Les Boliviens se dotent d’une nouvelle constitution

Ce dimanche 25 janvier, les Boliviens étaient une nouvelle fois convoqués aux urnes. L’enjeu était de taille : l’approbation d’une nouvelle Constitution, plus sociale et accordant une importance accrue au respect des 36 cultures indiennes du pays qui jusqu’ici furent bien souvent brimées et contraintes de se mettre au diapason du mode de vie occidental imposé par l’élite politico-économique du pays.
26 janvier 2009

Comme on pouvait s’y attendre, les Boliviens se sont rendus massivement dans les 22.000 bureaux de votes habilités pour l’occasion. Ils ont voté OUI à plus de 62 % en faveur du nouveau texte constitutionnel . Un chiffre exceptionnel, similaire aux 67% de soutien populaire obtenu par Evo Morales, premier président indien du pays, lors du référendum révocatoire d’août 2008.

Plus de 300 observateurs internationaux, entre autres des parlementaires européens, ont assisté à cette journée électorale et n’ont constaté aucun incident majeur.

Quel est l’impact de cette nouvelle victoire électorale ?

1. Premièrement, il est très important de souligner le contexte difficile dans lequel s’est inscrit l’élaboration de cette nouvelle Constitution. Celle-ci fut, depuis l’arrivée à la présidence du pays d’Evo Morales, la cible attaquée avec le plus de rage (et d’argent) par l’opposition de droite. Tous les moyens furent bons pour saboter le bon déroulement de l’Assemblée Constituante chargée d’élaborer le nouveau texte au cours de l’année 2007. A de nombreuses reprises, les séances durent être interrompues, les membres de l’Assemblée furent victimes d’agression physique et l’Armée dut protéger les accès de l’enceinte dans laquelle ils siégeaient. Des manifestations violentes eurent lieu lors de la fin des travaux de l’Assemblée, faisant un mort et de nombreux blessés. Une fois le texte rédigé, l’opposition fit tout son possible pour tenter de démontrer, par des procédés tout aussi odieux que grotesques, l’illégalité de la nouvelle Constitution et tenta par ailleurs de repousser aux calendes grecques son approbation par suffrage universel.

Malgré ces innombrables bâtons placés dans les roues du progrès vers le socialisme, Evo Morales, soutenu par une majorité de la population (chaque jour plus importante!) a su déjouer chacun des pièges de la droite, esquiver chacun de ses coups et faire approuver ce nouveau texte constitutionnel.

Cette nouvelle victoire sur la droite réactionnaire et fascisante constitue en soi une victoire car elle démontre une nouvelle fois que les gens du peuple peuvent gagner des luttes face aux puissants de ce monde et qu’ils peuvent prendre leur destin en mains en changeant, pas à pas, leur modèle de société. A ce titre, l’approbation de la nouvelle Constitution constitue un exemple et une source de motivation inégalable pour tous les peuples du monde.

2. Ce dimanche, les Boliviens se sont également prononcés sur un des articles les plus polémiques de la Constitution. Ils devaient déterminer la superficie maximale de terres agricoles (5000 ou 10000 Ha) que peut posséder un individu. 75 % des électeurs se sont prononcés pour 5000 Ha seulement.

Dans un pays où la distribution des terres est terriblement inégalitaire (une centaine de familles se partageant la majorité des terres cultivables), cet article voté va changer radicalement le paysage agricole bolivien. Il constitue le coup le plus dur infligé à l’élite économique bolivienne durant les trois premières années du gouvernement d’Evo Morales.

3. Un des articles du nouveau texte constitutionnel suscite l’indignation et la protestation de la rétrograde église catholique. Celui-ci ne fait pourtant que garantir la liberté de culte et la laïcité de l’Etat… L’ire du clergé trouve sa source dans l’abrogation de l’article antérieur, celui qui mentionnait la religion catholique comme étant la religion d’Etat… L’église catholique bolivienne, au service de la droite riche et raciste, s’inquiète pour ses privilèges et son influence politique. Tous deux s’amoindrissent au fur et à mesure que la « révolution démocratique et culturelle » d’Evo Morales s’ancre dans le pays et au sein des populations pauvres. Qui plus est, les perspectives de mariage homosexuel et de légalisation de l’avortement qu’entrouvrent la nouvelle Constitution discréditent leur « morale » d’un autre âge.

4. Par ailleurs, ce nouveau texte constitutionnel redonne à l’Etat une place centrale dans la vie économique du pays. Vingt ans de néolibéralisme n’ont fait que le dépecer petit à petit, ayant pour conséquence l’accroissement du fossé entre riches et pauvres. L’Etat reprenant un rôle principal, il veillera à poursuivre la mise en œuvre de projets visant à garantir la satisfaction des besoins élémentaires des Boliviens.

Lors de son meeting de fin de campagne jeudi dernier, Evo Morales annonçait ce à quoi devait conduire la nouvelle Constitution : « Un nouvel Etat où tous nous jouissons des mêmes droits et des mêmes devoirs, où il a des opportunités pour tous et toutes ». Le peuple bolivien, en ratifiant massivement la nouvelle Constitution, a démontré qu’il y aspirait avidement.

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