Congo : J-P Bemba a des envies de coup d'Etat

Les résultats provisoires du premier tour des élections présidentielles congolaises seront connus le 20 août. Pourtant, le candidat Jean-Pierre Bemba crie déjà à la victoire. Pourquoi? Et qui est-il vraiment?

Au lendemain des élections, dont le bon déroulement a été salué par tous, les spéculations vont bon train en attendant les chiffres officiels.

A Kinshasa, le candidat Jean-Pierre Bemba déclare: «Sur base des résultats préliminaires compilés par les assesseurs de mon parti, le MLC arrive largement en tête dans six des onze provinces. J'ai obtenu de 40 à 45%, voire 51%. Kabila, pour moi, ne dépassera pas les 40%.» Le journaliste de Reuters lui demande ce qui se passerait s'il n'était pas en lice pour le second tour. Il répond: «Ce serait terrible pour le pays. Aucune nation ne peut accepter qu'on lui vole son élection. L'unité du pays est si fragile.»

Qui est vraiment

ce Jean-Pierre Bemba?

Ancien dirigeant de la rébellion pro-ougandaise, Jean-Pierre Bemba est un des principaux responsables de la guerre qui a coûté 5 millions de morts au Congo, entre 1998 et 2003. Les atrocités commises par ses troupes ont même obligé les Etats-Unis à prendre leurs distances. L'ambassadeur des Etats-Unis aux Nations Unies, Richard Williamson, a déclaré le 7 juillet 2003: «Au Congo, les pires actes imaginables, comme le cannibalisme, ont été commis. Le mépris de la vie est révoltant, les histoires de décapitations répugnantes. Le gouvernement des USA est très déçu de la façon inappropriée avec laquelle Jean-Pierre Bemba et le MLC ont traité les procès des suspects de ces atrocités.»

Le 16 mai 2003, Bemba a été condamné par la justice belge à un an de prison ferme, ainsi qu'à une amende de 24789 euros pour traite des êtres humains.

Et en avril de cette année-ci, la cour de cassation de la République Centrafricaine, pays voisin, a saisi la Cour pénale internationale à La Haie d'une plainte contre Bemba pour crimes contre l'humanité et crimes de guerre. En effet, en novembre 2002 les troupes de Bemba, sous prétexte de voler au secours de l'ancien dictateur Ange Patassé, ont massacré des civils à Bangui, la capitale. Ils y ont violé des femmes, pillé et ramené le butin au Congo.

Faire dérailler l'après-élections

Bemba sait très bien qu'après les élections, il n'y a que la prison qui l'attend. C'est la raison pour laquelle il était devenu la figure de proue de l'alliance du refus des élections! Elle unissait le MLC1, l'UDPS2 et le réseau d'Honoré Ngbanda, ancien bras droit de Mobutu, appelé le « Terminator » à cause de son réseau d'escadrons de la mort.

Ce front a depuis de longs mois mené une campagne haineuse contre Joseph Kabila qui «ne serait pas Congolais, mais Rwandais». Les élections feraient partie d'un «complot international pour mettre un Rwandais à la tête du Congo».

A Kinshasa, où la guerre d'agression de 1998-2003 a surtout été ressentie par une situation économique et sociale catastrophique, la haine de l'agression rwando-ougandaise est devenue une haine aveugle de tout ce qui est rwandais. Et l'alliance Bemba-UDPS-Ngbanda a réussi, en colportant les rumeurs les plus invraisemblables, à pousser un nombre important de Kinois à voter pour Bemba, «mwana Congo», l'enfant du Congo.

Mais à l'Est et au Nord du pays, les populations congolaises ont subi l'occupation rwandaise et ougandaise et connu pendant cinq ans le règne criminel des occupants et de leurs «rebelles» (parmi lesquels Jean-Pierre Bemba). Les gens ne sont pas dupes, ils ont voté massivement pour Kabila et rejeté Bemba. La possibilité existe, vu ce vote massif à l'Est, que Kabila obtienne la victoire au premier tour.

Un clash militaire à Kinshasa entre les troupes de l'alliance Bemba-Ngbanda-UDPS et l'armée congolaise n'est donc pas à exclure. Bemba n'a pas réussi à empêcher les élections, mais il tente maintenant de faire dérailler l'après-élections.

http://www.ptb.be/solidaire.htm

1 Mouvement pour la Libération du Congo, dirigé par J-P Bemba · 2 Union pour la Démocratie et le Progrès social, dirigé par Etienne Tshisekedi

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