Pourquoi la scission de BHV n’est pas la solution

Bruxelles-Hal-Vilvorde, BHV pour les intimes, sera en débat en commission de l’Intérieur de la Chambre à partir du mardi

18 septembre.

http://www.solidaire.org/ mardi, 11 septembre 2007, 12h46

Qui est concerné ?

L’arrondissement électoral de Bruxelles-Hal-Vilvorde comprend :

les 19 communes de la région bruxelloise, où vivent un million d’habitants (à plus de 80% francophones) ;

les 35 communes du Brabant flamand qui entourent Bruxelles (670 000 personnes dont 120 000 francophones environ).

Particularité : les habitants de ces 54 communes votent pour les mêmes listes (francophones et néerlandophones) lors des élections législatives et européennes.

Comment le problème est-il né ?

Auparavant, les arrondissements électoraux étaient formés de parties de provinces. Exemple : la province d’Anvers comprenait les arrondissements de Malines, Turnhout et Anvers. Une réforme électorale est intervenue. Aujourd’hui, l’arrondissement correspond à la province. Et ceci pour permettre aux ténors politiques de pouvoir être élus dans un arrondissement plus large.

Le système a été adopté partout, sauf à Bruxelles et au Brabant flamand : Bruxelles ne fait plus partie d’une province et près de 20% de francophones habitent les communes de Hal-Vilvorde. On a donc maintenu dans ce cas précis les arrondissements ancienne formule : BHV et Louvain.

Des nationalistes flamands, parmi lesquel Hermand Van Rompuy (CD&V, le démineur actuel), Gerolf Annemans (Vlaams Belang), Geert Bourgeois (NVA) ont déposé plainte concernant cette exception BHV devant la Cour d’arbitrage, pour discrimination. La Cour a donné raison aux plaignants en mai 2003 : la loi doit changer pour les prochaines élections.

La solution pour tous les grands partis du Nord du pays est la scission. Les 35 communes de « Hal-Vilvorde » seraient alors rattachées à l’arrondissement électoral de Louvain pour former l’arrondissement du Brabant flamand. Seuls des listes néerlandophones seraient alors soumises à l’électeur.

D’autres solutions existent, selon la Cour d’arbitrage, comme celles de retourner aux arrondissements ancienne formule dans tout le pays.

Quels arguments pour la scission ?

Les nationalistes flamands plaident pour la scission de BHV afin de faire barrage à la « francisation » de la périphérie. Selon eux, les riches francophones contribueraient par leur arrivée à faire augmenter les prix de l’immobilier et à chasser les habitants d’origine (néerlandophone) de la périphérie.

Les prix des habitations en périphérie sont effectivement en forte hausse (Crainhem, Linkebeek et Wezembeek-Oppem sont les communes les plus chères de la Région flamande). Mais cette hausse de l’immobilier n’a rien à voir avec l’origine linguistique, elle est un mouvement général dans toute la Belgique.

Exemple : des riches antiquaires en majorité francophones chassent les pauvres habitants du quartier des Marolles à Bruxelles, en majorité francophones. Autre exemple : des personnes à hauts revenus, majoritairement néerlandophones, venant de la région de Louvain, s’installent massivement dans certaines communes du Brabant wallon, car les terrains y sont moins chers que dans le Brabant flamand voisin. Ainsi, dans la commune de Beauvechain, la moitié des nouveaux permis de bâtir sont demandés par des néerlandophones. A Chaumont Gistoux, deux tiers1.

Agir contre la hausse de l’immobilier qui chasse des habitants de leurs communes est indispensable. Mais passe par un programme national de limitation des prix de l’immobilier. Une scission de BHV n’enrayera pas le phénomène.

Ne doit-on pas parler la langue de sa région ?

Les grands partis du Nord du pays réclament la scission au nom de la théorie du droit du sol : les habitants ne pourraient y parler que le néerlandais. Ce principe conduit inévitablement à des discriminations, parce qu’il refuse qu’une minorité nationale puisse s’installer sur le sol flamand sans apprendre « par la force » la langue.

Exactement comme si on déclarait demain Bruxelles francophone, obligeant les habitants néerlandophones à ne parler que français.

Les francophones de la périphérie doivent être encouragés à apprendre le néerlandais et vice-versa. Comme les néerlandophones et francophones de Bruxelles.

Au lieu de créer des centres culturels et des écoles unilingues, qui se regardent en chien de faïence, le gouvernement devrait encourager les initiatives bilingues.

Y a-t-il une alternative à la scission ?

Une scission de BHV enlèverait le lien important existant entre Bruxelles et sa périphérie. Et aggraverait la séparation entre la région de Bruxelles, la Flandre et la Wallonie. La solution la plus rationnelle consisterait, au contraire, à élargir les frontières de Bruxelles pour créer une province de Bruxelles-capitale, bilingue. Cette province (ayant le même statut que les autres) comprendrait les 19 communes de la région bruxelloise et certaines des communes du Brabant flamand et wallon ayant un lien socio-économique et urbain avec Bruxelles.

Selon une étude réalisée par l’UCL en 1999, « 31 communes au minimum, dont Grimbergen, Dilbeek, ou encore Waterloo (commune wallonne), font de fait économiquement et géographiquement partie de l’agglomération bruxelloise. »

Dans cette nouvelle Bruxelles, le développement des deux communautés devrait être garanti, sans discrimination avec un gouvernement paritaire de francophones et néerlandophones. Ni « Bruxelles français », ni « geen faciliteiten ». Peut-on admettre qu'un chômeur francophone habitant à Linkebeek perde le droit à ses allocations parce qu’il doit remplir ses papiers en néerlandais ? Ou qu’un malade néerlandophone ne soit pas reçu dans sa propre langue dans un hôpital bruxellois ?

1 Arm Wallonïe, Een reis door het beloofde land, Pascal Verbeke, , page 33, éditions Meulenhoff, Manteau, 2007

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