, du parti ou de la rue, n’est pas cubaine et elle est perverse. Souvent reprise par des journalistes qui prétendent faire couleur locale, elle répand l’idée que Fidel est, de son vivant, un dictateur autoproclamé, auto-titré et auto-encensé.

Mais chacun sait aussi quelle place exceptionnelle occupe le « Comandante » dans le cœur et l’esprit des Cubains. Fidel et leur Révolution, c’est tout un. Je partage cet avis. Et je me hasarde à aller plus loin. Parmi nos amis de France-Cuba, il y a plus castriste que moi. Je n’ai jamais parlé de « Révolution Castriste » mais toujours de « Révolution Cubaine ». Cependant, en réfléchissant aux résultats obtenus par ces Prix Nobel de la Paix qui ont surtout contribué à étendre la paix des cimetières, et par ces prix Nobel d’Économie qui n’ont contribué d’aucune façon à éliminer les plaies sociales du capitalisme mondial, je me suis permis de rêver. De rêver à l’attribution de deux Prix Nobel à Fidel. Au panthéon des bienfaiteurs de l’Humanité reconnaissante, il mérite de figurer.
 

Je divague ? Peut-être ! Je n’ai aucune autorité dans aucune des matières que j’aborde, ça c’est certain, mais, fort de ma liberté de rêver et de proposer, je suggère qu’on se penche sur les raisons qui militeraient en faveur de l’attribution au Docteur Fidel Castro Ruz, ancien président du Conseil d’État de la République de Cuba, du :

{{PRIX NOBEL DE LA PAIX}}

Pour avoir mené le combat qui a mis fin à une des pires dictatures d’Amérique Latine, celle du Général Batista (1952-58).
Pour avoir échangé, à l’issue du débarquement de Playa Girón (avril 1961), les mercenaires agresseurs arrêtés contre des aliments et des médicaments destinés à son peuple.

Pour avoir évité, lors de la crise des fusées (octobre 1962), que l’affrontement entre les États-Unis et l’URSS ne dégénère en guerre nucléaire, par les concessions consenties et par son sens des responsabilités.

Pour n’avoir jamais répliqué, par aucune attaque armée, aux multiples interventions (attentats, blocus) contre la souveraineté de Cuba conduites par les États-Unis ou depuis les États-Unis durant un demi-siècle.

Pour avoir refusé de riposter par la guerre, ou simplement par la provocation, à l’occupation illégale de la base de Guantánamo.

Pour avoir présidé avec sagesse et lucidité le Mouvement des Non Alignés.
Pour avoir contribué, par l’envoi de troupes en Angola, à rétablir la paix en Afrique du Sud, en assurant l’indépendance de la Namibie et en infligeant un coup sévère aux forces racistes de l’Apartheid.

Pour avoir fait du territoire cubain un lieu d’accueil pour des pourparlers de paix dans divers conflits internes ensanglantant des pays latino-américains.
Pour avoir dénoncé sans faiblesse le terrorisme et lui avoir livré une lutte sans merci.

Pour avoir favorisé l’envoi massif d’ambassadeurs cubains de la paix – des secouristes, des médecins, des enseignants – auprès de peuples du monde entier dans le besoin, quel que soit leur régime étatique.

Une autre idée m’est venue. C’est que Fidel Castro pourrait parfaitement se voir récompensé par un autre Prix Nobel, celui de l’Économie. Je n’ignore pas qu’il n’a pas reçu une formation spécifique d’économiste, qu’il a patronné dans le passé des plans spéciaux qui n’ont pas toujours été couronnés de succès et que l’économie cubaine ne représente pas jusqu’ici le point fort de la Révolution Cubaine. J’en ai bien conscience, mais, à regarder les choses de haut, à considérer tout ce qui a nui à l’essor d’une économie cubaine plombée par des tutelles étrangères et un marché financier hostile, on peut se demander quelle autre économie nationale aurait tenu aussi bien que la cubaine en de semblables circonstances étouffantes… La voie qu’a dû emprunter Cuba, sous l’impulsion de Fidel Castro, n’a pas été exaltante et exemplaire à chaque étape, mais elle a été courageuse, pragmatique et innovante. N’oublions pas que depuis 1962 c’est une économie de guerre ! Je pense donc qu’il serait osé mais qu’il ne serait pas déraisonnable d’attribuer au Docteur Fidel Castro Ruz un :

{{PRIX NOBEL D’ÉCONOMIE}}

 
Pour avoir résisté, à la tête de son île, à l’embargo économique, commercial, financier, etc., instauré de 1962 à 2015 par la première puissance économique et militaire mondiale ; pour avoir vaincu un blocus de plus de 50 ans, un des plus longs de l’Histoire moderne, en adaptant l’économie nationale cubaine aux immenses et coûteuses contraintes imposées.

Pour avoir sauvé Cuba du chaos économique redouté, consécutif à l’implosion de l’URSS en 1991 ; pour avoir sauvegardé, durant la longue « Période Spéciale », les principaux acquis sociaux et culturels dont bénéficie la population cubaine.

Pour avoir proposé, dès 1983, la suppression de la Dette extérieure pharamineuse des nombreux pays pillés et appauvris, comme mesure non seulement de justice mais aussi de relance de l’activité mondiale.

Pour avoir, depuis des décennies, mis en garde l’humanité contre la politique irresponsable d’entreprises et d’États nuisible à l’équilibre écologique de la planète, et avoir encouragé son pays à s’engager dans la voie de la bio-diversité, du développement durable et de l’éco-socialisme.

{{Par Paul Estrade}}

Professeur émérite. Premier secrétaire de France-Cuba en 1961.

{{Source :}}revue Cuba Si, N° 196, 1er trimestre 2015., de l’Association France-Cuba.

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