Chavez, Evo et Obama. Réflexions du compañero Fidel

Je fais une pause dans les tâches qui occupent tout mon temps ces jours-ci pour dire quelques mots au sujet de la soixante-sixième session de l’Assemblée générale des Nations Unies qui offre une occasion singulière à la science politique.

Cette réunion annuelle demande un gros effort et constitue une dure épreuve pour ceux qui occupent les plus hautes responsabilités politiques dans bien des pays. Quant aux amateurs de cet art, qui ne sont pas peu nombreux dans la mesure où il touche vitalement tout le monde, il leur est difficile d’échapper à la tentation d’observer ce spectacle interminable, quoiqu’instructif.

 
 



Il existe tout d’abord une foule de thème épineux et de conflits d’intérêts. Un grand nombre de participants doivent prendre position au sujet de faits qui constituent des violations de principes flagrantes. Ainsi, quelle position adopter devant les massacres de l’OTAN en Libye ? Quel gouvernement souhaite-t-il vraiment laisser un témoignage qu’il a appuyé le crime monstrueux des États-Unis et de leurs alliés de l’OTAN dont les avions dernier cri, avec ou sans pilote, ont réalisé plus de vingt mille missions d’attaque contre un petit État du Tiers-monde d’à peine six millions d’habitants, alléguant des mêmes prétextes qu’ils ont avancés hier pour attaquer ou envahir la Serbie, l’Afghanistan, l’Iraq, et qu’ils avancent aujourd’hui pour menacer de le faire contre la Syrie ou n’importe quel autre pays du monde ?

 

Or, n’est-ce donc pas le gouvernement de l’État hôte de l’ONU qui a réalisé la boucherie du Vietnam, du Laos et du Cambodge, l’attaque mercenaire de la baie des Cochons à Cuba, l’invasion de Saint-Domingue, la « sale guerre » au Nicaragua, l’occupation de la Grenade, l’attaque du Panama et le massacre de ses habitants d’El Chorrillo ? Qui donc a fomenté les coups d’États militaires et les tueries au Chili, en Argentine et en Uruguay, qui se sont soldés par des dizaines de milliers de morts et de disparus ? Je ne parle pas de faits survenus voilà cinq cents ans quand les Espagnols inaugurèrent le génocide en Amérique ou voilà deux cents ans, quand les Yankees exterminaient les Indiens aux États-Unis ou esclavageaient les Africains, bien que, selon la Déclaration de Philadelphie, « tous les hommes naissent libres et égaux » ; non, je parle de faits survenus ces dernières décennies et survenant aujourd’hui même.

 

On ne saurait manquer de rappeler et d’évoquer ces faits face à un événement aussi important et aussi marquant que cette session de l’Organisation des Nations Unies qui met à l’épreuve la fermeté politique et la morale des gouvernements.

 

Beaucoup y représentent des pays petits et pauvres qui ont besoin de l’appui et de la coopération internationale, de la technologie, des marchés et des crédits que les puissances capitalistes développées ont manipulés à leur guise.

 

Malgré le monopole que les médias exercent d’une manière éhontée et les méthodes fascistes auxquelles recourent les États-Unis et leurs alliés pour berner et duper l’opinion mondiale, la résistance des peuples se durcit, et l’on peut le constater dans les débats en cours aux Nations Unies.

 

De nombreux dirigeants du Tiers-monde ont, malgré les obstacles et les contradictions susmentionnés, exposé leurs idées avec courage. Ainsi, on ne perçoit plus dans les voix des gouvernements latino-américains et caribéens le honteux accent lèche-bottes, manière OEA, qui caractérisait les prises de position des chefs d’État ces dernières décennies. Deux d’entre eux se sont adressés à l’Assemblée générale, et tous deux, le président bolivarien Hugo Chávez, sang-mêlé des races qui forme le peuple vénézuélien, et Evo Morales, de la pure lignée millénaire des indigènes, ont présenté leurs vues à cette session, le premier à travers un message, le second en direct pour répondre au discours du président yankee.

 

La chaîne Telesur a transmis les trois prises de position, ce qui a permis de connaître, dès mardi soir, 20 septembre,  le message du président Chávez que Walter Martínez a lu à son programme Dossier. Obama, lui, a pris la parole mercredi matin, en tant que chef d’État du pays hôte de l’ONU, et Evo Morales l’a fait ce même jour en début d’après-midi. Pour faire court, je reprendrai les paragraphes essentiels de chaque texte.

 

 

L'intervention de Chavez

 

Chávez n’a pas pu assister personnellement au sommet des Nations Unies, parce que douze années de lutte inlassable, sans un jour de repos, ont menacé sa santé et mis sa vie en danger et qu’il se bat aujourd’hui avec courage pour se rétablir pleinement. Mais il ne pouvait pas ne pas aborder le point le plus épineux de cette session historique dans son message courageux que je reproduis presque intégralement :

 

 

Je m’adresse à l’Assemblée générale de l’Organisation des Nations Unies […] pour ratifier aujourd’hui et en ce lieu l’appui total du Venezuela à la reconnaissance de l’État de Palestine, au droit de la Palestine de se convertir en un État libre, souverain et indépendant. Il s’agit là d’un acte de justice historique envers un peuple qui porte en soi depuis toujours toute la douleur et toute la souffrance du monde.

 

Le grand philosophe français Gilles Deleuze a dit, empruntant l’accent de la vérité […] : « La cause palestinienne est avant tout l’ensemble des injustices que ce peuple a souffert et continue de souffrir. » Il est aussi – oserai-je ajouter – une volonté de résistance permanente et irrépressible qui est d’ores et déjà inscrite dans la mémoire héroïque de la condition humaine. […] Mahmoud Darwish, cette voix infinie de la Palestine possible, nous parle depuis le sentiment et la conscience de cet amour :

 

Qu’avons-nous besoin du souvenir

Le Carmel est en nous

Et sur nos paupières pousse l’herbe de Galilée

Ne dis pas : Que ne courrions-nous pas comme un fleuve pour le rejoindre

Nous sommes dans la chair de notre pays

Il est en nous

 

Contre ceux qui soutiennent à tort que ce que le peuple palestinien a souffert n’est pas un génocide, Deleuze soutient avec une lucidité implacable : « D’un bout à l’autre, il s’agira de faire comme si le peuple palestinien, non seulement ne devait plus être, mais n’avait jamais été. » C’est là  – comment dire ? – le degré zéro du génocide : décréter qu’un peuple n’existe pas ; lui nier le droit à l’existence.

 

[…] Aussi la solution du conflit du Moyen-Orient passe-t-elle forcément par la justice à rendre au peuple palestinien : telle est la seule voie si l’on veut conquérir la paix.

 

L’on souffre et l’on s’indigne de constater que ceux qui ont subi l’un des pires génocides de l'Histoire se sont convertis en bourreaux du peuple palestinien ; l’on souffre et l’on s’indigne de constater que le legs de l’Holocauste est la Nakba. Et l’on s’indigne tout court de constater que le sionisme continue de recourir au chantage de l’antisémitisme contre ceux qui s’opposent à ses sévices et à ses crimes. Israël a instrumentalisé et instrumentalise d’une façon éhontée et vile la mémoire des victimes. Et il le fait pour pouvoir agir en toute impunité contre la Palestine. Il n’est pas oiseux, soit dit en passant, de rappeler que l’antisémitisme est une plaie occidentale, européenne, dont les Arabes ne sont pas partie prenante. N’oublions pas en plus que c’est le peuple sémite palestinien qui souffre de l’épuration ethnique pratiquée par l’État colonialiste israélien.

 

Qu’on me comprenne bien : autre chose est refuser l’antisémitisme, autre chose, et très différente, d’accepter passivement que la barbarie sioniste impose au peuple palestinien un régime d’apartheid. D’un point de vue éthique, quiconque refuse le premier doit condamner le second.

 

[…] le sionisme, comme vision du monde, est foncièrement raciste. Les affirmations de Golda Meir en sont, dans le cynisme atterrant, la preuve criante : « Comment pourrions-nous rendre les territoires occupés ? Il n’y a personne à qui les rendre ! Ce qu’on appelle les Palestiniens n’existe pas. Ce n’est pas comme on pensait : qu’il existait un peuple dit palestinien, qui se considère lui-même palestinien, et qu’à notre arrivée nous avons expulsé et auquel nous avons enlevé son pays. Non, ils n’existaient pas. »

 

[…]

 

Lisez et relisez donc ce document qui est passé à l’Histoire comme la Déclaration de Balfour de 1917 : le gouvernement britannique s’arrogeait la faculté de promettre aux juifs un foyer national en Palestine, méconnaissant délibérément la présence de ses habitants et leur volonté. Et rappelons que chrétiens et musulmans ont vécu en paix, des siècles durant, en Terre sainte jusqu’à ce que le sionisme ait entrepris de la revendiquer comme sa propriété entière et exclusive.

 

Rappelons encore […] qu’à la fin de la Seconde Guerre mondiale, le peuple palestinien verrait sa tragédie empirer par son expulsion à la fois de son territoire et de l’Histoire. La résolution 181 des Nations Unies – ignominieuse et illégale – recommanda en 1947 la partition de la Palestine en un État juif, en un État arabe et en une zone sous contrôle international (Jérusalem et Bethléem), concédant ainsi […] 56 p. 100 du territoire au sionisme pour qu’il y constitue son État. Cette Résolution violait de fait le droit international et bafouait d’une manière flagrante la volonté des grandes majorités arabes : le droit des peuples à l’autodétermination devenait lettre morte.

 

[…] contrairement à ce qu’Israël et les États-Unis prétendent faire accroire au monde à travers les transnationales de la communication, ce qu’il est arrivé et ce qu’il continue d’arriver en Palestine n’est pas – disons-le avec Saïd – un conflit religieux : c’est un conflit politique marqué au sceau du colonialisme et de l’impérialisme ; ce n’est pas un conflit millénaire : c’est un conflit contemporain ; ce n’est pas un conflit qui est né au Moyen-Orient : c’est un conflit qui est né en Europe.

 

Quel était et quel est encore le nœud du conflit ? Le fait qu’on privilégie dans les discussions et les analyses la sécurité d’Israël, jamais celle de la Palestine. L’histoire récente le corrobore : il suffit de rappeler la nouvelle équipée génocidaire déclenchée à Gaza par Israël à travers l’opération Plomb fondu.

 

On ne saurait ramener la sécurité de la Palestine à la simple reconnaissance d’un gouvernement autonome et d’un contrôle policier limités dans ses « enclaves » de la Rive Ouest du Jourdain et de la bande de Gaza, tout en ignorant non seulement la création de l’État palestinien dans les frontières antérieures à 1967, avec Jérusalem-Est comme capitale, les droits de ses nationaux et le droit de son peuple à l’autodétermination, mais encore le droit à la compensation et le droit au retour de la moitié de la population palestinienne dispersée dans le monde entier, aux termes de la Résolution 194.

 

Il est incroyable qu’un pays, Israël, qui doit son existence à une résolution de l’Assemblée générale puisse mépriser à ce point les résolutions émanant des Nations Unies ! Voilà ce que dénonçait le père Miguel D’Escoto quand il réclamait la fin du massacre de la population de Gaza fin 2008 et début 2009.

 

[…]

 

On ne saurait ignorer la crise des Nations Unies. J’ai soutenu en 2005, devant cette même Assemblée générale, que le modèle des Nations Unies périclitait. Le fait que le débat sur la question de Palestine ait été ajourné et qu’on soit en train de le saboter ouvertement en est une nouvelle confirmation.

 

Washington ne cesse de répéter depuis plusieurs jours qu’il opposera son veto, au Conseil de sécurité, à ce qui sera une résolution majoritaire de l’Assemblée générale : à la reconnaissance de la Palestine comme membre de plein droit de l’ONU. Nous avons d’ores et déjà déploré, aux côtés des nations sœurs qui constituent l’Alliance bolivarienne des peuples de Notre Amérique (ALBA), dans la Déclaration de reconnaissance de l’État de Palestine, qu’une aspiration si juste soit bloquée par ce biais. L’Empire, nous le savons tous, prétend dans ce cas comme dans d’autres imposer un deux-poids-deux-mesures dans l’arène internationale : c’est là la double morale yankee qui, tout en violant le droit international en Libye, permet à Israël de faire ce qu’il lui chante, devenant ainsi le principal complice du génocide que la barbarie sioniste commet contre les Palestiniens. Je rappelle une phrase de Saïd qui met bien le doigt sur la plaie : compte tenu des intérêts d’Israël aux États-Unis, la politique de ce pays au Moyen-Orient est donc israélocentriste.

 

Je voudrais conclure en faisant entendre la voix de Mahmoud Darwish dans un poème mémorable Sur cette terre :

 

Il y a sur cette terre ce qui mérite de vivre

Il y a sur cette terre,

Le commencement des commencements,

La fin des fins.

On l’appelait Palestine et on l’appelle désormais Palestine.

Madame, je mérite, parce que vous êtes ma dame,

Je mérite de vivre.

 


Elle continuera de s’appeler la Palestine. La Palestine vivra et vaincra ! Vive la Palestine libre, souveraine et indépendante !

 

Hugo Chávez Frías

Président de la République bolivarienne du Venezuela

 

 

 

Quand la session s’est ouverte le lendemain matin, ses mots étaient gravés dans le cœur et l’esprit des délégués réunis.

 

Le dirigeant bolivarien n’est pas un ennemi du peuple juif. Fort de sa sensibilité si particulière, il hait profondément le crime brutal que les nazis ont commis contre des enfants, des femmes et des hommes, jeunes ou vieux, dans les camps de concentration où – faut-il le rappeler, bien que personne ne le mentionne ? – les gitans ont été victimes de crimes atroces et d’une tentative d’extermination, et où des centaines de milliers de Russes ont aussi péri en tant que race inférieure selon les conceptions raciales nazies.

 

De retour dans son pays en provenance de Cuba, le jeudi 22 septembre au soir, il s’est référé, indigné, au discours prononcé par Barack Obama aux Nations Unies. Je l’ai rarement entendu parler avec un tel désenchantement d’un dirigeant qu’il traitait jusque-là avec un certain respect en tant que victime de la propre histoire de discrimination raciale aux États-Unis, dont il conservait un souvenir respectueux découlant de leurs échanges au Sommet de Trinité-et-Tobago, mais qu’il n’aurait jamais cru capable d’agir comme un George W. Bush :

 

« Hier, nous avons écouté une série de discours, et avant-hier aussi, aux Nations Unies, des discours précis comme celui de la président Dilma Rousseff, des discours d’une grande charge morale comme celui du président Evo Morales, mais aussi un discours, celui du président Obama,  qu’on pourrait qualifier de monument au cynisme. Oui, un cynisme, peint sur son propre visage qui était d’ailleurs tout un poème ! Obama lançant un appel à la paix, vous imaginez un peu ? Au nom de quelle morale ? Oui, un monument historique au cynisme, ce discours du président Obama.

 

« On a aussi entendu des discours précis, ouvrant des voies : celui du président Lugo, celui de la présidente argentine, fixant des positions courageuses face au monde. »

 

 

Le discours d'Obama

 

Une fois la session inaugurée à New York, mercredi 21 septembre au matin, par le discours de la présidente brésilienne, le président étasunien est monté à la tribune et a pris la parole :

 

 

Depuis presque sept décennies, quand bien même les Nations Unies ont contribué  à empêcher une troisième guerre mondiale, nous vivons encore dans un monde balafré par les conflits et  tourmenté par la pauvreté. Quand bien même nous proclamons notre amour de la paix et notre haine de la guerre, le monde reste en proie à des troubles qui nous mettent tous en danger.

 

Je serais curieux de savoir à quel moment, selon Obama, l’ONU a empêché une troisième guerre mondiale !

 

Je suis entré en fonction alors que les États-Unis livraient deux guerres. Qui plus est, les extrémistes violents qui nous ont fait entrer en guerre en premier lieu – Oussama ben Laden et son organisation Al-Qaeda – avaient toujours les coudées franches. Aujourd’hui, nous avons fixé un nouveau cap.

 

Les opérations militaires des USA en Iraq vont prendre fin d’ici à la fin de l’année. Nous allons avoir des relations normales avec un pays souverain, membre de la communauté des nations. Ce partenariat égal se renforcera grâce à notre soutien à l’Iraq, à son gouvernement  et à ses forces de sécurité, à son peuple et à ses aspirations.

 

De quel pays parle vraiment Obama?

 

Tout en mettant fin à la guerre en Iraq, les États-Unis et nos partenaires de la coalition ont commencé une transition en Afghanistan. D’ici à 2014, un gouvernement afghan et des forces de sécurité toujours plus capables entreprendront d’assumer la responsabilité de l’avenir du pays. Et à mesure qu’ils le feront, nous retirerons nos forces tout en construisant un partenariat durable avec le peuple afghan.

 

Nul ne doute, donc, que la marée de la guerre est en train de refluer.

 

Quand je suis entré en fonction, à peu près 180 000 Étasuniens servaient en Afghanistan et en Iraq. D’ici la fin de l’année, leur quantité aura diminué de moitié et continuera de diminuer. Ceci est capital pour la souveraineté de l’Iraq et de l’Afghanistan, et tout aussi essentiel pour le renforcement des USA dans la mesure où nous édifions notre nation chez nous.

 

De plus, nous allons finir ces guerres en position de force. Voilà dix ans, il y avait une plaie béante ouverte et des amas d’acier  tordus, un cœur brisé au centre de cette ville-ci. La nouvelle tour qui se dresse au Grounds Zéro symbolise la renaissance de New York, tandis qu’Al Qaeda est soumis aujourd’hui à plus de pressions que jamais, que son leadership s’est dégradé, et qu’Oussama ben Laden, quelqu’un qui a tué de milliers de personnes dans des dizaines de pays, ne mettra plus jamais la paix du monde en péril.

 

De qui Ben Laden a-t-il été l’allié ? Qui donc l’a entraîné et armé pour combattre les Soviétiques en Afghanistan ? Pas les socialistes ni les révolutionnaires, en tout cas, nulle part au monde !

 

Eh bien, oui, cette décennie a été difficile. Mais nous sommes aujourd’hui au carrefour de l’Histoire, et nous avons l’occasion de nous acheminer décisivement vers la paix. Mais, pour ce faire, nous devons en revenir à la sagesse de ceux qui ont créé cette institution. La Charte des Nations Unies nous appelle à « joindre nos forces pour maintenir la paix et la sécurité internationales ». […]

 

Qui donc a des bases militaires partout dans le monde? Qui donc est le plus gros exportateur d’armes ? Qui donc possède des centaines de satellites espions ? Qui donc investit plus d’un billion de dollars par an en dépenses militaires ?

 

[…] Cette année a été une époque de transformation extraordinaire. Toujours plus de nations ont progressé pour maintenir la paix et la sécurité internationales. Toujours plus d’individus réclament le droit universel de vivre dans la liberté et la dignité.

 

Il a cité les cas du Soudan du Sud et de la Côte-d’Ivoire. Sans dire, bien entendu, que, dans le premier, les transnationales yankees se sont précipitées sur les réserves pétrolière de ce nouvel État dont le président a dit à l’Assemblée générale même des Nations Unies qu’il s’agissait d’une ressource précieuse, mais épuisable, et a proposé de l’utiliser d’une manière rationnelle et optimale.

 

Dans le cas de la Côte-d’Ivoire, Obama n’a pas dit non plus que la paix y a été instaurée avec l’appui des soldats colonialistes d’un membre éminent de la belliqueuse OTAN qui vient de larguer des milliers de bombes sur la Libye.

 

Obama a mentionné ensuite la Tunisie, attribuant aux États-Unis le mérite du mouvement populaire qui y a renversé un gouvernement allié de l’impérialisme.

 

Plus étonnant encore : Obama prétend ignorer que les États-Unis ont été les responsables de l’installation en Égypte d’un gouvernement tyrannique et corrompu, celui d’Hosni Moubarak, qui, bafouant les principes de Nasser, s’allia à l’impérialisme, vola à son pays des dizaines de milliards et asservit ce peuple courageux.

 

Voilà un an, l’Égypte avait connu le même président depuis presque trente ans. Mais, pendant dix-huit jours, les yeux du monde ont été tournés vers la place Taghir où des Égyptiens de tous les horizons – hommes et femmes, jeunes et vieux, musulmans et chrétiens – réclamaient leurs droits universels. Nous avons vu dans ces manifestants la force morale de la non-violence qui a illuminé le monde, de la Nouvelle-Delhi à Varsovie, de Selma à l’Afrique du Sud, et nous avons su que le changement était arrivé en Égypte et dans le monde arabe.

 

[…] Face aux balles et aux bombes, le peuple libyen a refusé jour après jour de renoncer à cette liberté. Et quand il a été menacé par ce genre d’atrocités massives qui a si souvent sévi au siècle dernier, les Nations Unies ont fait la fête à leur Charte, le Conseil de sécurité a autorisé toutes les mesures requises pour éviter un massacre, la Ligue arabe a réclamé cet effort, des nations arabes ont rejoint la coalition conduite par l’OTAN qui a barré la route aux forces de Kadhafi.

 

[…] Hier, les dirigeants de la nouvelle Libye ont pris place ici, parmi nous, de plein droit, et cette semaine les États-Unis rouvrent leur ambassade à Tripoli.

 

Voici comment la communauté internationale est censée fonctionner : des nations qui s’unissent au nom de la paix et de la sécurité ; des individus qui réclament leurs droits. Maintenant, nous avons tous la responsabilité d’appuyer la nouvelle Libye, le nouveau gouvernement libyen qui doit relever le défi  de transformer ce moment de promesse en une paix juste et durable pour tous les Libyens.

 

Oui, cette année a été remarquable. Le régime de Kadhafi est terminé.  Gbagbo, ben Ali, Moubarak ne sont plus au pouvoir. Oussama ben Laden est parti, et l’idée que le changement ne peut arriver que par la violence a été ensevelie avec lui.

 

Quelle façon euphémique de liquider la question Ben Laden !  Quelles qu’aient été les responsabilités de cet ancien allié, il a été exécuté d’une balle en plein visage devant sa femme et ses enfants, puis lancé en mer depuis un porte-avions, en violation des mœurs et des traditions religieuses de plus d’un milliard de croyants et des principes juridiques élémentaires fixés dans tous les systèmes pénaux. De telles méthodes ne conduisent pas à la paix et n’y conduiront jamais !

 

Il a affirmé aussitôt après :

 

Quelque chose se passe dans notre monde. Ce n’est pas parce que les choses se sont déroulées d’une certaine façon par le passé qu’elles se dérouleront de la même manière à l’avenir. La dalle humiliante de la corruption et de la tyrannie est en train de se soulever. Les dictateurs sont mis en demeure. La technologie met le pouvoir aux mains du peuple. Les jeunes refusent fortement la dictature et rejettent le mensonge selon lequel des races, des peuples, des religions, des ethnies ne désirent pas la démocratie. La promesse écrite sur le papier : « Tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits », est toujours plus à portée de la main.

 

 […] L’aune de notre succès est si les gens peuvent vivre dans une liberté, une dignité et une sécurité durables. Et les Nations Unies et leurs États membres doivent jouer leur rôle pour soutenir ces aspirations essentielles. Et nous avons encore du pain sur la planche.

 

Puis Obama s’en est pris à un autre pays musulman où, on le sait, ses services secrets et ceux d’Israël assassinent systématiquement les meilleurs scientifiques en matière de technologie militaire.

 

Il a, aussitôt après, menacer la Syrie où l’agressivité yankee peut conduire à un massacre encore plus épouvantable qu’en Libye :

 

[…] Des hommes, des femmes et des enfants ont été et torturés, emprisonnés et tués par le régime syrien. Des milliers ont été assassinés, dont beaucoup durant la période sainte du Ramadan. Des milliers d’autres ont fui à travers la frontière. Le peuple syrien a fait preuve de dignité et de courage dans sa quête de la justice, protestant pacifiquement, s’asseyant en silence dans les rues, mourant pour les mêmes valeurs que cette institution-ci est censée défendre.  Et la question pour nous est claire : allons-nous appuyer le peuple syrien ou allons-nous appuyer ses oppresseurs ?

 

L’ONU a déjà appliqué de dures sanctions aux dirigeants syriens. Nous soutenons un transfert de pouvoir qui réponde au peuple syrien, et beaucoup de nos alliés nous ont rejoints dans cet effort. Mais, pour le bien de la Syrie et pour la paix et la sécurité dans le monde, nous devons tous parler d’une seule voix : il n’y a plus d’excuses pour ne pas agir. Il est temps que le Conseil de sécurité des Nations Unies sanctionne le régime syrien et appuie le peuple syrien.

 

Reste-t-il, par hasard, un pays qui soit à l’abri des menaces belliqueuses de cet illustre défenseur de la sécurité et de la paix internationales ? Qui donc a concédé de telles prérogatives aux États-Unis ?

 

Nous devons répondre aux appels au changement dans cette région. Au Yémen, des hommes des femmes et des enfants se réunissent tous les jours par milliers dans les rues et sur les places dans l’espoir que leur détermination et l’effusion de sang l’emporteront sur un système corrompu. Les Etats-Unis appuient ces aspirations. Nous devons œuvrer avec les voisins du Yémen et avec nos partenaires dans le monde pour chercher une voie qui conduise à une passation pacifique de pouvoir de la part du président Saleh et à l’organisation dans les meilleurs délais d’élections justes et libres.

 

Au Bahreïn, des mesures ont été prises pour démarrer la réforme et la responsabilité. Nous en sommes satisfaits, mais il en faut plus. Les États-Unis sont des proches amis du Bahreïn, et nous continuerons d’appeler le gouvernement et le principal bloc d’opposition – le Wifaq – à poursuivre un dialogue sérieux qui apporte les changements pacifiques que désire le peuple. Nous croyons que le patriotisme qui maintient les Bahreïnis ensemble doit être plus puissant que le sectarisme qui les déchirerait. Ce sera dur, mais c’est possible.

 

Obama se garde bien de dire qu’il s’y trouve une des plus grandes bases militaires étasuniennes de la région et que les transnationales yankees contrôlent et manipulent à leur guise les plus grandes réserves de pétrole et de gaz d’Arabie saoudite et des Émirats arabes.

 

Nous croyons que chaque nation doit suivre son propre chemin pour satisfaire aux aspirations des peuples. Les États-Unis ne sauraient espérer être d’accord avec les vues politiques de chaque personne ou de chaque individu. Mais nous défendrons toujours les droits universels que prône cette Assemblée. Ces droits dépendent d’élections libres et justes, d’une gouvernance transparente et responsable, du respect des droits des femmes et des minorités, d’une justice égale pour tous et équitable. Voilà ce que méritent nos peuples. Tels sont les facteurs d’une paix appelé à durer.

 

De plus, les États-Unis continueront d’appuyer les nations en transition vers la démocratie par plus de commerce et d’investissements, afin que la liberté soit accompagnée des chances. Nous renforcerons notre engagement avec les gouvernements, mais aussi avec la société civile – les étudiants, les hommes d’affaire, les partis politiques et la presse. Nous avons interdit aux violateurs des droits humains d’entrer dans notre pays. Et nous avons sanctionné ceux qui les bafouent à l’étranger. Et nous serons toujours la voix de ceux qui ont été bâillonnés.

 

Après ce long laïus, l’insigne Prix Nobel de la paix a abordé la question épineuse de son alliance avec Israël, un pays qui ne figure pas, comme chacun sait, parmi les détenteurs privilégiés d’un des systèmes les plus modernes d’armes atomiques et de vecteurs capables d’atteindre des cibles lointaines. Obama sait pertinemment combien cette politique est arbitraire et impopulaire.

 

Je sais maintenant, en particulier cette semaine, que, pour beaucoup dans cette salle, il est un point qui apparaît comme un test pour ces principes et un test pour la politique étrangère étasunienne : le conflit entre Israël et les Palestiniens.

 

Voilà un an, de cette même tribune, j’ai lancé un appel à une Palestine indépendante. Je croyais alors et je le crois encore, que le peuple palestinien mérite son État. Mais j’ai aussi affirmé qu’une paix authentique ne pouvait se faire qu’entre les Israéliens et les Palestiniens eux-mêmes. Un an après, malgré les efforts intenses consentis par les États-Unis et d’autres acteurs, les parties n’ont toujours pas comblé leurs différends. Devant cette impasse, j’ai avancé une nouvelle base de négociations en mai dernier. Cette base est claire. Chacun de vous la connaît. Les Israéliens doivent savoir que tout accord leur garantira la sécurité. Les Palestiniens méritent de savoir ce que sera la base territoriale de leur État.

 

Je sais que beaucoup sont frustrés par ce manque de progrès. Moi aussi, je vous l’assure. En fait, la question n’est pas le but que nous cherchons, mais comment l’atteindre. […] La paix demande qu’on travaille dur. La paix ne viendra pas à travers des déclarations et des résolutions des Nations Unies – si c’était si facile, elle aurait déjà été faite. Somme toute, ce sont les Israéliens et les Palestiniens qui doivent vivre côte à côte. Somme toute, ce sont les Israéliens et les Palestiniens, et pas nous, qui doivent tomber d’accord sur les points qui les divisent : les frontières et la sécurité, les réfugiés et Jérusalem.

 

Somme toute, la paix dépend d’un compromis entre des gens qui sont appelés à vivre ensemble bien longtemps après que nous ayons prononcé nos discours, bien après que nos scrutins aient été dépouillés.

 

Il s’est lancé ensuite dans une longue tirade pour expliquer l’inexplicable et justifier l’injustifiable :

 

[…] Il est incontestable que les Palestiniens ont vu cet espoir [un État souverain] retardé durant trop longtemps. C’est justement parce que nous croyons si fort aux aspirations du peuple palestinien que les États-Unis ont investi tant de temps et tant d’efforts dans la construction d’un État palestinien, et dans les négociations qui peuvent aboutir à un État palestinien.

 

Mais qu’on nous comprenne bien: l’engagement des États-Unis envers la sécurité d’Israël est inébranlable. Notre amitié avec Israël est profonde et durable. […]

 

Le peuple juif a forgé un État réussi sur sa patrie historique. Israël mérite d’être reconnu. Il mérite des relations normales avec ses voisins. Et les amis des Palestiniens ne leur rendent aucun service en ignorant cette vérité […]

 

Chaque partie a des aspirations légitimes, et c’est bien cet aspect-là qui rend la paix si difficile. Et l’on ne pourra sortir de l’impasse que lorsque chaque partie se mettra dans la peau de l’autre, de façon que chaque partie voie le monde à travers les yeux de l’autre. Voilà ce que nous devons encourager. Voilà ce que nous devons promouvoir.

 

En attendant, les Palestiniens sont toujours bannis de leur patrie ; leurs logements sont détruits par de monstrueux engins mécaniques, et un mur odieux, bien plus élevé que celui de Berlin, les sépare les uns des autres. Obama aurait mieux fait de reconnaître que les Israéliens eux-mêmes sont désormais las de voir les ressources de leur pays gaspillées en dépenses militaires, ce qui les prive de la paix et de l’accès à des moyens de vie élémentaires. À l’instar des Palestiniens, ils souffrent les conséquences de ces politiques imposées par les États-Unis et par les secteurs les plus militaristes et les plus réactionnaires de l’État sioniste.

 

Tout en relevant ces défis de conflit et de révolution, nous devons reconnaître aussi et nous rappeler que […] la paix véritable dépend de la création des chances qui rendent la vie digne d’être vécue. Pour ce faire, nous devons faire face aux ennemis communs de l’humanité : les armes atomiques et la pauvreté, l’ignorance et les maladies. […]

 

On n’y entend goutte à ce galimatias du président étasunien devant l’Assemblée générale ?

 

N’empêche qu’il prône aussitôt après son inintelligible philosophie :

 

Pour éloigner le spectre de la destruction massive, nous devons œuvrer de concert pour poursuivre la paix et la sécurité dans un monde exempt d’armes nucléaires. Ces deux dernières années, nous nous sommes engagés sur cette voie. Depuis notre Sommet de Washington sur la sécurité nucléaire, près d’une cinquantaine de nations ont pris des mesures pour garantir leur matériau nucléaire contre les terroristes et les contrebandiers.

 

Peut-il exister pire terrorisme que la politique agressive et belliciste d’un pays dont l’arsenal d’armes atomiques peut détruire plusieurs fois la vie humaine sur cette planète ?

 

Mais Obama continue de nous faire des promesses :

 

Les États-Unis continueront de travailler à l’interdiction des essais d’armes nucléaires et de la production de la matière fissile nécessaire à leur production.

 

Et nous avons commencé à marcher dans la bonne direction. Et les États-Unis se sont engagés à remplir leurs obligations. Mais, tout en les remplissant, nous avons renforcé les traites et les institutions qui contribuent à stopper la prolifération de ces armes. […]

 

Le gouvernement iranien ne peut prouver que son programme est pacifique. […]

 

Quelle scie, de nouveau ! Mais cette fois-ci l’Iran n’est pas seul : il est en compagnie de la République démocratique et populaire de Corée.

 

La Corée du Nord doit prendre des mesures concrètes pour renoncer à ses armes et à son attitude belligérante contre le Sud. Il existe un avenir de plus grandes possibilités pour les peuples de ces nations si leurs gouvernements respectent leurs obligations internationales. Mais s’ils continuent de marcher à l’écart du droit international, ils devront faire l’objet de plus fortes mesures de pression et d’isolement. C’est ce que réclame notre attachement à la paix et à la sécurité.

 

 

À suivre demain.

 

Fidel Castro Ruz

Le 25 septembre 2011

19 h 36

 

Source : www.cuba.cu

 

Le discours de Chavez est disponible ici.

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