Les négociations secrètes USA – Talibans

Jusqu’au dernier moment, Bush a tout fait pour maintenir les talibans au pouvoir et s’arranger avec eux afin de construire le pipeline afghan tant désiré. Cela ressort du nouveau livre Ben Laden – La Vérité interdite, dont les auteurs sont proches des services de renseignements français.

Pourquoi donc George Bush bloqua-t-il, en été 2001, une enquête du FBI en direction des réseaux terroristes de Ben Laden et de ses complices ? Pour ne pas gêner ses amis saoudiens qui finançaient Osama depuis longtemps, contre les Soviétiques, puis contre divers pays trop indépendants ? Oui. Mais aussi pour d’autres raisons. Qu’éclaire un livre récent Ben Laden – La Vérité interdite. Manifestement les auteurs ont été tuyautés par les services secrets français. La rivalité Washington – Paris est bien réelle au-delà des sourires face caméras.

«Depuis 1998, pétroliers et diplomates américains étaient convaincus qu’une victoire totale des talibans – qu’ils avaient souhaitée pour stabiliser l’Afghanistan – n’était plus envisageable.» (chapitre 6) Et pourquoi les démocratiques Etats-Unis souhaitaient-ils la victoire de ces ultra-fanatiques aux crimes bien connus ? Parce que, comme l’a expliqué Solidaire (n° 42), la firme pétrolière US Unocal misait sur eux pour construire un très profitable gazoduc. Du Turkménistan à l’Océan Indien et aux marchés prometteurs d’Asie du Sud.

En 1998 déjà, l’administration Clinton négocie avec les talibans, pour obtenir l’extradition de Ben Laden, dit-on, en échange de la reconnaissance de leur régime. Dès son arrivée au pouvoir, l’administration Bush accélère et intensifie ces négociations. Pourquoi ? Cette administration est directement importée des multinationales pétrolières.

Bush ? Une grande famille du pétrole texan. Le vice-président Cheney ? Longtemps directeur d’Halliburton, une des plus grosses firmes de services pétroliers du monde. Condoleeza Rice (Conseil National de sécurité) ? Neuf ans chez Chevron. Donald Evans (secrétaire au Commerce) ? Toute sa carrière dans le pétrole. Sa sous-secrétaire Kathleen Cooper ? Chef économiste d’Exxon.

Quatre jours après la prestation de serment, Cheney, le vrai patron, crée l’informelle Energy Policy Task Force «pour organiser une politique énergétique conquérante» (chap. 6). Structure si secrète que l’Office chargé de l’information du Congrès, devra même menacer de poursuite judiciaires pour obtenir la liste des participants.

Tout de suite, l’administration Bush cherche à s’arranger avec les talibans. Au placard les dénonciations des organisations des droits de l’homme ! En mars 2001, et du 17 au 20 juillet, des réunions discrètes ont lieu à Berlin. Le marché reste : livrer Ben Laden, élargir un peu leur gouvernement et profiter d’une manne financière. N’oublions pas qu’en 2001 encore, les Etats-Unis ont été le principal bailleur de fonds des talibans, sous couvert d’aide humanitaire.

Et s’ils ne se soumettent pas ? «Un Américain aurait dit en juillet aux Pakistanais que si les talibans acceptaient de livrer Ben Laden et de signer la paix avec le front uni, ils auraient un «tapis d’or», mais que s’ils refusaient, ils s’exposaient à «un tapis de bombes».» indique Le Monde, ce 13 novembre.

L’affaire a commencé bien avant le 11 septembre

On se doutait bien que l’affaire n’avait pas commencé le 11 septembre. A France 3, (Pièces à Convictions, 18 octobre), l’ex-ministre pakistanais des Affaires étrangères, présent aux discussions de Berlin, révélait : «L’ambassadeur US Simons a indiqué qu’au cas où les talibans ne se conduiraient pas comme il faut, (…) les Américains pourraient utiliser une opération militaire

La boucle est bouclée. Beaucoup de choses nous sont encore dissimulées, mais le vrai scénario a probablement été ceci. 1. Voulant absolument son gazoduc, Bush menace les talibans. 2. Ben Laden prend les devants en tuant Massoud, chef de l’Alliance Nord rivale des talibans, puis avec les attentats aux USA. Une attaque surprise, même s’il reste des zones d’ombre sur le rôle des services secrets US. 3. Bien que mise en difficulté tactiquement, l’administration Bush en profite pour mettre en place le plus vite possible son vieux projet : installer des bases militaires en Asie centrale, entre Russie et Chine, à côté des républiques pétrolières et gazières convoitées.

Conclusion : à toutes les étapes, la cause profonde des souffrances du peuple afghan se trouve à Washington. C’est l’ingérence colonialiste, la volonté de mettre au pouvoir des agents dociles pour les intérêts des multinationales, puis de les retirer s’ils ne conviennent plus. Le jeu continue puisque Washington essaie d’imposer des talibans dits «modérés» dans le nouveau gouvernement afghan qu’elle entend toujours contrôler. Le monde est malade de l’ingérence néocolonialiste.

La Vérité interdite, de Jean-Charles Brisard et Guillaume Dasquié, Denoël, 20 euros. Disponible à la Librairie Internationale, 02 513 69 07.

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