Assassin, narcotrafiquant et … professeur d’université à Metz !

?L’école d’ingénieurs de Metz (Lorraine) s’enorgueillit de compter parmi ses professeurs, l’ex président colombien (2002-2010). Le 3 février dernier, Alvaro Uribe était reçu sous les applaudissements des étudiants pour qui il était venu faire un cours sur le développement économique en Amérique latine.
Mais les étudiants admiratifs devant l’ex-chef de l’État savent-ils vraiment qui est cet homme ?

Sur le site de l'ENIM, avec son visage bien en évidence sur la page d’accueil, l'ancien mandataire est présenté comme le héros qui a sauvé Ingrid Betancourt. Il est aussi celui qui a lutté fortement contre le trafic de drogue au côté des USA et qui « a fait reculer l'insécurité de manière remarquable. » D'ailleurs, il est précisé que « ses succès contre les FARC et la réduction de la criminalité ont assis la popularité du président, qui était de 78% à la fin de son dernier mandat. »

Très bien, mais il faut savoir que les sondages se font par téléphone et que les 50% de Colombiens situés sous le seuil de pauvreté n’ont pas le téléphone. Parmi ceux qui sont au-dessus, 50% ne l’ont pas non plus. Donc 78% de 25% de la population nous parait être un critère insuffisant pour que l’ENIM soit fier de cet enseignant, surtout pour parler de développement économique.

D'autant plus que Uribe, considéré inculte et brutal dans son pays, n'a jamais été enseignant et encore moins ingénieur.

Il est d'abord un homme politique et d'autres chiffres sont à considérer dans le bilan de son mandat. Presque 6 millions de personnes ont dû fuir leurs régions d’origine. Certaines en raison de combats, mais la plupart sous la menace directe de paramilitaires, souvent alliés aux forces militaires. Après le départ des ces Colombiens, des puits de pétrole poussaient, des mines d’or se creusaient, des palmiers à huile se plantaient… Drôle de théorie du développement !

38 000 homicides durant son cours règne. 7 500 prisonniers politiques dont les deux tiers n'ont jamais touché une arme. 527 syndicalistes assassinés. Plus les femmes violées, les hommes mutilés, les enfants orphelins, les familles partis en exil. La Colombie est le pays le plus violent au monde.

Ceux qui dénoncent ou revendiquent leurs droits sont menacés, emprisonnés ou assassinés. Alvaro Uribe est aussi responsable du scandale des écoutes téléphoniques sur des centaines d'opposants ou simple défenseur des droits de l'homme, en Colombie et même à Bruxelles, sur des fonctionnaires européens.

Bien sûr, M. Uribe répondra que ce sont les terroristes qui sont la cause de tous ces malheurs. Ce que contredit pourtant l’ONU et Amnesty International : la majorité des crimes ont été commis par les paramilitaires, ensuite par l’armée et en dernier par les différentes guérillas.

Dans les câbles transmis par Wikileaks, il se désigne lui-même comme étant un « hypocrite ». Il avait soutenu que les FARC se cachaient au Venezuela et que cela valait le Tribunal Pénal International pour Chavez, alors qu’il savait très bien que le gouvernement vénézuélien n’était pas lié à la guérilla colombienne.
Par contre, plusieurs collectifs d’avocats colombiens ont déposé plainte contre « l’hypocrite » devant le TPI pour crime contre l’humanité.


La Colombie est aussi le pays de la cocaïne, tout le monde le sait. Mais ce que l'on sait moins est que ce propriétaire terrien, qui prétend avoir lutté contre le trafic, est accusé par la CIA d'être très proche du milieu.

Cet homme politique, malgré toutes les controverses et les accusations, vient de devenir professeur dans le pays des Droits de l’homme. Ce n’est pas le premier essai de blanchir celui qui a amnistié les paramilitaires coupables de crimes contre l’humanité : il avait été désigné pour enquêter sur la flottille pour Gaza. Ses conclusions : l’armée israélienne avait bien fait son travail.

Les Droits de l’homme ne sont décidément pas sa spécialité. Selon lui, les ONG qui luttent pour la reconnaissance des victimes du conflit social en Colombie sont des alliées du terrorisme, comme les professeurs d’université et les journalistes critiquant sa politique, actuellement en prison. Son obsession du terrorisme-partout cache la réalité colombienne où un conflit social et armé sévit depuis plusieurs dizaines d'années.

Mais, le pays des droits de l’homme semble avoir oublié ses idéaux : après l’affaire Alliot-Marie voulant exporter le savoir-faire français dans la dictature de ses amis tunisiens, l’ENIM et son directeur Pierre Padilla, importe le savoir-faire meurtrier de la Colombie.

Lors de la première visite d’Uribe à Metz, pour inaugurer le nouveau technopole, en septembre 2010, le Sénateur lorrain Philippe Leroy avait exprimé son attente de voir la France imiter le modèle colombien de son nouvel ami « que ce soit par rapport au terrorisme ou du débat sur la présence des communautés sur son sol.» !

Les étudiants de l’ENIM accepteront-ils longtemps les enseignements de cet homme politique que de nombreux Colombiens préféreraient voir en prison ?



(Traduction de l'image : Recherché : paramilitaire narcotrafiquant. Récompense : la fin du financement des tueurs à gages, la fin des fosses communes, la fin de l'impunité, la fin du para-état)
 

Source : investigaction.net

 

VOIR LE COMMUNIQUE DE TEJE, Association composée majoritairement d'étudiant(e)s colombien(ne)s et de diplômé(e)s d'institutions d'éducation supérieure en France

 


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