L’informatique scolaire, entre pédagogie et marchés

Lorsque je dois résumer en une phrase ma position sur l’introduction des technologies de l’information et de la communication (TIC) à l’école (TICE ), j’ai coutume de dire qu’elles répondent davantage aux pressions des milieux économiques, friands de marchés et de main d’œuvre compétitive, qu’à des besoins pédagogiques. Mais lorsque j’expose ce point de vue, je me fais souvent traiter de « passéiste », voire de « briseur de machine », de luddite du 21e siècle.

 
Pourtant, rien n’est moins vrai. J’appartiens au contraire à une génération qui s’est d’autant plus passionnée pour l’informatique et ses applications qu’elle a assisté à leur éclosion. Lorsque j’étudiais la physique à l’université, au milieu des années 1970, nous passions une grande partie de notre temps libre — et même parfois du temps où nous étions sensés assister aux cours — à perforer des cartes et à relire des listings rédigés dans un langage Fortran aujourd’hui désuet. Il fallait de longues heures de travail, de relecture attentive et de correction méticuleuse, pour aboutir à de petits programmes qui tournaient ensuite sur l’ordinateur central de l’université. On y avait généreusement accordé quelques millisecondes de temps de traitement à chaque étudiant.
On ne s’étonnera donc pas si, quelques années plus tard, alors que je commençais à enseigner les mathématiques dans une école secondaire, je me ruai sur les tout premiers « ordinateurs personnels » arrivant sur le marché et en fis immédiatement acheter quelques uns par mon école.
Ces merveilleux professeurs d’informatique et leurs drôles de machines
Je m’en souviens encore : c’étaient des machines de la marque Tandy, disparue depuis lors, modèle TRS-80. Elles disposaient de seize kilo-octets de mémoire de travail : à peu près un milliard de fois moins que le plus banal des ordinateurs modernes. On y enregistrait données et programmes sur une espèce de magnétophone à cassettes qui vous contraignait à rechercher le début des fichiers à l’oreille : il fallait une bonne dizaine de minutes pour retrouver et charger des fichiers dont la taille n’aurait même pas permis d’enregistrer une seule des photos numérisées que l’on stocke par milliers sur le disque dur d’un PC contemporain. Internet n’existait pas mais on avait déjà des écrans, capables d’afficher 16 lignes de texte, pas une de plus, et 64 signes par ligne. On pouvait aussi y tracer des graphismes… avec de gros points d’un demi centimètre de largeur !
L’époque était généreuse. A la fin des années 70, les écoles belges disposaient de conditions d’encadrement qui nous sembleraient incroyables aujourd’hui. La mienne avait ainsi pu organiser un cours d’informatique optionnel, avec des groupes de maximum 16 élèves (deux par ordinateur). Mais qu’y faisions-nous donc avec l’aide de ces machines antédiluviennes ? Essentiellement deux choses : de l’algorithmique et de l’initiation technologique.
L’algorithmique, c’était l’apprentissage des principes de base de la programmation. Cela signifiait, pour les élèves, un formidable exercice de rigueur et d’organisation de la pensée : décomposition de processus en parties élémentaires, utilisation de structures logiques, conditionnelles ou répétitives, maîtrise d’un langage formel… Cet aspect de l’informatique, malheureusement totalement absent des cours actuels dans l’enseignement obligatoire, avait une valeur formative comparable à ce qu’offraient jadis le latin ou, un peu plus récemment, les mathématiques modernes. Des instituteurs s’y attelaient dès les premières années d’école, au moyen de langages spécialement conçus pour les enfants, comme le Logo et sa célèbre tortue virtuelle programmée.
Quant à la formation technologique, elle consistait à faire découvrir les principes de fonctionnement d’un ordinateur : le codage d’informations sous forme binaire (bits, octets,…), le traitement d’informations binaires par des « portes logiques » (ET, OU, NON,…), les supports de mémoire (bandes magnétiques, disques, RAM, ROM…), enfin le rôle central du processeur et son interaction avec la mémoire. J’ai toujours considéré qu’une éducation technologique digne de ce nom devait apporter à l’apprenant, non seulement la capacité d’utiliser l’outil, mais aussi et surtout la compréhension des principes de son fonctionnement. C’est à cette condition seulement que l’on peut devenir maître de la machine et non esclave d’une technologie mythifiée.
Mais dès la fin des années 70, ces premiers ordinateurs scolaires dévoilaient également déjà des fonctions d’outils didactiques dans d’autres domaines que l’informatique : comme répétiteurs en langue, comme outil de calcul en labo de physique, etc. En mathématique, par exemple, nous avions mis au point un logiciel permettant d’afficher à l’écran le graphique — très rudimentaire — de fonctions dont l’utilisateur pouvait modifier les paramètres. Les élèves travaillaient par deux sur des fonctions polynomiales, hyperboliques, trigonométriques, exponentielles… Ils étaient amenés à observer comment le graphique changeait lorsqu’ils modifiaient tel ou tel paramètre. Ils devaient ensuite formuler ces observations, ce qui les conduisait à imaginer et définir des concepts abstraits tels la croissance ou la pente, les asymptotes et les limites, les racines, les maxima et minima d’une courbe, ses point d’inflexion, etc. Enfin leurs conclusions devaient les amener à comprendre le rôle des paramètres de ces fonctions. L’ordinateur et son logiciel spécialisé devenaient ainsi de véritables laboratoires de mathématique, permettant de nouvelles pratiques de construction de savoirs, des démarches inimaginables auparavant, car trop coûteuses en temps de calcul ou de dessin.
Puis vint l’austérité. De 1979 jusqu’au milieu des années 90, l’enseignement belge – et particulièrement l’enseignement francophone — subit une dramatique cure d’amaigrissement. Les dépenses publiques d’éducation tombèrent de 7% à un peu plus de 5% du PIB, alors que les effectifs d’étudiants continuaient d’exploser dans le supérieur. La taille des classes grimpait d’année en année, la charge de travail des enseignants aussi. Les heures de « coordination », que mon établissement avait pu m’octroyer pour développer l’utilisation pédagogique des ordinateurs, passèrent à la trappe. De toute façon, les vieux Tandy, usés et obsolètes, ne furent pas remplacés. Dès la fin des années 80, plus personne ne parlait de langage Logo, d’algorithmique ou de technologie informatique.
Sous la coupe des marchés
Le second souffle des TICE survient à partir du milieu des années 90. Il trouve son origine, non plus dans des considérations pédagogiques, mais dans les pressions autrement plus puissantes émanant des milieux économiques. L’année 1994 marque le début de la croissance fulgurante de l’indice boursier des valeurs technologiques, le NASDAQ. La « bulle internet », qui finira par éclater en 2000-2001, commence alors à gonfler. On nous promet de tous côtés que les investissements dans l’internet et l’informatique devront permettre au capitalisme mondial de renouer avec une croissance longue et durable.
En 1994, la Table Ronde des industriels européens (ERT) publie un rapport sur l’éducation. On y lit cette revendication limpide : « Il faut utiliser le montant très limité d’argent public comme catalyseur pour soutenir et stimuler l’activité du secteur privé  ». Sur quel marché ? Celui des technologies de l’information et de la communication, bien évidemment. Deux ans plus tard, le « groupe de réflexion sur l’éducation », mis en place par la Commission européenne et dirigé par Jean-Louis Reiffers, écrit dans sont rapport :
« On peut douter que notre continent tienne la place industrielle qui lui revient sur ce nouveau marché (des TIC) si nos systèmes éducatifs et de formation ne suivent pas rapidement. Le développement de ces technologies, dans un contexte de forte concurrence internationale, nécessite que les effets d’échelle puissent jouer à plein. Si le monde de l’éducation et de la formation ne les utilisent pas, le marché européen deviendra trop tard un marché de masse. »
Il ne faudra que quelques mois à Edith Cresson, Commissaire européen à l’éducation, pour mettre en application les recommandations pressantes de l’ERT et du groupe Reiffers. Dès 1996, elle lance un plan d’action intitulé « apprendre dans la société de l’information ». Cresson en explique les objectifs en ces termes :
« Le marché européen (des TIC) demeure trop étroit, trop fragmenté, le nombre encore trop faible des utilisateurs et des créateurs pénalisent notre industrie. C’est pourquoi il était indispensable de prendre un certain nombre de mesures pour l’aider et le stimuler. C’est l’objectif du plan d’action “Apprendre dans la société de l’information” dont s’est doté la Commission en octobre 1996. Celui-ci a deux ambitions principales : d’une part, aider les écoles européennes à accéder au plus vite aux technologies de l’information et des communications ; et, d’autre part, accélérer l’émergence et donner à notre marché la dimension dont notre industrie a besoin »
On le voit, la toute première motivation qui a présidé à l’équipement des écoles européennes en ordinateurs et à leur connexion au réseau Internet durant la deuxième moitié des années 90 fut le souhait de stimuler les marchés naissants et — croyait-on — si prometteurs liés aux technologies de l’information et de la communication : production et vente de logiciels et de plateformes, abonnements au réseau, vente de services en ligne et commerce à distance. Le directeur de la division « éducation » de Microsoft-France ne s’y trompait pas, lorsqu’il répondit en 1998 au journaliste qui l’interviewait pour l’hebdomadaire Le Point : « Pour nous, l’Ecole offre une double perspective : C’est, d’une part, un marché en tant que tel, comme celui de l’entreprise ; d’autre part, nous pensons qu’il aura un effet d’entraînement sur le développement des nouvelles technologies en France. Notre objectif étant d’imposer le plus largement possible notre plate-forme Windows »
La deuxième motivation était à chercher du côté des perspectives d’évolution du marché du travail. Dans un premier temps, l’attention se porte surtout sur l’essor quantitatif des emplois d’informaticiens, de programmeurs ou de techniciens spécialisés dans l’installation et l’entretien de parcs informatiques, une autre demande s’avérera bientôt plus fondamentale, particulièrement après l’éclatement de la « bulle internet » en 2000-2001 qui voit la demande de spécialistes s’effondrer.
La caractéristique majeure de l’évolution du marché du travail depuis le début des années 1990 aux Etats Unis, depuis la fin de cette décennie en Europe, c’est l’explosion des emplois peu ou non qualifiés dans les secteurs de services. En France, les effectifs d’emplois non qualifiés augmentent de 1 million d’unités entre 1994 et 2001. Au Etats-Unis, la courbe d’évolution de la structure de qualification des emplois s’inverse au fil de années 90. D’un glissement d’emplois hautement qualifiés vers des emplois non qualifiés on passe, en dix ans, à une évolution inverse : l’emploi qualifié diminue alors que l’emploi non qualifié augmente dans de fortes proportions.
Quel rapport avec les TIC ? Il est double. Premièrement, c’est précisément le développement de ces technologies qui est à l’origine du remplacement de travailleurs moyennement qualifiés par des machines programmées, ouvrant la porte à l’actuelle polarisation des niveaux de qualification que requiert le marché du travail. Deuxièmement, la nature des nouveaux postes de travail non qualifiées est radicalement différente des anciens emplois de manoeuvres. Il s’agit cette fois de travailleurs du secteur des services, dont on attend certes la maîtrise de compétences très variées, mais suffisamment partagées pour ne plus constituer une qualification. Les employés de bureaux ou de fast-food, les serveurs au comptoir du bar d’un TGV, les personnes chargées de remplir les distributeurs de Coca-Cola, les réceptionnistes, les agents de sécurité… comme les autres travailleurs « non qualifiés » avant eux et depuis longtemps, ils doivent savoir lire, écrire et calculer. Mais on leur demande aussi de pouvoir communiquer dans une ou deux langues étrangères, d’avoir suffisamment « d’esprit d’entreprise » ainsi qu’un minimum de « sensibilité culturelle et artistque ». Mais par dessus tout, on exige qu’ils sachent utiliser Word, Excel et Internet, outils omniprésents sur les lieux de travail. Il s’agit, dit la Commission Européenne, d’inculquer à tous les travailleurs « la capacité de développer et d’agir dans un environnement complexe et hautement technologique, caractérisé, en particulier, par l’importance des technologies de l’information ». 
Une autre caractéristique du marché du travail vient renforcer cette demande d’informatique scolaire. Parmi les qualités exigées des nouveaux travailleurs figure, en bonne place, leur flexibilité professionnelle. Leurs compétences « incluent, en particulier, la capacité fondamentale d’acquérir de nouvelles connaissances et de nouvelles compétences, d’apprendre à apprendre tout au long de la vie », explique la Commission.
Or, l’ordinateur et internet offrent précisément cette capacité de mettre des savoirs variés à la portée de tous. Si l’école « apprend à apprendre », tout seul, au moyen d’un ordinateur, les travailleurs pourront mettre à jour leurs connaissances en fonction des besoins de leur patron, durant leur temps libre. Ils le feront afin de rester « employables », afin de ne pas perdre leur boulot. Il faut dès lors, explique la Commission, « mettre le potentiel d’innovation des nouvelles technologies au service des exigences et de la qualité de la formation tout au long de la vie (et) assurer la formation aux usages de ces technologies, notamment “pour apprendre” ».
Vers un enseignement dérégulé et privatisé
La volatilité du marché du travail n’exige pas seulement une main d’oeuvre flexible. Elle réclame pareillement une grande adaptabilité du système éducatif lui-même. Il s’agit de briser la « lourdeur » de l’éducation scolaire pour y substituer une enseignement davantage « orienté sur l’apprenant », c’est-à-dire un enseignement axé sur la demande et non sur l’offre. Là encore, les TICE peuvent jouer un rôle important. En mettant une tablette entre les mains de chaque élève, on peut individualiser les apprentissages : chacun avance à « son » rythme, celui de ses « capacités », celui de ses ambitions ou celles de ses parents. Pour Linda Roberts, qui fut directrice de la division des applications pédagogiques du ministère de l’Education américain entre 1993 et 2001, « la place de la technologie dans les salles de classe est aujourd’hui une question d’intérêt national, en grande partie au vu du potentiel qu’elle a de transformer les modalités d’enseignement et d’apprentissage  ».
Mais en même temps que l’on dérégule et individualise ainsi l’école de l’intérieur, d’autres s’y attaquent de l’extérieur. Il se trouve que les trois mille milliards de dollars de dépenses mondiales d’éducation ont de quoi faire saliver plus d’un investisseur. Depuis le milieu des années 90, les détenteurs de capitaux jugent qu’il doit certainement y avoir moyen de conquérir une partie de ce secteur à leur profit. L’offre d’enseignement payant sur internet constitue à cet égard un vecteur important de déploiement. Selon la Banque Mondiale, « l’élimination de la barrière de la distance physique, qui résulte de la révolution des TIC, signifie qu’il est possible pour diverses institutions extérieures d’entrer en compétition avec les universités locales et de toucher les étudiants n’importe où, dans n’importe quel pays ».
Et l’OCDE conclut : «  le développement de sources d’informations et de connaissances différentes va entraîner un déclin rapide du monopole des établissements scolaires dans le domaine de l’information et du savoir […] L’individualisation plus marquée des modes d’apprentissage – qui sont flexibles et induits par la demande – […] annonce le déclin consécutif du rôle des enseignants, dont témoigne aussi le développement de nouvelles sources d’apprentissage, notamment par le biais des TIC ».
De l’usage des TICE
En résumé, on voit que l’introduction massive des technologies de l’information et de la communication à l’école, à partir de la deuxième moitié des années 90, répond à une grande diversité de fonctions : stimuler le marché des TIC (fonction aujourd’hui quelque peu désuète puisque la majorité de nos concitoyens sont déjà équipés), former les futurs informaticiens, assurer l’alphabétisation numérique même des travailleurs peu ou pas qualifiés, promouvoir leur flexibilité par l’apprentissage en ligne, déréguler et individualiser le système éducatif, être un vecteur de privatisation de l’enseignement.
A toutes ces fonctions dictées par la demande économique, il convient évidemment d’ajouter aussi les fonctions pédagogiques. Loin de moi, en effet, l’idée de contester le potentiel pédagogique des TICE. Mais je ne crois pas pour autant que toutes les applications de l’ordinateur à l’école soient positives.
Distinguons deux aspects : la formation aux TIC et la formation avec les TICE.
A l’Aped nous sommes de fervents partisans d’une ample formation polytechnique pour tous. S’agissant des technologies de l’information et de la communication, cela comprend selon moi, une compréhension au moins des grands principes du matériel et du logiciel informatique. Cela est ni plus ni moins important que de comprendre les bases de l’agriculture, de la construction, de la mécanique automobile, de la production d’énergie, de l’électricité domestique, de la robotique, de l’industrie lourde ou des principales activités de services. Tout simplement parce que cela fait partie de la maîtrise intellectuelle des rapports techniques de production aussi bien que des technologies de notre vie quotidienne. Cette dimension de la formation aux TIC est aujourd’hui presque entièrement absente de l’école.
Au lieu de cela, la formation scolaire aux TIC se résume trop souvent à l’apprentissage de Windows, de Word et du navigateur Explorer, c’est-à-dire à une formation aux applications bureautiques, celles qui ont le plus de chances d’être exigées par les emplois, tous niveaux de qualification confondus.
Les TIC peuvent aussi devenir des outils pédagogiques innovants dans d’autres disciplines. Comme outils de visualisation ou de démonstration didactique, elles apportent une dimension d’interactivité que n’ont pas les films ou les diapositives. Dans les domaines scientifiques, technologiques ou mathématique il existe des milliers de logiciels qui permettent une véritable révolution sur le plan de la visualisation de phénomènes ou de processus. Dans certains cas, ces logiciels peuvent — à l’image des programmes de visualisation de graphiques de fonctions mathématiques que nous utilisions déjà dans les années septante — constituer les supports de démarches réellement constructivistes, où l’élève est conduit à la découverte et à la formulation de lois, de relations, de classifications ou de concepts nouveaux. Par exemple, dans mes cours de physique, il m’arrive de placer les élèves devant des logiciels qui simulent des trajectoires balistiques, des mouvements orbitaux ou l’agitation thermique de molécules. Les élèves peuvent « jouer » avec les paramètres physiques — altitude, vitesse, angles, température, pression…— et sont invités à répondre à des questions qui les conduisent, pas à pas, à la formulation de la théorie newtonienne de la gravitation ou de la loi des gaz parfaits.
Là nous sommes réellement dans un domaine où les TIC apportent un « plus » inestimable à une démarche de construction de savoirs. Chaque « chantier » de recherche aboutit à une mise en commun des découvertes des élèves et à une synthèse magistrale (au sens : faite par le magister). Cela n’a donc rien à voir avec un enseignement programmé individualisé par rapport auquel j’ai les plus grandes réserves. Dans ce cas-là, les « meilleurs » élèves avancent à leur rythme pendant que le professeur s’occupe des autres. Les deux démarches peuvent se faire avec les mêmes ordinateurs, les mêmes tablettes. Mais dans le premier cas on se situe dans une socio-construction de savoirs, alors que dans le deuxième cas on est dans le productivisme de l’enseignement individualisé, « axé sur la demande ».
Je suis également très réservé quant à un autre usage des TIC scolaires : la recherche individuelle de connaissances sur Internet. Celle-ci est très fortement valorisée dans le cadre de l’approche par compétences, où les savoirs ne sont plus que des outils à « mobiliser » pour réaliser une tâche. Or, s’il est vrai que dans le monde de la production — professionnelle, domestique ou militante par exemple — les savoirs n’ont d’importance qu’en regard des tâches qu’ils permettent d’accomplir, il n’en va pas de même à l’école. Celle-ci a pour mission d’apporter des connaissances dont on ne sait pas a priori à quel usage elles serviront un jour. Effectuer une recherche sur internet, par exemple, nécessite déjà de disposer de connaissances sur le sujet étudié, afin de faire le tri, de juger de la scientificité et du sérieux de ce qu’on trouve. Je crains fort que le temps passé, à l’école, à bricoler des recherches sur internet ne soit pris au détriment du temps d’apprentissage des savoirs qui doivent construire les bases d’une authentique capacité de réflexion et d’action autonome.

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